Notre rapport de 2013 a montré que la retraite des femmes était la résultante des inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes et du poids des responsabilités familiales, qui pèsent majoritairement sur les femmes. Nous avons pu constater d'importantes inégalités en matière de retraite, avec des écarts sensibles de pensions, réduits toutefois par les droits familiaux et conjugaux. À cet égard, il nous était apparu que les droits familiaux demeuraient un moyen efficace pour réduire les inégalités. Autre constat : les femmes étaient plus nombreuses parmi les bénéficiaires des minima contributifs. Elles partaient aussi en retraite à un âge moyen supérieur à celui des hommes, car elles avaient besoin d'accumuler davantage de trimestres pour se constituer une retraite consistante, compte tenu du profil parfois haché de leur parcours professionnel. Cela sera vraisemblablement la même chose dans le système universel annoncé par le Gouvernement, car elles auront toujours besoin d'accumuler, non plus des trimestres, mais des points.
Cinquante ans après l'arrivée massive des femmes sur le marché du travail, ces inégalités de retraite se réduisent certes, mais beaucoup moins vite que la solidarité et la justice ne l'exigeraient. Ces inégalités vont donc perdurer. La durée d'assurance des femmes va se rapprocher de celle des hommes, mais la maternité et les interruptions liées aux naissances vont continuer d'impacter négativement les carrières et la retraite des femmes.
Les droits familiaux sont en outre mis à l'épreuve par l'évolution des structures familiales : pensons par exemple aux femmes divorcées, dont les ex-maris ne comprennent pas toujours pourquoi elles devraient bénéficier d'une partie de la réversion à leur décès, alors, disent-ils, qu'elles ont déjà perçu des prestations compensatoires et que la séparation est parfois ancienne. Certains contestent l'existence même d'une pension de réversion au motif qu'elle maintiendrait un lien fictif avec l'ex-conjoint, qu'elle ne prendrait pas en compte les parcours de vie ou qu'elle serait contraire à l'autonomie des femmes... Ce point de vue est contestable car la pension de réversion ne maintient aucun lien après un divorce et les couples concernés par la pension de réversion ne sont pas toujours ceux dont le divorce a donné lieu à une prestation compensatoire...
Dans notre rapport, nous avions également étudié les inégalités professionnelles qui perdurent aux dépens des femmes. Mais cela n'est pas le sujet du jour : on ne règlera pas ces inégalités au travers des retraites.
La question qui se pose à nous aujourd'hui est la suivante : le système universel à points tel que proposé par le Gouvernement est-il plus juste pour les femmes que le système actuel ? Manifestement, il ne les exonérera pas de l'exigence d'une carrière complète qui reste un objectif difficile à atteindre pour nombre de femmes. À ce stade, je n'ai donc pas identifié les avantages du nouveau système pour les femmes. En outre, celles-ci ont disparu de l'étude d'impact : la démonstration par l'exemple n'est donc pas faite.