Intervention de Simon Sutour

Commission des affaires européennes — Réunion du 4 mars 2020 à 13h30
Institutions européennes — Programme de travail de la commission européenne pour 2020 - examen de la proposition de résolution européenne et de l'avis politique de mm. jean bizet et simon sutour

Photo de Simon SutourSimon Sutour, rapporteur :

Le 29 janvier dernier, la Commission européenne a présenté son programme de travail pour 2020, le premier depuis le renouvellement des institutions européennes en 2019. Il s'agit de mettre en oeuvre les priorités qu'Ursula von der Leyen, alors candidate à la présidence de la Commission, avait exposées en juillet 2019 devant les députés européens élus quelques semaines auparavant.

Le Conseil européen du 20 juin 2019 avait lui-même adopté un nouveau programme stratégique, « destiné à orienter les travaux des institutions au cours des cinq prochaines années » et articulé autour de quatre grandes priorités : protéger les citoyens et les libertés ; mettre en place une base économique solide et dynamique ; construire une Europe neutre pour le climat, verte, équitable et sociale ; promouvoir les intérêts et les valeurs de l'Europe sur la scène mondiale.

Le programme de travail de la Commission est cohérent avec ces conclusions du Conseil européen. Maro efèoviè, vice-président de la Commission en charge des relations interinstitutionnelles et de la prospective, a annoncé, pour mai prochain, la présentation d'une programmation pluriannuelle entre la Commission, le Parlement européen et le Conseil, destinée à convenir de priorités législatives. Cet exercice nouveau serait sans doute bienvenu mais, faute d'accord en interne, le Parlement européen n'est pas parvenu, jusqu'à présent, à formaliser sa propre position par le vote d'une résolution.

Une Union plus ambitieuse, tel est l'intitulé du programme de travail de la Commission pour cette année. Ambitieux, ce texte l'est indubitablement, ne serait-ce que parce qu'il affiche un objectif pour les cent premiers jours ! C'est pourquoi il nous paraît important de veiller à une programmation rigoureuse des travaux législatifs annoncés et, surtout, à sa mise en oeuvre effective. L'Union européenne doit se garder d'effets d'annonce sans suite. Au contraire doit-elle être en mesure de présenter rapidement des résultats concrets aux citoyens européens, dans un contexte d'euroscepticisme et de refondation de son action. À ce titre, le premier discours sur l'état de l'Union de la présidente von der Leyen, traditionnellement prononcé au mois de septembre, devra permettre de dresser un premier bilan de l'action de la nouvelle Commission.

Par ailleurs, il nous faut veiller à ce que ce programme de travail soit conduit dans le respect du principe de subsidiarité et selon les modalités arrêtées dans notre résolution européenne de 2017 sur la simplification du droit européen.

À titre liminaire, le programme de la Commission souligne plusieurs éléments importants : l'indispensable transition écologique et numérique, le fonctionnement inclusif, l'affirmation des valeurs européennes, et la nécessité d'une Union européenne forte et unie dans un monde incertain, marqué par des tensions et des conflits. Quand la Commission Juncker se voulait « politique », la Commission von der Leyen s'affirme « géopolitique ». Le programme de travail évoque naturellement un nouveau partenariat avec le Royaume-Uni, mais mentionne aussi deux points qui ne sont curieusement pas développés par la suite : le soutien à un droit d'initiative pour le Parlement européen - sans mention des parlements nationaux ; nous devons toujours rappeler notre existence... - et le recours accru à la prospective stratégique. Le 18 février dernier, Maro efèoviè a réitéré cet engagement en faveur du droit d'initiative devant la commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen, en précisant que cette procédure devrait être accompagnée d'un travail en amont avec ses services afin de prendre un certain nombre de précautions juridiques.

Le programme de travail comporte 43 actions, réparties selon les six grandes ambitions définies dans les orientations politiques d'Ursula von der Leyen : le Pacte vert pour l'Europe (8 actions), l'Europe adaptée à l'ère du numérique (9 actions), l'économie au service des personnes (6 actions), l'Europe plus forte sur la scène internationale (7 actions), la promotion de notre mode de vie européen (4 actions) et un nouvel élan pour la démocratie européenne (9 actions).

Au total, ces 43 actions devraient être mises en oeuvre à travers 96 initiatives, dont 29 initiatives de nature législative et 67 initiatives de nature non législative (à surveiller aussi), selon un calendrier prévisionnel établi de façon trimestrielle. La Commission prend bien soin toutefois de préciser que ces informations restent indicatives. Le président Bizet précisera le contenu de ces diverses initiatives, dont quelques-unes ont déjà été rendues publiques.

Par ailleurs, le programme de travail présente également les révisions, évaluations et bilans de qualité auxquels la Commission envisage de procéder au cours de l'année, au titre du programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT), qui est un programme de simplification. 44 initiatives sont prévues dans ce cadre, dont 18 au titre du Pacte vert pour l'Europe et 15 au titre de l'objectif « Une Europe adaptée à l'ère du numérique ». Je peux ainsi citer la révision du règlement sur les réseaux transeuropéens d'énergie, la révision de la directive sur les batteries, le bilan de qualité de la législation européenne sur les perturbateurs endocriniens, l'évaluation de la stratégie européenne pour le bien-être animal, le réexamen de la directive sur la réduction des coûts du haut débit, l'évaluation de la directive sur les services postaux, le bilan de qualité en matière de publication d'informations par les entreprises, l'évaluation du volet commercial des six accords d'association de l'Union européenne avec les pays euro-méditerranéens ou encore la révision de la directive sur la sécurité générale des produits.

La Commission dresse également la liste des 126 textes présentés par la Commission Juncker et considérés comme prioritaires, mais dont l'examen législatif reste en cours. Il s'agit en particulier des 56 textes relatifs au cadre financier pluriannuel 2021-2027, mais aussi, hors de cette catégorie, des propositions législatives concernant, par exemple, le paquet « asile ».

Le programme de travail indique aussi que seront retirées, d'ici juillet prochain, 32 propositions législatives, dont 15 relèvent de l'orientation politique correspondant au Pacte vert pour l'Europe. Ces retraits peuvent être motivés par l'obsolescence : c'est le cas d'une proposition de règlement de 2014 prévoyant une interdiction de la pêche au filet dérivant, ou encore d'une proposition de décision du Conseil de 2009 relative à la conclusion d'un accord avec la Corée du Sud sur certains aspects des services aériens, dont les dispositions ont finalement été intégrées dans d'autres textes. Ils peuvent également être motivés par l'absence de perspective d'accord ; tel est le cas, par exemple, de deux propositions de directive de 2013, la première relative à la mise sur le marché des denrées alimentaires obtenues à partir d'animaux clonés - ce qui est un peu effrayant - et la seconde sur le cadre juridique de l'Union régissant les infractions douanières et les sanctions qui y sont applicables.

Enfin, la Commission envisage d'abroger deux textes en vigueur dont les dispositions sont devenues obsolètes : un règlement de 1970 instaurant une comptabilité des dépenses afférentes aux infrastructures de transports par chemin de fer, par route et par voie navigable, et un autre de 1986 relatif à la suppression de certaines redevances postales de présentation à la douane.

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