Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 8 avril 2020 : 1ère réunion
Échange de vues sur la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi de finances rectificative et le plan d'urgence pour faire face à la crise du covid-19 en téléconférence

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

Il y avait un dispositif qui fonctionnait bien : le médiateur national du crédit - René Ricol fut le premier à assumer cette fonction. Nous pourrions suggérer de restaurer un mécanisme de médiation avec une personnalité dédiée et indépendante des banques. Le médiateur de la Banque de France est quelque peu juge et partie, puisque celle-ci assure la cotation des entreprises. Un véritable dispositif de médiation nécessite une indépendance à l'égard du système.

Nous devons, avant les auditions prévues, faire la liste de tous les points que nous avons évoqués : la situation des start-up, des entreprises en difficulté, la cotation Banque de France, etc. C'est notre première urgence.

Autre sujet important : les pertes d'exploitation des entreprises. Les dispositifs qui ont été votés prévoient des reports de charges, mais nous savons que, en cas d'absence de chiffre d'affaires, ces reports se transformeront en dégrèvements. Le ministère des finances et les économistes doivent établir des règles. Par exemple, à partir de quel moment sera-t-il obligatoire de dégrever ?

Le dispositif destiné à compenser les pertes d'exploitation a le mérite d'exister, mais il est très insuffisant. Ce ne sont pas 1 500 euros qui sauveront des sociétés réalisant moins de 1 million d'euros de chiffre d'affaires. Bien qu'étant partisan en temps normal d'une certaine rigueur budgétaire - laquelle nous aurait permis d'avoir davantage de marges de manoeuvre aujourd'hui - je souhaite que soit mis en place un système mieux calibré, sur le modèle allemand, qui prévoit des prises de participation, y compris dans des entreprises de taille intermédiaire. Car même en l'absence de chiffre d'affaires, les entreprises doivent payer leurs charges. Une attention particulière doit par ailleurs être portée aux secteurs sinistrés, comme le tourisme.

Je partage vos analyses sur la solidarité européenne, qui n'existe pas bien dans cette situation de crise. Il faudra aussi s'interroger sur les eurobonds ou coronabonds et prévoir, peut-être, des auditions.

Le concours de la BCE est peut-être insuffisant, mais cette injection de liquidités a permis d'établir des taux souverains relativement modérés.

Les collectivités territoriales ont chacune annoncé des dispositifs, sans mesurer nécessairement leur part de CVAE et leurs pertes de TVA. On estime la baisse de la consommation de carburants entre 60 % et 85 %, ce qui aura un impact sur le budget de l'État comme celui des collectivités locales. La prévision, dans le projet de loi de finances rectificative, de recettes stables de TICPE était une vue de l'esprit.

Je ne connais pas le montant des économies que réaliseront les compagnies d'assurance en matière de dommages. Il est évident qu'elles vont en faire sur les accidents de la route puisqu'il n'y a plus de circulation ; il en sera de même dans le domaine des assurances industrielles. La participation volontaire de ce secteur au fonds de solidarité serait une solution, puis à plus long terme la création d'un risque « pandémie » ou, de façon plus large, d'un risque lié à la fermeture décidée par l'autorité administrative.

Je suis d'accord pour changer les horaires de nos réunions afin de permettre à nos collègues d'outre-mer de suivre plus facilement nos travaux.

S'agissant du calendrier, la priorité n'est en effet pas au programme de stabilité - il paraît d'ailleurs étonnant de demander en ce moment de tels chiffres à l'Italie et à l'Espagne... -, mais c'est une obligation européenne, et je ne sais pas si elle peut être reportée. En tout état de cause, un projet de loi de finances rectificative et peut-être un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale nous seront soumis. Pour l'instant, le Gouvernement attend sans doute d'y voir plus clair. Mon impression est qu'il n'a pas envie de trop modifier les dispositifs actuels : Gérald Darmanin a dit que l'essentiel des modalités du fonds de solidarité ne changerait pas.

Selon moi, il vaudrait mieux donner davantage de moyens aujourd'hui pour le faire moins demain ; les pertes de recettes seraient ainsi moins importantes. Si nous ne parvenons pas à soutenir nos entreprises, le tissu économique disparaîtra, et il n'y aura plus de contribuables. Vouloir dépenser moins maintenant est une idée à courte vue. Rappelons que l'Italie et l'Espagne engagent plus de moyens que la France, hors mesures de garantie de prêts.

Dernière information : pour l'Allemagne, la projection de décroissance est de 9,8 % pour le deuxième trimestre. Les chiffres sont catastrophiques.

Encore une fois, les dispositifs mis en place en France sont insuffisants dans le contexte de cette crise d'une ampleur inédite.

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