Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires européennes — Réunion du 20 avril 2020 à 14h00
Économie finances et fiscalité — Audition de M. Thierry Breton commissaire européen chargé du marché intérieur par téléconférence

Photo de Jean BizetJean Bizet, président :

Monsieur le commissaire, merci beaucoup d'avoir accepté d'être entendu aujourd'hui par la commission des affaires européennes et la commission des affaires économiques du Sénat, alors que vous êtes en première ligne pour ce qui concerne la réponse européenne au choc de l'épidémie qui nous frappe. Nous apprécions particulièrement votre présence ici au Sénat, même si nous regrettons que les nombreux sénateurs qui participent à cette réunion ne puissent être physiquement dans nos murs.

Vous êtes bel et bien au coeur du cyclone : vous avez en effet la mission d'assurer le bon fonctionnement du marché intérieur et de donner un élan à la digitalisation de notre économie. Or l'épidémie a directement entamé ces deux fronts.

D'une part, le confinement, qui s'est imposé comme la solution la plus efficace pour enrayer la contagion à défaut de vaccin, conduit à remettre en cause les libertés fondatrices du marché intérieur et à rétablir des frontières dont l'effacement est une longue conquête. C'est donc le coeur de la construction européenne qui est touché ; mais les États membres ont vite réalisé que leur interconnexion les obligeait à organiser les flux indispensables au maintien des chaînes d'approvisionnement et au rapatriement de chaque Européen dans son pays de résidence.

La crise sanitaire a aussi révélé la dépendance industrielle dans laquelle se trouve l'Europe, d'abord en matière de médicaments et d'équipements sanitaires, mais pas seulement. Sentez-vous évoluer les esprits au regard de l'ambition que vous portez en ce qui concerne la stratégie industrielle et la révision de la politique européenne de concurrence ? Plus globalement, le concept d'autonomie stratégique, défendu par la France, vous semble-t-il mieux compris par nos partenaires, et sa valeur est-elle en passe d'être mieux reconnue dans le domaine industriel, mais aussi agricole, et même en matière de défense et d'espace, sujets qui relèvent aussi de votre portefeuille ? Selon vous, le projet de futur cadre financier pluriannuel, dont la Commission annonce une nouvelle version, attestera-t-il d'une évolution sur ce point ?

D'autre part, la crise sanitaire a brutalement précipité la digitalisation de l'économie européenne : une grande part des Européens a basculé en télétravail avec le confinement, au mépris parfois de la sécurité informatique. Voyez-vous cette mutation comme une chance ou comme un risque ? En outre, la Commission européenne a présenté un cadre pour la levée du confinement qui commence à se dessiner : elle conditionne notamment ce déconfinement à la possibilité de l'accompagner d'un suivi, voire d'une surveillance de la population, grâce à des applications numériques. Comment garantir que la contribution du numérique à la sécurité sanitaire, qui est un impératif absolu, n'empiète pas excessivement sur les libertés publiques ? Comment éviter que les données collectées ne le soient pas au bénéfice des acteurs européens et que notre dépendance aux GAFA n'en soit accrue ?

Nous avons noté que la Commission européenne venait de revoir son programme de travail en raison de l'épidémie et que, de ce fait, serait reporté à 2021 le Digital Services Act, sur lequel nous fondions avec vous beaucoup d'espoirs à cet égard. Comment soutenir l'élan vers l'autonomisation numérique de l'Europe ?

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