Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 23 avril 2020 à 19h00
Loi de finances rectificative pour 2020 — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’inscrirai mes propos au nom du groupe Les Républicains dans la tonalité générale de ceux que nous avons entendus ce soir, à l’issue de trois jours d’intenses travaux dans cet hémicycle.

La crise sanitaire que nous traversons est inédite par son ampleur, puisqu’elle qui frappe aujourd’hui la moitié de la planète. C’est un événement extraordinaire qui dépasse tout ce qui aurait pu être imaginé. Nous luttons contre un ennemi invisible à la force et à la puissance qu’aucun être humain n’aurait pu imaginer.

Monsieur le secrétaire d’État, il faut considérer et entendre le Parlement, mais également l’ensemble des élus qui partout dans le pays vivent au quotidien les difficultés et les font remonter dans les assemblées. Le Gouvernement ne les ignore pas, mais il n’en prend pas toujours la pleine mesure. Il doit les appréhender mieux encore.

Au Sénat, nous avons l’habitude de travailler dans la sérénité. Notre travail est reconnu pour son caractère approfondi et nos positions pour leur sagesse.

Il y a trente jours, jour pour jour, nous avons voté l’acte I de la loi de finances rectificative. Nos voix s’étaient alors élevées contre des insuffisances de ce texte. Un certain nombre de nos remarques ont été prises en compte et traitées dans le présent acte II.

Je le dis avec un peu de solennité, car nous parlons déjà d’un acte III : il relève de la responsabilité du Gouvernement et de nos assemblées d’essayer de mieux anticiper. Prenons garde à ne pas courir après une pelote de laine qui roulerait sans qu’on puisse jamais la rattraper.

Monsieur le secrétaire d’État, si l’on ne peut que se réjouir que les travaux de cette commission mixte paritaire aient été conclusifs, c’est certainement la gravité de la situation qui a conduit à cet accord entre les deux chambres. En effet, l’urgence est à la fois sanitaire, puisque nous combattons toujours sur ce front, et économique, dimension qui commence seulement à être prise en compte, malheureusement de manière insuffisante.

Je pense notamment à ces entreprises pour lesquelles nous demandons l’annulation des charges sociales et fiscales parce qu’elles ne pourront pas reprendre leurs activités le 11 mai ou parce qu’elles ont perdu du jour au lendemain, sans même qu’il y ait forcément de fermeture administrative, toute possibilité de fonctionner normalement. Ces entreprises n’ont plus aucune entrée de chiffre d’affaires, alors que les charges continuent de courir.

Vous avez évoqué la possibilité d’une telle annulation, mais vous la reportez encore. Il faut non seulement les comprendre, mais aussi se mettre à la place des équipes et des chefs d’entreprise qui sont mobilisés et qui retournent le problème dans tous les sens sans trouver de solution. Il faut dès aujourd’hui leur redonner confiance.

À propos de confiance, une autre question, évoquée par un certain nombre d’entre nous, se pose avec solennité : celle de la place et du rôle des sociétés d’assurance. Je crois qu’il faut distinguer deux temps : celui de l’urgence et celui de demain.

Aujourd’hui, les sociétés d’assurance doivent comprendre qu’elles ont une responsabilité morale à l’égard des entreprises qui sont en difficulté, au-delà même de l’aspect juridique de couverture des risques. Elles ont fait un pas.

Le Sénat avait adopté des amendements qui n’ont pas été repris en commission mixte paritaire. Comme le rapporteur général Albéric de Montgolfier l’a bien expliqué, le Sénat a lancé un signal d’alarme à l’endroit des assureurs.

Pour demain, Vincent Segouin, Catherine Dumas et moi-même avons déposé, avec le soutien d’un grand nombre d’élus, une proposition de loi qui engagera le débat pour tenter d’apporter des solutions. Nous ne pouvons pas, nous ne devons pas rester les bras ballants.

Nous regrettons aussi, monsieur le secrétaire d’État, que certaines mesures adoptées à l’unanimité dans cette assemblée n’aient pas été reprises par le Gouvernement.

Je pense notamment au remboursement de la TVA payée par les collectivités locales sur les achats d’équipements de protection individuelle via le fonds de compensation de la TVA. Les collectivités locales ont simplement cherché à pallier les carences de l’État en matière d’importation de masques. Je rappelle que l’État, lui, ne paie pas de TVA sur ses propres importations. Non seulement les collectivités locales suppléent aux manques de l’État, mais elles doivent continuer à s’acquitter d’une taxe au bénéfice de l’État sur ces achats. Vous admettrez qu’il s’agit d’une véritable injustice.

Nous avons toutefois des motifs de satisfaction, et c’est aussi la raison pour laquelle nous voterons ce projet de loi de finances rectificative.

Je pense à la hausse du plafond concernant les heures supplémentaires pour les salariés et les fonctionnaires qui sont en première, deuxième ou troisième ligne sur le terrain.

Je pense ensuite au prêt participatif adossé au FDES pour les très petites entreprises et les PME, qui parfois se voient refuser par leur banque un prêt garanti par l’État.

Je pense aussi à l’encouragement fiscal au don vis-à-vis des personnes qui sont aujourd’hui dans le besoin.

Je pense enfin à l’extension du taux réduit de TVA à l’achat d’équipements de protection individuelle.

Si je salue ces avancées, nous devons à présent gérer une deuxième urgence : il nous faudra traverser la tempête économique avec le moins de dégâts possible. Il ne faudra pas se tromper dans les choix, monsieur le secrétaire d’État, lorsque viendra l’acte III de la loi de finances rectificative. Nous opérerons ces choix sous l’autorité du Gouvernement, mais ce dernier devra écouter les assemblées quant aux besoins et aux demandes des Français, afin de les aider, notamment à garder leur emploi. Les crises causent des dégâts, nous ne le savons que trop.

Enfin, je souhaite à mon tour me féliciter de l’excellent climat dans lequel nous avons travaillé. Nos débats ont parfois été vifs, mais c’est une bonne chose dans une démocratie. Je remercie l’ensemble des personnels à tous niveaux de responsabilité.

Le rapporteur général, qui est soumis au feu incessant des questions, mérite une mention particulière. S’il répond parfois brièvement aux yeux de certains, je sais qu’il le fait toujours avec sincérité et avec cœur.

Je crois que nous avons été au rendez-vous, et, je le répète, nous voterons en faveur de ce projet de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion