Intervention de Adrien Taquet

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 16 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de M. Adrien Taquet secrétaire d'état à la protection de l'enfance

Adrien Taquet, secrétaire d'État :

En réponse à Mme Prunaud, je précise qu'une problématique majeure pour les associations qui gèrent les foyers a bien été l'absence de nombreux éducateurs, qu'ils soient malades ou fragiles, ou qu'ils doivent assurer la garde de leurs propres enfants. C'est en assurant l'accueil de leurs enfants dans les écoles que l'on a maintenu dans les foyers un taux d'encadrement suffisant pour la sécurité des enfants ; la « réserve sociale » a également été bénéfique.

Quant aux mineurs étrangers, souvent non accompagnés, présents dans les hôtels, je veux rappeler qu'un drame dans les Hauts-de-Seine - un enfant en avait tué un autre - m'a conduit en décembre dernier à confier une mission à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la situation dans les Hauts-de-Seine, et sur celle des jeunes dans les hôtels. Leur nombre a fortement diminué depuis un an, mais il en reste encore ; pour autant, je ne saurais vous dire exactement combien, parce que les informations précises manquent. Cette mission doit nous donner une réelle cartographie de la situation afin de trouver des solutions durables. J'alerte les départements, depuis le début de la crise, quant à l'attention particulière qu'il faut prêter à ces mineurs. Ils rencontrent beaucoup de difficultés concrètes : les lieux de restauration collective qu'ils fréquentaient sont fermés, ils ne peuvent se déplacer pour toucher l'argent de poche qu'ils perçoivent des départements. De nombreux départements se sont emparés du sujet : la Seine-Saint-Denis, en particulier, pour faire en sorte qu'il y ait une continuité de l'accompagnement, a organisé le portage de repas et mis en place une réserve financière spécifique ; les éducateurs se déplacent dans les hôtels, ce qui ne semble pas être le cas dans les Hauts-de-Seine. Je vous invite à nous faire part de situations qui demeurent insatisfaisantes.

À l'attention de M. Brisson, je souhaite indiquer qu'en effet, nous travaillons avec le ministre de l'éducation nationale et avec Julien Denormandie à ces « colonies éducatives ». Nous entendons bien nous assurer que les enfants de l'Aide sociale à l'enfance bénéficient de ces dispositifs. Toutes les précautions nécessaires seront évidemment prises quant aux adultes qui seront au contact de ces enfants : le contrôle du Fijais devrait être requis pour tout recrutement.

Madame Vérien, je suis déçu de la situation que vous décrivez autour des professeurs de sport volontaires dans les foyers. Nous avions évoqué ce sujet spécifique avec Jean-Michel Blanquer, des consignes avaient été transmises, mais elles ne sont manifestement pas appliquées partout ; je me manifesterai donc une nouvelle fois !

Je ne m'aventurerai pas quant à un éventuel report de la réforme de la justice, qui n'est pas du ressort de mon secrétariat d'État... Nous travaillons sur les effets du confinement ; nous aurons à traiter avec la garde des sceaux de ses conséquences sur l'application des décisions de justice, en particulier pour la justice des mineurs. Les jugements prennent du retard et les enfants sont ballotés de foyer en foyer. Tout prend du retard. À l'évidence, quand tout rouvrira, on découvrira bien des choses qu'on n'avait pu détecter. Des problèmes de violence, de malnutrition, d'obésité devront être traités. La liste sera longue, il faut anticiper ! Quant à la reprise de l'école après le 11 mai, on a bien compris qu'elle serait progressive, sous des formes inédites : bien des questions logistiques doivent être envisagées. En ce qui concerne l'ASE, il faudra prendre en compte le fait que les enfants n'auront probablement pas tous classe en même temps dans la journée, le fonctionnement de la cantine, etc.

Enfin, Madame Monier, s'il y a saturation du 119, je ferai en sorte qu'on y remédie. La police et la gendarmerie pratiquent en effet des interventions proactives sur les situations à risque. J'ai le sentiment qu'il y a une petite différence entre les femmes et les enfants victimes de violences : souvent, un enfant est déjà suivi par nos services s'il a été victime de violences par le passé. La problématique n'est donc pas tout-à-fait la même.

Vous avez raison quant à la détresse psychologique des jeunes pendant le confinement. On relève dans les foyers des addictions aux drogues ; elles ont été la cause de fugues au début du confinement ; c'est moins le cas maintenant. Un réseau de professionnels en addictologie vient en aide aux foyers. Mon homologue italienne me dit par ailleurs se préoccuper d'éventuels suicides d'adolescents ; il faut anticiper et réfléchir à cette grave question aussi.

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