Intervention de Sébastien Soriano

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 22 avril 2020 : 1ère réunion
Audition de M. Sébastien Soriano président de l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la distribution de la presse arcep en téléconférence

Sébastien Soriano, président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la distribution de la presse (Arcep) :

S'agissant du statut de service essentiel accordé aux réseaux, je n'en maîtrise par les implications juridiques. C'est une bonne idée, sur un plan conceptuel ; d'ailleurs le service universel existe déjà et prévoit que certaines prestations soient accessibles à tous, analysons-en les conséquences, notamment en matière de résilience des réseaux. Historiquement, nous avions un grand opérateur public dans les réseaux fixes, aujourd'hui il existe plusieurs opérateurs privés et un réseau de collectivités locales intervenantes, dont les réseaux publics passent par des partenaires privés avec des modèles différents. Il s'agit donc d'une myriade de boucles locales. Comment peut-on suivre la résilience de cette infrastructure à long terme ? L'Arcep s'est engagée dans un processus lourd d'analyse des marchés qui nous a conduits à réviser à la fois la régulation d'Orange et celle de la fibre. S'agissant de ce dernier chantier, notre calendrier est maintenu, avec une ébauche à l'été et une adoption en fin d'année. Nous prévoyons de considérer que la boucle optique doit devenir le réseau de référence et prendre ainsi le relais du réseau en cuivre. Cela passe par l'imposition de certaines fonctionnalités et un suivi de la qualité des réseaux. Il faudra sans doute, par ailleurs, harmoniser les plans de continuation de service et réfléchir à des mutualisations de moyens entre acteurs. Cette réflexion pourrait être portée par le comité de filière de la fibre.

En ce qui concerne les difficultés de déploiement, nous avons voulu garder le lien avec les RIP et les territoires en organisant un chat. Les remontées nous indiquent que les RIP sont des réseaux comme les autres, malgré des montages différents, qui rencontrent les mêmes difficultés que les autres. Les acteurs privés qui en sont partenaires ne sont pas en insécurité, car ils bénéficient de contrats de très long terme, nous comptons donc sur leur responsabilité. En tout état de cause, l'Arcep est à l'écoute des difficultés, qu'il faudra analyser au cas par cas.

Vous me demandez comment transformer les voeux en obligation. Cela ne me semble pas nécessaire, car nous disposons d'un cadre juridique permettant d'exiger des opérateurs qu'ils respectent leurs calendriers initiaux, lesquels sont juridiquement contraignants. Il leur revient de se justifier, s'ils ne satisfaisaient pas à ces obligations, et de nous démontrer qu'ils ont pris les mesures nécessaires. Les termes de cette discussion sont donc à notre avantage et il n'est pas nécessaire de rendre juridiquement contraignants de nouveaux engagements, car, dans ce rapport de force, nous n'en avons pas besoin.

La plateforme de signalement que vous évoquez est le fait du Gouvernement, je ne ferai donc pas de commentaires. Les pouvoirs publics sont à l'écoute des collectivités locales et si vous n'êtes pas entendus, n'hésitez pas à passer par l'Arcep. La mobilisation de l'ANCT est totale sur ce dossier et je suis certain qu'il y a une bonne raison que cette plateforme fonctionne ainsi.

Sur l'appréciation du retard qui sera pris, j'entends la proposition d'acter qu'il ne pourra pas dépasser trois mois. Il n'est toutefois pas certain qu'un tel délai soit pertinent pour toutes les obligations ; le New Deal mobile, notamment, prévoyait des échéances en juin et nous avons averti très tôt les opérateurs que nous serions très attentifs au respect de cette date, eu égard au caractère symbolique de ce programme. A priori, le premier arrêté du 27 juin ne fera pas preuve de mansuétude, je ne pars pas du principe que les opérateurs disposeront de trois mois de plus pour remplir leurs obligations. Le New Deal mobile est une opération exceptionnelle, qui prévoit la reconduite de fréquences sans augmentation de redevances en échange d'engagements juridiquement contraignants des opérateurs. Nous serons, certes, à leur écoute, mais le monde n'a pas commencé au mois de mars et je n'entends pas leur concéder un chèque en blanc de trois mois.

Inversement, ce délai pourrait ne pas être suffisant. Il est trop tôt pour évaluer la vitesse de reprise sur le terrain et je ne saurais apprécier aujourd'hui la durée de ce décalage, d'autant que nous ignorons les conditions précises du déconfinement, la possibilité d'éventuelles rechutes, etc. Une telle décision est donc prématurée. Je vous rejoins sur un point : nous n'accepterons pas n'importe quel motif de retard au prétexte de la crise. L'Arcep est un régulateur « business friendly », il ne s'agit pas de devenir un garde-chiourme - pour autant, nous ne sommes pas naïfs. Je ne souhaite donc pas m'enfermer dans un cadre strict de trois mois.

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