Intervention de Chantal Jouanno

Réunion du 30 mai 2011 à 14h30
Éthique du sport et droits des sportifs — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Chantal Jouanno, ministre :

Être sportif, on l’oublie trop souvent, c’est aussi apprendre à se comporter en société.

Bien sûr, le sport n’est pas à l’abri des dérives de notre temps. Il est, comme notre société, confronté aux violences, à l’exclusion, aux discriminations, à la drogue, aux excès de l’argent. Toutefois, nous devons toutefois nous sortir de l’esprit que le sport, comme la société, serait condamné à ces dérives. Ou alors, cessons de croire à la politique...

Ni la mutinerie, ni les quotas, ni la drogue, ni la spéculation ne sont du sport ! Celui-ci doit rester cet espace de découverte de l’autre, l’un des derniers qui existent, dans lequel nous apprenons à partager, quels que soient nos convictions, notre niveau social et notre origine. Il doit demeurer une école de la citoyenneté par le jeu.

Les premiers espaces de transmission des valeurs du sport, ce sont les clubs. J’ai donc voulu instaurer un principe de civi-conditionnalité – pardonnez-moi ce terme peu heureux, mesdames, messieurs les sénateurs – dans l’attribution des subventions et financements publics de l’État.

L’idée est très simple : désormais, pour pouvoir percevoir de l’argent public, les fédérations devront respecter dix axes obligatoires, parmi lesquels figurent la lutte contre le dopage, le combat contre la corruption et la lutte contre les discriminations.

D’autres actions, plus ciblées, ont également été mises en place. J’ai notamment installé deux comités.

Le comité du supportérisme, présidé par le député Éric Berdoati, a pour mission de poser les bases d’une politique globale dans ce domaine. Quant au comité de lutte contre les discriminations, présidé par Laura Flessel, il est chargé de renforcer la lutte contre toutes les discriminations, y compris l’homophobie et le sexisme, que l’on oublie trop souvent dans le sport.

Enfin, nous renforcerons bien sûr nos actions en matière de prévention et de lutte contre le dopage.

Nous disposons aujourd’hui d’un dispositif performant en la matière, auquel votre collègue Alain Dufaut a beaucoup contribué d’ailleurs. Il nous faut désormais œuvrer dans le domaine de la prévention.

Dans le Plan national 2011-2014, trois axes ont été définis.

Le premier concerne l’information du grand public. Nous mènerons ainsi des campagnes de communication en collaboration avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel et la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Je suis très attachée, pour ma part, à ce parallélisme entre ces deux types de lutte.

Le deuxième axe concerne les fédérations. Il s’agit d’obliger ces dernières à adopter, dans le cadre de la civi-conditionnalité, un plan de prévention du dopage.

Enfin, et c’est le troisième axe de notre action, nous collaborerons à l’échelon régional avec l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique, l’OCLAESP. Cet organisme, qui a pour mission de combattre le trafic de produits dopants et qui accomplit un travail remarquable, doit en effet pouvoir s’appuyer sur des cellules régionales.

La présente proposition de loi apporte un complément juridique important à la politique que nous menons.

Le Gouvernement est très favorable à l’obligation imposée à chaque fédération sportive d’adopter une charte éthique qui n’oublie pas les principes du développement durable.

Nous sommes également très favorables aux bases juridiques de la licence club, du fair-play financier, ou encore à la règle de la formation locale des joueurs.

Nous sommes favorables, aussi, au renforcement des organes de contrôle au sein des fédérations et à l’élargissement de leur indépendance.

Nous sommes extrêmement favorables à la possibilité pour les fédérations sportives de diminuer le plafond des commissions des agents sportifs, en vertu du principe selon lequel le sport ne saurait être un objet de spéculation.

De la même façon, nous approuvons tout à fait le principe d’un meilleur encadrement des paris sportifs en ligne, dans le cadre de la lutte – qui n’en est qu’à ses balbutiements ! – contre les tentatives de corruption liées à ces paris.

Enfin, nous sommes favorables, bien évidemment, à l’aménagement de la scolarité pour les jeunes sportifs ayant signé une convention avec un centre de formation, qui doivent pouvoir bénéficier de ce dispositif au même titre que les sportifs de haut niveau.

Je pourrai poursuivre la liste de nos points d’accord, qui, comme on a pu le constater lors des travaux menés en commission sous la présidence de M. Legendre, est très longue.

Nous avons aussi, certes, quelques points de désaccord, mais ils sont infimes.

Ainsi, sur le dopage, j’essaierai de montrer que non seulement l’article 25 de la proposition de loi n’est pas nécessaire, mais qu’il pourrait conduire à une déresponsabilisation des fédérations.

De même, s’agissant de l’article 32, qui vise à valider le contrat du Consortium du Stade de France, les risques d’inconstitutionnalité devraient vous inciter, mesdames, messieurs les sénateurs, à le supprimer.

Sous réserve de quelques modifications minimes, le Gouvernement soutient donc fortement la présente proposition de loi.

Le consensus qui, je l’espère, s’exprimera au sein de la Haute Assemblée favorisera la poursuite de l’examen à l’Assemblée nationale de ce texte, que nous pourrons enrichir au fil de la navette, grâce, par exemple, aux conclusions de l’Assemblée du sport.

Comme les précédents orateurs, je ne manquerai pas de rappeler que les valeurs sont la raison d’être d’une politique des sports : nous avons créé un ministère des sports parce que nous pensions que le sport contribue à la vie de la cité.

L’éthique et l’éducation vont de pair en matière de sport, et c’est pour donner à nos enfants une bonne image de la société que nous allons leur laisser que nous devons constamment adapter la loi et la réglementation aux évolutions de l’époque, donc à celles du sport. Cela contribuera d’ailleurs à rendre un peu de sens à cette fameuse notion de « mission de service public », une mission que nous confions, comme vous l’avez rappelé, monsieur Collin, aux différentes fédérations.

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