Intervention de Dominique Bussereau

Délégation aux collectivités territoriales — Réunion du 16 avril 2020 : 1ère réunion
Table ronde « les collectivités territoriales face à l'épidémie de covid-19 »

Dominique Bussereau, président de l'Assemblée des Départements de France (ADF) :

L'état d'esprit est, comme dans toute crise, à la collaboration entre l'État et les collectivités. Néanmoins, comme vient de l'indiquer à l'instant François Baroin, cette collaboration est plus aisée avec le ministère de l'Intérieur et le corps préfectoral qu'avec les ARS, dont l'organisation un peu technocratique mériterait certainement d'être revue. Cette position est d'ailleurs partagée par beaucoup d'élus mais aussi plusieurs préfets.

Durant cette crise sanitaire, les départements ont accompli leur mission de solidarité territoriale et sociale. Nous sommes à la disposition des communes pour leur fournir des moyens, notamment logistiques. Nous continuons à verser les prestations telles que le Revenu de solidarité active (RSA), l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA), la prestation de compensation du handicap (PCH), et nous permettons aux travailleurs sociaux d'exercer leurs missions qu'il s'agisse de la Protection maternelle et infantile (PMI), de l'aide sociale à l'enfance, des mineurs non accompagnés, des Établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et de toutes les structures médico-sociales sur le terrain.

Pour revenir sur la question des masques, nous avons constaté les difficultés rencontrées dans certaines régions dues à des initiatives mal contrôlées au niveau central. Les départements se sont lancés dans des achats massifs de masques médicaux et chirurgicaux, souvent d'ailleurs via des commandes communes en lien avec leurs régions et les grandes métropoles de la région. Ces masques sont en cours de livraison et leur distribution, dans la plupart des cas, est assurée par l'hôtel du département avec le soutien des ARS. La collaboration est une réussite, à part quelques incidents épars liés à des problèmes de personnes plus qu'à des questions de fond. Beaucoup de départements ont également commandé des masques alternatifs et envisagent de les distribuer par l'intermédiaire de leurs conseillers départementaux via le réseau des EPCI et des municipalités.

S'agissant des tests, la bataille a été longue, voire trop longue. Nous plaidions pour que nos 75 laboratoires d'analyse, qui oeuvrent d'habitude à des tests vétérinaires ou au contrôle de la qualité des repas et des eaux, puissent être mobilisés. C'est désormais le cas dans beaucoup de départements grâce à des conventions avec les centres hospitaliers. Cela a permis un grand mouvement de dépistage dans tous les EHPAD, concernant tant les résidents que le personnel. L'objectif est d'étendre ce mouvement aux résidences autonomie, aux foyers pour personnes handicapées, aux structures d'hébergement collectif de confinés. Ce mouvement est donc parti des laboratoires d'analyse mais s'effectue en lien avec les laboratoires privés et, là encore, en coordination avec les ARS.

Je me suis entretenu hier avec le ministre Jean-Michel Blanquer au sujet de la rentrée scolaire. J'ai ressenti de nombreuses incertitudes concernant les dates, le nombre d'élèves ou les classes d'âge. Les choses sont très différentes selon les établissements et selon les régions. J'ai proposé la création d'un groupe de travail afin d'établir une charte efficace pour la réouverture des collèges. Cela s'effectue évidemment en lien avec le bloc régional, de même que les transports scolaires sont, à l'exception de ceux pour les personnes handicapées, réalisés par les régions. Cette tâche est particulièrement ardue, et de nombreuses entreprises de transport scolaire sont très durement touchées par cette crise.

Je terminerai par l'aspect financier. Dès le début, nous avons obtenu, par une démarche commune, la fin du très contesté plafond de 1,2 appliqué à l'augmentation des dépenses de fonctionnement. Beaucoup de nos demandes sont pour l'instant restées sans réponse, par exemple la possibilité d'inscrire dans la section d'investissement du budget les achats de masques. J'ai demandé au Premier ministre que les achats de masques, en particulier sur le marché chinois, soient exemptés de droits de douane, voire de TVA. Nous avons également adressé au Gouvernement plusieurs demandes afin d'autoriser des écritures comptables exceptionnelles.

Nous anticipons une hausse logique du RSA, de nombreuses personnes risquant de se retrouver au chômage. La question de son financement, dont les départements assurent plus de la moitié des dépenses, va naturellement se poser de manière accrue après cette crise.

Enfin se posera le problème des Droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Nous nous attendons à une baisse très importante. Cela pourrait remettre en cause tout notre système de péréquation horizontale. Il faudra donc repenser, conjointement avec l'AMF et Régions de France, le système de financement des collectivités locales. Au moment de financer la reprise, nous ne pourrions participer à la relance économique si nos moyens baissent trop sévèrement.

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