Merci, Madame la présidente.
Notre réunion d'aujourd'hui confirme la place centrale des aspects internationaux des droits des femmes dans l'agenda récent de notre délégation.
J'aimerais citer tout d'abord le travail réalisé en partenariat avec UNICEF France, dont je salue les représentants ici présents, sur le fléau du mariage des enfants et des grossesses précoces. Cette coopération a donné lieu à une résolution du Sénat qui a été adoptée à l'unanimité dans notre hémicycle le 14 mars 2019, il y a presque un an, à l'initiative de notre délégation.
Je voudrais également mentionner deux événements organisés en 2019 par notre délégation et ouverts au public. L'un concernait les enjeux du G7 en termes d'égalité femmes-hommes (en juin), et l'autre portait sur les violences faites aux femmes dans les territoires en conflit (en novembre).
Enfin, en janvier, nous avons ouvert une réflexion sur le bilan de notre politique de coopération et de développement du point de vue de l'égalité femmes-hommes. Ce bilan est inspiré par l'examen à venir d'un projet de loi de programmation et d'orientation de la politique partenariale de développement et de solidarité internationale.
Nous sommes convaincus que la célébration du 25e anniversaire du Programme d'action de Pékin est le bon moment pour rappeler les enjeux du combat pour l'égalité femmes-hommes et l'autonomisation économique et sociale des femmes dans la sphère internationale, en un mot de la « diplomatie féministe ».
L'éducation des filles, la promotion des femmes dans la sphère politique et sociale, le développement de leur accès aux ressources économiques et la défense de leur droit à disposer de leur corps et à maîtriser leur fécondité sont les leviers d'un progrès économique et social partagé, sans lequel il ne saurait y avoir de développement durable.
Je voudrais plus particulièrement évoquer les droits sexuels et reproductifs, sur lesquels nous reviendrons tout à l'heure avec les représentantes du HCE.
Le Programme d'action de Pékin a permis des avancées inédites dans ce domaine, reconnaissant par exemple que « Les droits fondamentaux des femmes comprennent le droit d'être maîtresses de leur sexualité, y compris leur santé en matière de sexualité et de procréation (...) et de prendre librement et de manière responsable des décisions dans ce domaine » (point 96 du Programme).
Or ces avancées sont aujourd'hui menacées.
Un rapport du Conseil économique, social et environnemental publié en novembre 20194(*) commente ainsi les menaces dont les droits sexuels et reproductifs font l'objet en Europe.
Ce constat vaut aussi, semble-t-il, pour les Nations Unies. Par exemple, en avril 2019, à propos de la discussion d'un projet de résolution du Conseil de sécurité, le représentant de la France a regretté que le texte adopté ne reconnaisse pas aux femmes victimes de violences sexuelles en temps de conflit le droit d'interrompre une grossesse. Notre ambassadeur s'est élevé contre « l'opposition de membres du Conseil de sécurité à voir réaffirmé le besoin d'accès des victimes de violences sexuelles à la santé sexuelle et reproductive ». Il a estimé, avec raison à mon avis, que les victimes ne sauraient être « sacrifiées sur l'autel des intérêts étroits et des idéologies rétrogrades ».
Le constat d'un mouvement de recul aux dépens des femmes n'est pas nouveau. En 2015, l'ambassadrice pour les droits de l'homme évoquait devant notre délégation l'existence d'une « pression dans les enceintes des Nations Unies » pour remettre en cause les droits des femmes au nom de « revendications relativistes liées à la religion et à la tradition, y compris dans le bloc occidental »5(*).
En d'autres termes, la question qui se pose aujourd'hui est la suivante : 25 ans après le Programme d'action de Pékin, ce texte pourrait-il, dans les mêmes termes, être adopté dans l'enceinte de l'ONU ?