Intervention de Laurence Rossignol

Commission mixte paritaire — Réunion du 9 mai 2020 à 10h50
Commission mixte paritaire sur le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions

Photo de Laurence RossignolLaurence Rossignol, sénatrice :

Je voudrais saluer la démarche du rapporteur Philippe Bas visant à rechercher une rédaction de l'article 1er différente de celles adoptées par les deux assemblées. J'ai compris que le « toutefois » qui concluait les propos de la rapporteure pour l'Assemblée nationale l'amenait à maintenir la rédaction des députés et qu'elle ne s'engageait donc pas à une rédaction commune en commission mixte paritaire.

Le rapporteur Philippe Bas a expliqué que, dans l'état du droit pénal, la caractérisation de la faute ne repose pas sur des faits objectifs mais sur l'appréciation du juge. Cette dimension a déterminé le Sénat à chercher à compléter le code pénal. La rédaction de l'Assemblée nationale fait, quant à elle, référence à l'état des connaissances scientifiques au moment des faits, ce qui ouvre un champ de discussion sur un terrain qui va bien au-delà de ce que les juges sont habituellement amenés à apprécier.

L'état des connaissances scientifiques au moment des faits n'est pas un élément objectif, gravé dans le marbre et constaté à un instant donné pour la bonne et simple raison que l'unanimité, en la matière, n'est pas toujours de mise. Les conclusions des scientifiques sont souvent diverses et divergentes. J'en veux pour preuve les propos du Gouvernement sur la question des masques puis sur celle des tests ainsi que sa volonté d'abriter ses propos derrière des connaissances scientifiques. Cela ne cache pas le fait que ces connaissances étaient a minima divergentes. Au moment où l'Organisation mondiale de la santé (OMS) appelait à tester tout le monde, il est possible de considérer qu'il s'agissait d'une connaissance scientifique. Si elle était retenue, cette rédaction plongerait donc les juges dans une grande perplexité et elle mettrait les justiciables, en l'occurrence les responsables publics, dans un état de vulnérabilité judiciaire préjudiciable.

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