Ils participent à faire du tourisme de loisirs et d’affaires une composante à part entière de notre paysage national et de notre art de vivre. Ensemble, ils créent 7 % à 8 % de la richesse nationale chaque année. Ils attirent 90 millions de touristes et participent ainsi au rayonnement de notre pays dans le monde entier. Aujourd’hui, je veux leur témoigner tout mon soutien.
Le secteur du tourisme est probablement le plus durement touché par cette crise hors du commun qui a mis à l’arrêt notre pays du jour au lendemain. Il avait toutefois déjà été touché, dès le début de l’année, par la diminution du trafic international de voyageurs et, encore un peu avant, par les attentats, les « gilets jaunes », les grèves.
Sans réaction de solidarité massive, cette crise, d’une ampleur sans précédent, pourrait provoquer de nombreux dépôts de bilan et se traduire, en plus de la perte économique, par une perte sèche des innombrables compétences et savoir-faire qui sont les nôtres et que le monde entier nous envie. Le bilan du premier semestre est terrifiant, et le retour à la normale ne pourrait avoir lieu qu’en 2022.
Il faut le souligner, monsieur le secrétaire d’État, l’État s’est pleinement mobilisé pour tenter d’apporter une réponse adéquate à la crise. Des mesures spécifiques ont été annoncées les 24 avril et 14 mai derniers. Je me félicite de voir qu’un très grand nombre des trente propositions que Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, vous a adressées à la fin du mois d’avril dernier avec trois collègues membres de la cellule de crise, dont Viviane Artigalas, se retrouvent dans le plan Tourisme du Gouvernement.
Ce plan est un bon signal en direction des professionnels. Il faudra cependant encore le compléter et le clarifier.
Il faut d’abord compléter ce plan en matière de trésorerie.
Le fonds de solidarité pourrait être encore élargi, en faisant passer le seuil de bénéfice imposable de 60 000 à 100 000 euros.
Les professionnels attendent également des gestes quant aux loyers du parc privé, dans la logique « zéro recette, zéro charge ».
Le chômage partiel pourrait être élargi à certains professionnels dont les effectifs n’ont été mobilisés que pour gérer les pertes et aux établissements publics industriels et commerciaux, notamment les offices de tourisme, qui n’ont pas été éligibles au chômage partiel. L’éligibilité pourrait être estimée au prorata des recettes commerciales ; je réitère cette demande, monsieur le secrétaire d’État.
Les reports d’échéances bancaires pourraient – et même devraient – être étendus à dix-huit mois pour certains professionnels. Je pense en particulier aux campings.
La contribution des assureurs aux pertes d’exploitation pourrait largement aller au-delà de celle qu’ils ont versée.
Les plateformes en ligne devraient être appelées à témoigner de leur solidarité envers leurs partenaires les plus fragiles, à travers une diminution temporaire des commissions.
J’en viens aux mesures de nature à favoriser la reprise.
Les droits au chômage des saisonniers devront être élargis afin de faciliter leur embauche pour la saison estivale.
Une garantie d’État exceptionnelle des avoirs proposés par les hébergeurs et par les compagnies aériennes pourrait être mise en place, pour réinstaurer la confiance des consommateurs. Il est également urgent de légiférer à l’échelon européen sur les avoirs proposés par les compagnies aériennes.
Enfin, pour relancer le tourisme à moyen terme, la prochaine génération de contrats de plan État-région devrait être utilisée pour financer des appels à projets visant à mieux répartir les flux touristiques sur notre territoire, qui souffre de la fameuse règle des 80-20, que l’on connaît dans d’autres domaines. Parvenir à rééquilibrer cette répartition, c’est faire du tourisme durable !
Voilà pour les principales mesures de complément. Voici maintenant les interrogations qui appellent des clarifications de la part du Gouvernement.
La première interrogation – et non des moindres ! – est celle du périmètre concret de ce que le Gouvernement appelle le tourisme. En effet, de nombreux professionnels restent dans le flou. Je pense aux entreprises qui approvisionnent les cafés, restaurants et toutes les manifestations culturelles et sportives, comme les grossistes en boissons, aux blanchisseries, aux conciergeries pour les meublés de tourisme, aux agences immobilières spécialisées dans la location de meublés, à l’agritourisme, et j’en passe.
Concernant l’événementiel, je signale une ambiguïté dans le dossier de presse publié dans la foulée du comité interministériel du tourisme (CIT), à laquelle il faut remédier : le détail des mesures n’évoque que « l’événementiel culturel et sportif », excluant ainsi l’événementiel d’affaires ou privé, ce qui n’est évidemment pas souhaitable. Dans ce domaine, la France peut perdre non seulement son savoir-faire, mais aussi des parts de marché, car de nombreux grands salons sont internationaux.
Concernant les mesures de soutien à la trésorerie, les professionnels craignent par-dessus tout de se retrouver face à un « mur » en cas de levée soudaine et générale de ces mesures une fois l’activité reprise. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous les rassurer sur le fait que ces mesures accompagneront la reprise et ne diminueront que de façon progressive ?
Concernant les mesures sanitaires, un certain nombre de questions se posent sur la norme de quatre mètres carrés par personne dans les restaurants et cafés. L’application d’une telle mesure pourrait signer l’arrêt de mort de ce secteur.
Par ailleurs, je regrette que rien n’ait encore été décidé pour le tourisme social, si cher, à juste titre, à notre collègue Viviane Artigalas, ni pour la solvabilisation de la demande pour cet été. La cellule « Tourisme » de la commission des affaires économiques a préconisé la mise en place d’un dispositif exceptionnel d’aide au départ en vacances s’appuyant sur les chèques-vacances, une diminution exceptionnelle des tarifs autoroutiers cet été et des dispositifs d’aide pour certains publics ciblés. Nous devons faire en sorte que les Français partent en vacances ! Le tourisme domestique représente les deux tiers des recettes du secteur. En capitalisant sur cet atout, nous pouvons limiter la casse.
Je dirai un mot sur les allégements de fiscalité locale. L’État s’est engagé à prendre en charge la moitié de l’exonération de la CFE pour les collectivités qui le décideraient. En revanche, aucune compensation ne serait à l’ordre du jour pour la taxe de séjour, qui représente des sommes très élevées dans certaines communes et qui est utile pour le développement du tourisme.
Pour conclure, je formulerai une remarque d’ordre général.
La politique du tourisme en France comme son budget ne cessent de s’amenuiser depuis de nombreuses années, en raison du sentiment erroné selon lequel « le tourisme fonctionne tout seul », alors qu’il s’agit d’une économie diffuse qui a besoin de l’action de l’État et des différentes collectivités, en particulier des communes, pour créer la synergie nécessaire à cette bioéconomie.