Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux d’abord saluer le président de notre commission des lois, Philippe Bas, ainsi que les deux rapporteurs, Jacky Deromedi et Jérôme Bascher.
Permettez-moi, mes chers collègues, de vous faire part de ma fierté de défendre, au nom du groupe que je préside, cette proposition de loi relative à nos compatriotes résidant à l’étranger, spécialement en cette période qui a engendré pour eux de nombreux risques de précarisation.
Si nous avons pu déposer cette proposition de loi, nous le devons aussi à l’engagement et au dévouement de nos collègues qui représentent les Français de l’étranger. Je veux particulièrement nommer, au sein de mon groupe, Jacky Deromedi, Christophe-André Frassa, Ronan Le Gleut, Joëlle Garriaud-Maylam et Damien Regnard, sans oublier toutes celles et tous ceux qui, avec eux, sont les porte-voix et même les porte-droits des Français établis hors de France.
Cette proposition de loi est avant tout un texte de justice, eu égard aux situations injustes que vivent beaucoup de nos compatriotes résidant à l’étranger.
Est-il juste en effet que des familles françaises ayant des enfants atteints d’un handicap ou présentant des besoins éducatifs particuliers perdent tout droit à une bourse quand elles sont contraintes, faute d’accompagnement adapté, de les inscrire dans un établissement privé ? Est-il juste que les frais qu’elles doivent engager soient insuffisamment couverts par le régime de sécurité sociale ?
Est-il juste que l’on durcisse les conditions de prise en charge des soins dispensés aux Français qui résident à l’étranger lors de leurs séjours temporaires en France, quand notre pays sait se montrer souvent très généreux envers les non-nationaux ?
Est-il juste que les Français résidant dans un État de l’Union européenne ne soient assujettis ni à la CSG ni à la CRDS, alors que ceux de nos compatriotes qui vivent hors de l’Union européenne doivent, eux, s’en acquitter ? Ils sont pourtant tout autant Français !
De même, est-il juste que le taux d’imposition des revenus de source française des Français de l’étranger ait littéralement explosé – il atteint près de 50 % pour un certain nombre d’entre eux –, alors même qu’ils paient souvent des impôts importants dans leur État de résidence ? On peut parler de matraquage fiscal.
Enfin, est-il juste que les citoyens français qui donnent de leur temps pour leurs compatriotes au sein des conseils consulaires ou de l’Assemblée des Français de l’étranger ne disposent pas des moyens, du soutien, de l’accompagnement et, pour tout dire, de la reconnaissance dont bénéficient les autres élus en France ?
Non, mes chers collègues, rien de tout cela n’est juste ! S’il peut y avoir différentes catégories de contribuables, de résidences et même d’élus, il n’y a, en revanche, qu’une seule catégorie de Français, une seule communauté de citoyens français. La France leur doit à tous, sans exception et sans considération de leur choix de lieu de vie, la même protection et la même attention.
C’est au nom de cette attention que nous leur devons que notre groupe a souhaité apporter des réponses précises et concrètes aux injustices sociales qu’ils subissent, pour que les parents d’enfants à besoins particuliers puissent bénéficier de bourses, pour que tous les Français de l’étranger puissent avoir accès à des services essentiels, par exemple pour la délivrance d’un acte notarié simple, pour que l’on facilite les multiples démarches auxquelles ils sont trop souvent contraints – je pense, par exemple, à l’établissement d’un certificat de vie – et pour que l’on n’exige pas d’eux une durée d’assurance de quinze années pour une prise en charge lorsqu’ils doivent se faire soigner en France à l’occasion d’un séjour temporaire.
Le texte apporte aussi des réponses fiscales à l’injustice que constitue une imposition souvent confiscatoire, qui va notamment appauvrir de nombreux retraités.
Nous proposons ainsi d’abroger la réforme de la retenue à la source spécifique sur les traitements, salaires, pensions et rentes viagères à titre gratuit des non-résidents, mais également de revenir à un taux minimum d’imposition de 20 %, contractuellement de 30 %, sur les revenus de source française lorsqu’ils dépassent la limite supérieure de la deuxième tranche.
Toujours dans un souci d’équité, nous proposons qu’aucun Français de l’étranger ne soit assujetti à la CSG et à la CRDS, qu’il réside au sein de l’Union européenne ou en dehors.
Nous présentons également quelques mesures visant à préciser et à améliorer le régime électoral applicable aux conseillers consulaires et aux membres de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) et pour faciliter l’exercice de leur mandat. En effet, ils ne bénéficient pas aujourd’hui des mêmes autorisations de régime que nos élus locaux et doivent trop souvent avancer des frais de déplacement importants.
Dans son avis rendu hier sur les élections municipales, le Conseil scientifique indique qu’il faudra sans doute reporter les élections consulaires. Quelle est votre position sur le sujet, monsieur le secrétaire d’État ? Alors que cet avis est évasif sur les élections municipales – il pourrait se résumer par « ni pour ni contre, bien au contraire » –, il est très précis sur les élections consulaires…
Ce n’est pas qu’un texte pour les Français de l’étranger ; c’est aussi un texte pour la France, car il est dans l’intérêt de notre pays que les Français de l’étranger puissent maintenir un lien avec la Nation. Ce lien peut être physique, via la possession d’une résidence sur le territoire national ouvrant droit aux déductions fiscales liées aux intérêts d’emprunt ou aux travaux de rénovation énergétique, ou civique, par la reconnaissance de la générosité des Français de l’étranger, qui, comme tous les autres citoyens français, doivent pouvoir bénéficier des déductions fiscales associées aux dons aux organisations caritatives.
La France se doit de montrer au monde que tous ses citoyens ont les mêmes droits et les mêmes devoirs, où qu’ils résident, et que jamais notre pays ne saurait se montrer indifférent au sort de ses ressortissants vivant à l’étranger. Ces derniers jouent un rôle essentiel, en rappelant que la France, loin de n’être qu’une simple figure géométrique, un hexagone, vit dans le cœur de chaque Français, qu’il réside en métropole, dans les outre-mer ou ailleurs dans le monde !
Bien entendu, de tels engagements ont un coût, mais c’est aussi un investissement pour la France. Permettez-moi, à cet instant, de citer le général de Gaulle, qu’il est de bon ton d’invoquer ces temps-ci : « La politique la plus coûteuse, la plus ruineuse, c’est d’être petit. » Nous ne voulons pas d’une France en petit ! Nous voulons la France en grand, la France au-delà des mers, la France au-delà de ses frontières, cette France universelle qu’incarnent nos compatriotes vivant hors du territoire national ! Mes chers collègues, soutenir les Français de l’étranger, c’est servir cette France-là, entreprenante, rayonnante et influente !