Intervention de Véronique Guillotin

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 20 mai 2020 à 10h05
Proposition de loi visant à apporter un cadre stable d'épanouissement et de développement aux mineurs vulnérables sur le territoire français — Examen du rapport et du texte proposé de la commission en visioconférence

Photo de Véronique GuillotinVéronique Guillotin, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales :

La commission des affaires sociales a reçu délégation de la commission des lois pour l'examen au fond des articles 5, 6 et 9 de la proposition de loi.

À l'article 5, l'intention de l'auteure, qui est de permettre l'agrément d'un assistant familial pour l'accueil d'un seul mineur placé, est en fait déjà satisfaite par le droit en vigueur. Rien ne s'oppose dans la loi à ce que les familles d'accueil soient agréées pour accueillir un seul enfant.

Concernant l'article 6, qui a pour objet de rendre obligatoire l'accompagnement par l'aide sociale à l'enfance (ASE) des mineurs émancipés et des majeurs de moins de 21 ans en situation de vulnérabilité, la commission des affaires sociales a émis plusieurs réserves. D'une part, cette mesure risquerait de créer d'importantes charges non compensées pour les conseils départementaux, en particulier dans le contexte de la crise sanitaire actuelle. D'autre part, il n'est pas certain qu'une telle obligation améliore substantiellement l'accompagnement des jeunes majeurs, dont le contenu resterait à l'appréciation des départements, et dont le caractère systématique n'apparaît pas adapté à toutes les situations. En outre, des mesures sont en train d'être mises en oeuvre dans le cadre d'une contractualisation avec l'État rendue possible par la « stratégie pauvreté », visant à prévenir les sorties sèches de l'ASE. C'est bien là tout l'enjeu.

L'article 9 prévoit que l'attribution des allocations familiales dues au titre d'un enfant confié à l'ASE ne peut être maintenue que partiellement au bénéfice de la famille, sur décision du juge. La commission des affaires sociales a considéré que le droit en vigueur et son application assurent un équilibre satisfaisant entre maintien et retrait des prestations familiales dues au titre d'un enfant confié à l'ASE. Le juge peut ainsi, dans le cadre actuel, agir au cas par cas, dans l'intérêt de l'enfant, bien sûr, et il ressort des quelques données disponibles qu'il n'est pas systématiquement dérogé au principe posé par la loi, qui prévoit le versement des allocations familiales à l'ASE pour les enfants placés.

En outre, je rappelle que, depuis la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant, les familles ayant au moins un enfant placé se voient retirer le versement de l'allocation de rentrée scolaire pour ce dernier. Cette allocation est versée à la Caisse des dépôts et consignations, puis récupérée par l'enfant à sa majorité.

Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales, après avoir examiné au fond ces trois articles, propose à votre commission de ne pas les adopter. La discussion de ce texte, qui met en lumière les fragilités réelles de l'accompagnement des mineurs vulnérables, sera cependant l'occasion d'échanger avec le Gouvernement sur les nécessaires réformes à engager pour améliorer la protection de l'enfance.

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