Sans surprise, mon propos ne divergera pas de celui d'Éric Kerrouche, mais je souhaite y ajouter deux ou trois remarques d'ordre général.
Mme le rapporteur a indiqué que la vexation qu'elle avait ressentie du fait de l'attitude du Gouvernement s'estompait dans la durée. Ce n'est pas mon cas ! Ce Gouvernement use et abuse des ordonnances. Il le faisait avant la crise sanitaire ; cette attitude atteint son paroxysme avec le présent texte. Nous déposerons donc une motion tendant à opposer la question préalable, afin de rappeler au Gouvernement les droits du Parlement et l'importance des échanges, dont nous avons fait la démonstration au Sénat, pour enrichir la loi, permettre une meilleure application de celle-ci et améliorer sa compréhension par nos concitoyens. Le Parlement n'est pas aux ordres !
Par ailleurs, ce texte est un fourre-tout sans colonne vertébrale, sans lien entre les articles, sans rapport direct avec les conséquences de la pandémie. Certaines dispositions relèvent du bon sens, mais beaucoup ont une portée plus significative qu'il n'y paraît.
Ainsi, nous ne pourrons accepter la prolongation de l'habilitation concernant la réforme de la justice des mineurs. Le projet de loi de ratification devait être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et du Sénat ; il ne l'a pas été.
On ne peut pas non plus se satisfaire de la mesure concernant l'expérimentation des cours criminelles. Tant que celle-ci n'aura pas été évaluée, il est impensable de l'élargir à plus d'un tiers des juridictions de notre pays.
Certaines dispositions, comme l'a rappelé le rapporteur pour avis, intéressent les droits des travailleurs, avec, parfois, des remises en cause que nous ne pouvons accepter.
S'agissant de la centralisation des trésoreries de certains organismes, le Gouvernement cherche très clairement à faire main basse sur ces trésoreries pour tenter d'endiguer les difficultés liées à la dette, ce qui n'est pas acceptable.
Enfin, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement veut nous priver d'un débat sur le Brexit. La Grande-Bretagne doit annoncer, le 1er juillet, si elle fait usage de la possibilité de rallonger la période transitoire. Nous pouvons attendre sa décision ; le Gouvernement aura alors tout le temps de nous proposer un texte prévoyant le prolongement des habilitations déjà sollicitées. En tout cas, tout cela nécessite un débat de fond, pas un passage par ordonnances.
Je vous remercie de vos propositions, madame le rapporteur : un pas est fait pour mieux encadrer la volonté du Gouvernement de passer par-dessus celle du Parlement !