Intervention de Cécile Jolly

Délégation aux entreprises — Réunion du 25 mai 2020 à 17h00
Audition de M. Gilles de Margerie commissaire général de france stratégie sur l'impact de la crise en matière de recrutement et de responsabilité sociétale des entreprises

Cécile Jolly, Cheffe de projet :

a présenté l'étude, réalisée avec MM. Jean Flamand et Martin Rey, sur la typologie des métiers au regard des vulnérabilités, approfondies ou révélées avec la crise du covid-19.

Ces vulnérabilités soulignent des fractures économiques. La première concerne les métiers : avec ceux exercés par des personnes qui ont continué de travailler soit à domicile soit en présentiel et ceux dont l'activité a fermé ou dont le contrat a été interrompu, parce que qu'il leur a été difficile, voire impossible, d'exercer leur profession depuis leur. La deuxième vulnérabilité est liée aux conditions statutaires car les métiers ne sont pas égaux, entre les statuts précaires et les salariés sous CDI, préservés de la crise. La troisième est relative aux conditions de vie, certaines étant rendues difficiles, par la charge d'enfants, ou par une situation financière plus fragile compte-tenu des charges de loyer et d'emprunt immobilier au regard du niveau de salaire, ou encore par une situation de handicap ou perte d'autonomie. Selon ces conditions une éventuelle reconversion est d'ailleurs possible ou pas. Une dernière fracture sépare, parmi celles qui travaillent encore, les professions exposées à des conditions de travail difficiles, en contact direct avec le public, soumises à des horaires atypiques, des postures physiques pénibles, à une pression temporelle ou une forte charge mentale (ces deux derniers facteurs pouvant créer des risques psychosociaux), de celles qui en sont prémunies.

Cinq catégories de métiers ont été dégagées dans cette étude :

- les métiers structurellement vulnérables, en particulier les salariés des métiers de l'industrie et du BTP ;

- ils sont rejoints par de nouvelles professions : jeunes, actifs sans qualification spécifique, métiers de reconversion pour les ouvriers, dans l'hôtellerie, la restauration, les transports, la culture, le sport. Ces métiers sont caractérisés par une fragilité statutaire, des contrats précaires, notamment pour les auto-entrepreneurs, les TPE ou artisans en entreprise unipersonnelle et non protégés par leur statut, avec un salaire médian faible. Les conditions de travail les placent en situation de vulnérabilité ;

- une autre catégorie de salariés s'est surinvestie pendant la crise. Ce sont les professions de santé et d'aide aux personnes, relatives aux activités régaliennes, au commerce de première nécessité, dans le secteur alimentaire et l'agriculture. Elles sont en dominante féminines. Elles sont exposées au contact avec le virus, à des horaires atypiques, avec une charge mentale forte, notamment pour les aides-soignantes, mal rémunérées. En sortie de confinement, leurs conditions de travail sont fragilisées ;

- s'y ajoutent les cadres confrontés à l'hyperconnectivité et à l'intensification du travail, qui ont préparé le confinement puis le déconfinement, et sont protégés par le statut de CDI avec un haut niveau de qualification. Ils sont en risque de surcharge de travail, ce qui était déjà le cas avant la crise, avec un risque accru de burn out. Ceux qui travaillent dans les secteurs cycliques sont particulièrement vulnérables ;

- une dernière catégorie englobe les employés qualifiés et professions intermédiaires exerçant des fonctions de support transversales comme le secrétariat, la comptabilité ou l'encadrement. Ils sont peu vulnérables, ont été économiquement préservés mais parfois contraints à l'inactivité partielle. Cet éloignement peut les conduire à une désocialisation. Ils seront confrontés à une demande de montée en compétence numérique dans leur métier.

Il importe, lors de la reprise de l'activité, de ne pas mener de politique uniforme compte-tenu de la différenciation des situations et d'apporter un traitement « différencié » des risques auxquels sont confrontés les métiers. Si la relance verte est importante pour le BTP, l'industrie sera confrontée à la question de la relocalisation des activités, tandis que des métiers de service dans l'hôtellerie- restauration, les transports ou la culture seront confrontés à des problématiques de reconversion, nécessitant parfois un accompagnement psychique et ouvrant de nouvelles fractures numériques dans certains métiers.

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