Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, pour entrer dans ce débat, il faut de l’honnêteté.
Tout d’abord, parler de souveraineté sans parler des traités européens qui empêchent le patriotisme économique, cela manque d’honnêteté.
Aujourd’hui, l’État ne peut pas défendre nos entreprises, car le droit communautaire l’en empêche. C’est l’Union européenne qui a ouvert la porte à la désindustrialisation de notre pays et à l’exode de nos fleurons vers les pays émergents. Nous avons été les grands naïfs de la mondialisation malheureuse, et nous le sommes encore ! Avant de parler de relocaliser, il faudrait déjà penser à protéger les quelques entreprises qui survivent encore chez nous et à les soutenir.
La souveraineté économique de la France n’est possible que si nous engageons avec détermination un bras de fer avec la Commission de Bruxelles. Si nous avons manqué de masques, de gel et de tests, c’est parce que nous avions eu l’aplomb de penser – par idéologie ! – que nous pouvions nous passer de notre industrie. Les dirigeants politiques ont appris à leurs dépens – ce n’est pourtant pas faute d’avoir tiré la sonnette d’alarme ! – que l’on n’est jamais si bien servi que par soi-même. La loi du marché ne fait pas de cadeau : les Américains nous l’ont rappelé en rachetant un stock de masques qui nous était destiné sur le tarmac d’un aéroport chinois.
Il faut que toutes les industries, tous les savoir-faire, puissent s’implanter ou se réimplanter dans notre pays. Dans cette perspective, nous ne pouvons nous contenter des propos contradictoires de l’exécutif.
D’un côté, le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, déclare que « notre objectif est la souveraineté économique de la France » ; le Premier ministre, Édouard Philippe, affirme quant à lui que l’Union européenne n’a pas « été à la hauteur de la crise ».
De l’autre, le président Macron vit toujours dans le monde des idées. Il a toujours plus d’ambitions, mais pour l’Union européenne ! Ce qui importe à ses yeux, ce n’est pas l’intérêt de notre économie, mais le fait que le « manque de solidarité pendant la pandémie risque d’alimenter la colère populiste »… On le voit, ses intérêts sont idéologiques et électoralistes !
De plus, il faut une réforme fiscale profonde, notamment de l’impôt de production, qui est actuellement le plus élevé en Europe, pour encourager les entreprises à rester en France. Il faut soutenir les entreprises en continuant de les accompagner par des dispositifs de chômage partiel, car c’est maintenant qu’elles vont subir les conséquences de la crise sanitaire. Il est enfin urgent d’alléger les charges qui pèsent sur elles.
J’entendais hier le président de Danone déclarer que nous devions penser notre souveraineté alimentaire « à l’échelle européenne », en rejetant toute tentation d’« autarcie » de la France. Que la souveraineté ne soit pas la tasse de thé des patrons du CAC 40 ne m’étonne pas ! La souveraineté ne peut être que nationale, elle ne saurait être diluée ! Là où la mondialisation ultralibérale soumet à l’interdépendance, le localisme et la souveraineté procurent la liberté : liberté face aux puissances, liberté face au marché, autonomie en cas de crise.
En février, au Parlement européen, la droite de M. Bellamy et les marcheurs de Mme Loiseau ont voté main dans la main un accord de libre-échange avec le Vietnam. Rien n’a changé, malgré les promesses de la campagne des élections européennes. Relocaliser les productions stratégiques exige de la cohérence, mais la classe politique continue à croupir dans les eaux usées du libre-échange forcené.