Intervention de Bertrand Willocquet

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 30 avril 2020 : 1ère réunion
Étude sur l'urgence économique en outre-mer — Audition de M. Bertrand Willocquet directeur du département des trois océans de l'agence française de développement afd

Bertrand Willocquet :

Nous avons toujours été convaincus de l'utilité des organismes de microfinance. La première présidente de l'ADIE provenait du reste à l'AFD.

En ce qui concerne les secteurs devant être soutenus en priorité, il nous faut porter des efforts importants sur le tourisme. Un plan national est en cours de discussion. Il sera essentiel en Polynésie française, et dans les îles du Nord en Guadeloupe. Dans le reste des outre-mer, le poids du tourisme n'est pas aussi important qu'on l'imagine, même par rapport à la métropole. Si un relèvement rapide du tourisme peut être envisagé en métropole, si les Français y demeurent, la reprise dans les outre-mer sera beaucoup plus longue, en raison de l'éloignement et du confinement externe. Les voyageurs hésiteront à reprendre l'avion dans des conditions non sécurisées. De plus, leurs conceptions ont pu être ébranlées, et ils souhaiteront par exemple des loisirs davantage décarbonés. Cela peut avoir un impact durable sur le tourisme, qui est un moteur essentiel de l'économie ultramarine, notamment pour la Polynésie française. Il convient aussi de prendre en compte le risque d'une seconde vague épidémique.

Le deuxième secteur à avoir été impacté est celui du BTP. Il convient de prendre également en compte tous les circuits d'approvisionnement, essentiel à son fonctionnement. En raison de l'éloignement géographique, des perturbations des sources d'approvisionnement pourraient entraîner des pénuries de matières premières, ou des biens intermédiaires nécessaires au BTP.

Le troisième secteur le plus touché regroupe les services marchands et le commerce. L'activité devrait reprendre assez rapidement, bien qu'il soit nécessaire de la soutenir, notamment en ce qui concerne la restauration et le transport.

Au-delà de l'appréciation sectorielle, l'AFD tient à mettre l'accent sur la différenciation entre chaque type d'entreprises. Il est évident que les grosses entreprises auront davantage de facilité à reprendre que les petites. Or le tissu entrepreneurial des outre-mer est encore bien davantage constitué de petites et moyennes entreprises (PME) et de très petites entreprises (TPE) qu'en métropole. Leurs capacités de résilience sont donc moindres, et elles peuvent ne pas être prises suffisamment en compte dans le périmètre des dispositifs. Ce fait concerne également le secteur informel que j'évoquais.

La question des financements de l'Union européenne est importante pour l'AFD. Dans les États étrangers, l'agence sollicite largement les fonds de l'Union, soit plus de 600 millions d'euros par an. Ils nous sont délégués pour mettre en oeuvre des projets que nous présentons à l'Union européenne. Dans les départements d'outre-mer (DOM) et les régions ultrapériphériques (RUP), les autorités de gestion et de co-programmation stratégique avec l'État et l'Union européenne sont les régions. Nous n'allons pas nous substituer à elles. Néanmoins, des projets à l'échelon régional peuvent à la fois mobiliser des fonds européens comme le FED, mais également du FEDER (programme de coopération Interreg). Ces fonds sont parfois sous-utilisés, avec des risques de dégagement d'office à la fin de la programmation 2014-2020.

Nous sommes en capacité d'identifier des projets pour lesquels un mixage de ces fonds serait envisageable, et susceptible d'intégrer à la fois les RUP et des États étrangers dans les grands bassins océaniques. Nous sommes en capacité de nous voir déléguer des fonds européens, par les délégations de l'Union européenne pour les États étrangers, et/ou par les régions pour la partie FEDER Interreg. Il s'agit d'une piste de réflexion nouvelle. Nous sommes agréés au niveau de l'Union européenne pour la gestion de ces fonds. Certaines pistes sont intéressantes, dans l'océan Indien notamment, telles que le réseau de surveillance épidémiologique de la commission de l'océan Indien. Ce projet mobilise déjà des fonds pour les États étrangers. Il pourrait être intéressant que nous mobilisions des compléments à travers Interreg, pour pouvoir intégrer La Réunion.

Les plateformes d'intervention régionales de la Croix-Rouge constituent une autre possibilité d'action. L'utilisation de ces financements conjoints pourrait être particulièrement adaptée à des projets de santé qui exigent un déploiement au niveau régional, voire international. Ces pistes pourraient constituer des projets pilotes, dans l'attente de la prochaine programmation, et des prochains documents cadres 2021-2027.

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