Intervention de Hervé Tonnaire

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 7 mai 2020 : 1ère réunion
Étude sur l'urgence économique en outre-mer — Audition de M. Hervé Tonnaire directeur des outre-mer de la banque des territoires du groupe caisse des dépôts et consignationscdc

Hervé Tonnaire, directeur régional Pacifique, Banque des territoires du groupe Caisse des dépôts (CDC) :

C'est exactement ce que l'on évoquait à l'instant et de la nécessité du soutien du Parlement. La Caisse des dépôts partage complètement cette analyse. J'ai travaillé pour la collectivité de Guyane. Depuis le début de la crise, j'ai annoncé que l'on aurait un effet systémique sur les collectivités parce qu'avec le poids de l'octroi de mer interne et externe, les droits de douane en zone Pacifique, les taxes sur les carburants, la situation sera dramatique pour les collectivités, pour les communes, les EPCI et les collectivités régionales.

Très clairement, pour notre part, on sait que l'on peut apporter une aide. La BDT a proposé de mobiliser les fonds très puissants du Livret A qui se chiffrent en dizaine de milliards d'euros pour permettre de refinancer ces collectivités sur le long terme et de manière sécurisée. La capacité de mobiliser sur du temps long peut permettre la commande publique, de refinancer ce qui sera redéployé de la section d'investissement vers des interventions économiques.

On est prêt aussi à préfinancer notamment le fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), l'avance de trésorerie des collectivités pour redonner cette souplesse.

Pour l'aide aux collectivités, les conditions de prêt relèvent de la Direction générale du Trésor. On se bat actuellement - et on espère que vous nous aiderez - pour obtenir de meilleures conditions de financement des collectivités en raison du très fort intérêt général.

Mais on aide aussi directement les collectivités sans avoir besoin d'autorisation. J'ai approché chacune des structures qui relèvent de ma direction, en tant que directeur des outre-mer, et mes collègues ont la même mission. Nos fonds interviennent en capital pour soutenir des sociétés d'économie mixtes. Le sénateur Artano a pris l'exemple de Saint-Pierre-et-Miquelon. Pour la SEM Archipel développement, une recapitalisation est envisagée à hauteur de 700 000 à 900 000 euros du côté de la Banque des territoires, alors que les autres banques n'ont pas forcément l'envie d'y aller. Il existe également un projet pour la Chambre interconsulaire de Saint-Pierre-et-Miquelon et pour aider Wallis-et-Futuna. Tout cela pour dire que l'on est susceptible d'aider tous les territoires qui mettent en place un dispositif de portage d'entreprises.

Concernant le tourisme, on intervient en capital, en appui mais sur du long terme ce qui n'est pas de la « prédation ». Je voudrais vous livrer quelques pistes de réflexion issues d'un échange avec les collectivités que ce soit en métropole ou en outre-mer.

Ne faudrait-il pas prévoir des structures de portage pour les exploitants qui pourraient être fragilisés. La BDT porterait les murs, les exploitants conserveraient leurs exploitations, de manière à leur redonner des liquidités, avec des dispositifs de sortie lorsque les choses se passent bien. Ils pourraient alors récupérer la propriété des murs par une forme d'usufruit. On est prêt à faire preuve de beaucoup de souplesse sur la base de texte existant, avec des collectivités compétentes et les acteurs économiques du territoire. La BDT prendrait un risque capitalistique auprès des acteurs des territoires et l'argent des collectivités ne serait pas mobilisé. Avec un effet de levier sur le « modèle français de la CDC », on pourrait mobiliser à titre privé des capitaux qui sont d'intérêt général, mais pas du tout dans une démarche de rentabilité comme celle des fonds de capitalisation américains.

On est prêt à prendre le risque d'une rentabilité moindre pour préserver l'emploi et permettre la relance. Et le jour où on n'a plus besoin de nous, la BDT se retire dans des conditions qui n'assèchent pas la reprise ou les repreneurs.

Il faudra porter des actifs qui seront compliqués mais on est vraiment ouvert sur chaque territoire à un dialogue local naturellement appuyé sur la réflexion nationale. La vocation de la Banque des territoires est d'être en appui des territoires et à l'écoute des collectivités et des acteurs du territoire. C'est ce qu'on nous demande d'être en général, c'est notre légitimité. La BDT n'est pas une banque classique. Avec de meilleurs financements sur du temps long ou du préfinancement sur des dispositifs comme la FCTVA aux collectivités, on pourrait mobiliser nos fonds propres pour les outre-mer : sur le tourisme, les énergies renouvelables, la transition écologique et les performances énergétiques et naturellement l'économie sociale et solidaire en complémentarité avec la Banque publique d'investissement. Il y a une complémentarité entre nous et la BPI, l'AFD, l'IEDOM et l'IEOM en zone Pacifique.

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