Mesdames, messieurs les sénateurs, il est important que nous échangions régulièrement. J'ai fait un point avec la délégation de l'Assemblée nationale voilà un mois. Il est important que j'en fasse un nouveau avec vous aujourd'hui. Dans ce monde où tout est mouvant, nous devons nous adapter constamment aux informations qui nous remontent en faisant évoluer les mesures, ce qui oblige à des échanges réguliers pour expliquer ces évolutions.
Monsieur Stéphane Artano, je vous rappelle qu'un arsenal massif de mesures a été mis en place pour soutenir notre économie, avec le chômage partiel, dont bénéficient plus de 60 % des salariés du secteur privé dans les DROM, à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, le prêt garanti par l'État pour soutenir la trésorerie des entreprises - presque 1 milliard d'euros a été mobilisé à ce titre - et le report de charges fiscales et sociales. Bien évidemment, ces différentes mesures ne s'appliquent pas toutes de la même manière selon les territoires ultramarins, en fonction de leurs compétences.
En outre, le second volet du fonds de solidarité pour les TPE et les travailleurs indépendants est piloté par les régions. Les critères d'attribution ont été déterminés avec l'Association des régions de France. L'État a demandé que ces critères puissent évoluer, pour faire entrer le maximum d'entreprises dans le dispositif. J'invite les régions qui souhaitent que les mesures soient adaptées aux spécificités des territoires ultramarins à se rapprocher des préfets. Au reste, j'ai déjà indiqué aux préfets de tous les territoires ultramarins qu'il fallait de l'adaptation, de la souplesse et un accompagnement accru, pour que toutes les aides puissent s'y appliquer.
Comme je l'avais demandé, des cellules d'urgence économique ont été mises en place en outre-mer. Elles fonctionnent plus ou moins bien suivant les territoires. Cela dépend de l'investissement des acteurs et de la création, ou non, de dynamiques locales.
Y aura-t-il un plan spécifique pour les outre-mer ? Il faut être très pragmatique et s'assurer, tout d'abord, que les mesures nationales sont pleinement applicables dans tous les territoires ultramarins. Je travaille à cette déclinaison des mesures dans ces territoires. Nous avons d'ailleurs fait en sorte que certaines de ces mesures puissent s'appliquer en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française, alors qu'elles n'avaient pas forcément vocation à y être mises en place. Par exemple, les tuyaux d'aides de Bpifrance y sont aujourd'hui branchés, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent. J'en profite pour remercier la Caisse des dépôts et Bpifrance de leur engagement.
Le PGE est un dispositif massif de garantie des prêts accordés aux entreprises, jusqu'à trois mois de chiffre d'affaires. Bpifrance l'a déployé à hauteur de 300 milliards d'euros. Cette garantie s'est très vite mise en place outre-mer, y compris dans les collectivités du Pacifique. Nous pouvons nous en féliciter. Un différé d'un an est octroyé aux entreprises pour le remboursement du prêt, qui peut s'étaler sur cinq années au maximum.
L'enveloppe du Fonds de développement économique et socail (FDES) a été augmentée, passant de 150 millions à 1 milliard d'euros. Ce dispositif concerne essentiellement les DROM. Bercy travaille sur un dispositif spécifique de prêts et d'avances remboursables, doté aujourd'hui de 500 millions d'euros, pour les entreprises qui se verraient refuser un PGE par leur banque. J'ai demandé que ces deux dispositifs, qui viennent compléter, pour certains territoires, les mesures d'accompagnement prises jusqu'à aujourd'hui, soient étendus à toutes les collectivités d'outre-mer, à l'instar des autres dispositifs que nous avons mis en place.
Voilà un certain temps déjà que nous travaillons à la sortie de l'économie informelle, notamment avec Frédéric Lavenir, le président de l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE). Depuis le 1er juin 2019, quelque 1,8 million d'euros a été consacré à cet objectif. Il s'agit de structurer progressivement ce qui fonctionne de manière informelle sur tous les territoires, notamment à Mayotte, en Guyane, à Saint-Martin et en Polynésie française. On a vu que la fin de l'activité informelle avait pu, dans certains territoires, provoquer des violences, voire conduire à des émeutes de la faim, comme à Mayotte et en Guyane. La sortie de l'économie formelle passe également par une incitation à la formation ; j'y travaille avec Muriel Pénicaud, ministre du travail.
Pour ce qui concerne les prêts de l'AFD aux deux territoires du Pacifique, 240 millions d'euros ont été accordés, sur sa demande, à la Nouvelle-Calédonie, qui a subi une forte crise, au titre d'un prêt garanti par l'État. La Polynésie française a également formulé une demande de soutien.
Or les trésoreries de ces deux territoires ne peuvent pas être comparées. Aujourd'hui, l'AFD est en train de traiter la demande de la Polynésie. Je crois que nous allons pouvoir avancer. La plus grosse difficulté est que la Caisse de prévoyance sociale (CPS) de Polynésie est confrontée à un risque de rupture de trésorerie à brève échéance. Quoi qu'il en soit, nous n'oublions pas ces deux collectivités du Pacifique, comme le Président de la République a eu l'occasion de le rappeler à leurs présidents respectifs il y a une semaine.
Ce matin, le Premier ministre a fait plusieurs annonces concernant le tourisme, qui visent également à aider les territoires ultramarins. Il a indiqué que, cet été, les Français seront très certainement appelés à redécouvrir la France, parce que les voyages à l'international vont être compliqués, l'incertitude demeurant sur les voyages en Europe. Les Français seront donc incités à voyager en France, en hexagone, mais aussi en outre-mer. La demande est forte aujourd'hui s'agissant du tourisme affinitaire.
L'avis du Conseil scientifique qui a été publié hier soir par le ministère des outre-mer rappelle les conditions pour se rendre dans les territoires outre-mer et l'objectif de la quatorzaine. Il fait également une proposition qui pourrait permettre de rouvrir davantage le tourisme affinitaire. Je continuerai de solliciter l'avis du Conseil. Comme le Premier ministre l'a rappelé, les choix se feront avec les élus des différents territoires.
Ce travail sur le volet touristique sera mené avec le secrétaire d'État Jean-Baptiste Lemoyne. Il a été convenu que toutes les mesures nationales seraient appliquées aux territoires ultramarins, en les adaptant le cas échéant. Il n'y aura donc pas de plan spécifique pour les outre-mer.
Je rappelle que le Premier ministre a annoncé que le fonds de solidarité resterait ouvert aux hôtels, cafés et restaurants et aux entreprises du secteur du tourisme jusqu'à la fin de l'année 2020. Vous étiez nombreux à l'avoir demandé. Le fonds est élargi aux entreprises du secteur comptant jusqu'à 20 salariés et 2 millions d'euros de chiffre d'affaires, et le plafond de l'aide issue du second volet est porté à 10 000 euros, au lieu de 5 000 euros.
Les entreprises du tourisme et de l'événementiel pourront continuer à recourir à l'activité partielle dans les mêmes conditions jusqu'à la fin de l'année 2020. Une négociation suivra. Le dispositif de chômage partiel perdurera, mais ses conditions pourraient changer.
Un plan d'investissement en fonds propres de 1,1 milliard d'euros sera porté par la Caisse des dépôts et Bpifrance, pour un effet attendu de 6,7 milliards d'euros d'investissements. C'est important pour les territoires ultramarins, qui peuvent profiter de ces mois d'attente pour permettre à leur offre de monter en gamme.
Une exonération de cotisations sociales s'appliquera aux TPE et aux PME pendant la période de mars à juin, pour un montant estimé à 2,2 milliards d'euros.
Les collectivités locales sont également invitées à alléger la taxe de séjour sur les hébergements touristiques et pourront réduire des deux tiers les cotisations foncières des entreprises du tourisme. L'État accompagnera les collectivités en finançant la moitié des efforts qu'elles auront consentis.
Sous réserve de l'évolution de l'épidémie et de possibles restrictions localisées - Mayotte est le seul territoire d'outre-mer à être classé « rouge » -, le Gouvernement souhaite que les vacances d'été puissent avoir lieu. Pour inciter aux déplacements, il a mis en place, avec les professions de l'hôtellerie et du tourisme, un système de remboursement intégral de toute réservation qui sera effectuée à partir d'aujourd'hui, dans l'hypothèse où l'on devait revenir en arrière parce que l'épidémie évoluerait dans un sens favorable.
Le plan en faveur du tourisme, doté de 18 milliards d'euros, sera décliné dans les territoires ultramarins. Les fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations seront bien entendu mobilisés. Les conditions seront présentées par chaque organisme.
La relance du tourisme dans les territoires ultramarins implique qu'un certain nombre de vols reprennent. Les compagnies aériennes qui desservent nos territoires sont directement concernées par leur réouverture. Elles sont essentielles à la continuité territoriale. J'ai déjà eu l'occasion de remercier les compagnies qui ont continué à travailler pendant cette période de crise, souvent à perte - je pense, bien sûr, à Air France et Air Austral. L'État a organisé des ponts aériens entre La Réunion et Mayotte, ainsi qu'entre la Polynésie et Paris.
Nous devons continuer à soutenir ces compagnies, qui rendent des services importants pour le ravitaillement de nos territoires, sur le plan sanitaire, mais aussi pour satisfaire les besoins du quotidien. Nous vérifions actuellement que chaque compagnie aérienne, dans chaque bassin océanique, a bien utilisé tous les dispositifs qui ont été mis en place par l'État. J'ai demandé aux préfets d'y veiller. Les compagnies qui desservent les territoires ultramarins comptent souvent des collectivités territoriales parmi leurs actionnaires. Nous devons absolument travailler avec ces derniers, comme Bruno Le Maire l'a rappelé, pour pouvoir les accompagner davantage dans le temps.
Le Premier ministre a évoqué la date du 2 juin prochain pour une première vague de réouverture de restaurants et d'activités touristiques et de loisirs. Une autre vague aura sans doute lieu avant la fin du mois de juin. Cela sera déterminé autour du 28 mai. Nous pourrons, à ce moment, faire un certain nombre d'annonces pour les territoires d'outre-mer.
La commande publique est un sujet important. Je n'ai pas attendu cette crise pour que l'on parle du BTP et des infrastructures à construire dans les territoires ultramarins. En 2018 et 2019, nous versions aux collectivités 30 % du montant du projet. En 2020, nous leur verserons 50 % dès la signature des projets avec l'État, ce qui revient à leur donner 11 millions d'euros de trésorerie.
La quasi-totalité des subventions accordées au titre du fonds exceptionnel d'investissement (FEI) 2020 a été annoncée aux collectivités. Elles sont en train d'être engagées. Nous avons essayé d'être à la hauteur des besoins. Le FEI est un instrument économique majeur dans nos territoires.
Je réunirai demain les hauts conseils de la commande publique. Je le ferai régulièrement pour créer une dynamique. Nous évoquerons l'utilisation des crédits du FEI, mais aussi les contrats de convergence et de transformation ainsi que les contrats de développement et de transformation.
J'ai demandé à chaque préfet de me faire un point concernant les engagements au titre de la LBU, pour pouvoir procéder à des réattributions si nécessaire. CDC Habitat projette de racheter des immeubles en construction à des promoteurs dans les territoires ultramarins - il y va de 5 000 à 6 000 logements. Ce sont autant de chantiers qui vont être lancés en 2020 et 2021, pour un montant compris entre 100 et 120 millions d'euros.
Il est vrai qu'il a fallu aller chercher les assurances pour qu'elles soient à nos côtés - ces entreprises aussi subissent la crise -, mais elles sont désormais au rendez-vous. Nous avons travaillé ensemble pour que leur contribution au fonds de solidarité soit portée de 200 millions à 400 millions d'euros. Elles participent également au plan de relance touristique. Je travaillerai à l'application de ce plan dans les territoires ultramarins, notamment avec Jean-Baptiste Lemoyne.
Depuis trois ans que j'exerce mes responsabilités, beaucoup de crises sont survenues en outre-mer. La plus grande difficulté, dans ces crises, a résidé dans les fake news. Nous avons besoin, dans les territoires ultramarins, de médias forts, y compris pour délivrer des informations et faire passer des messages de prévention. Nous devons soutenir nos médias, qui ont subi de grandes pertes financières, notamment au début de la crise. La situation s'améliore grâce à la relance de la publicité. Nous avions commencé, avant la crise, à travailler avec le ministère de la culture à un mécanisme de soutien. J'espère que nous serons en mesure de le lancer dans les prochaines semaines.
Madame Nassimah Dindar, il a beaucoup été question de finances locales lorsque le Président de la République a dialogué avec tous les présidents de département, de région et des associations de maires voilà dix jours. Plusieurs mesures ont été prises.
Tout d'abord, le Premier ministre a confié une mission au député Jean-René Cazeneuve, qui n'est pas achevée. Celui-ci formulera des propositions pour objectiver les demandes de chaque collectivité et, ainsi, nous permettre de les soutenir. Je suis très attentive à ce travail.
Nous avons également fait en sorte qu'il puisse y avoir des versements anticipés. J'ai signé récemment une instruction qui rappelle la possibilité, pour les DROM, de verser des avances par douzième de fiscalité.
Les recettes des communes ultramarines sont pour ainsi dire garanties jusqu'en décembre prochain, puisqu'elles sont soutenues par les régions, malgré la diminution des rentrées fiscales. Nous travaillerons ensuite avec chaque collectivité, en vue d'un retour à l'équilibre. Soutenir les collectivités, c'est aussi aider les entreprises qui attendent d'être payées dans la presque totalité des territoires - les difficultés sont énormes.
La question de l'autonomie alimentaire est essentielle. Elle l'est déjà depuis un certain temps. La visite du Président de la République à La Réunion a été l'occasion d'en parler. Le chef de l'État a souhaité qu'un délégué interministériel à la transformation agricole puisse accompagner cette transformation et accélérer les travaux d'adaptation. Ce délégué s'est rendu, pour sa première mission, à La Réunion. Il est ensuite allé dans les Antilles.
Il nous faut également valoriser davantage les circuits courts. À cet égard, je veux saluer l'innovation que l'on a pu observer dans les territoires ultramarins. Ainsi, on a vu certains rhumiers fabriquer du gel hydroalcoolique. L'innovation est au coeur des réponses de demain. Les annonces financières qui ont eu lieu sont évidemment maintenues. Nous verrons plus tard s'il faut augmenter ces moyens.
Le problème des réseaux d'eau dans les territoires d'outre-mer est aiguisé par la crise. Cette question est essentielle. Elle se pose différemment suivant les territoires. Ainsi, la Guadeloupe et la Martinique ont des problèmes d'infrastructures. Se posent également des questions de gouvernance, de vieillissement des structures... La dégradation des services rendus aux usagers, les fuites, les pannes conduisent à une perte de confiance, donc à des impayés et à des difficultés d'investissement. Il faut sortir de cette spirale. Mayotte et la Guyane connaissent un déficit en infrastructures. Des travaux plus importants doivent pouvoir y être engagés, compte tenu notamment de l'évolution de la démographie dans ces deux territoires.
Le plan d'actions prioritaires pour la Guadeloupe est doté de 71 millions d'euros. Le préfet a récemment procédé à des réquisitions pour avancer vers des solutions d'urgence et modifier la gouvernance, afin que l'offre puisse enfin être au niveau attendu par nos concitoyens. La situation actuelle est totalement inadmissible. À Mayotte, ce sont 67 millions d'euros qui sont consacrés à l'eau potable et à l'assainissement. Une grande partie des aides accordées au titre du dernier FEI financent des projets en matière d'eau et assainissement. En outre, 70 millions d'euros de l'Office français de la biodiversité (OFB) ont été mobilisés avec l'AFD pour tous les territoires. Nous travaillerons de nouveau très rapidement sur les « plans Eau ».
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous savez tous que l'État ne réglera pas seul le problème des réseaux d'eau, parce que la compétence, en la matière, est avant tout locale. Que l'État soit à côté des collectivités est normal. Qu'il soit parfois obligé de réquisitionner, si les choses se passent mal, pourquoi pas ? Cependant, il faudra que nous nous mobilisions davantage, tous ensemble, en incitant les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés à avancer sur ces sujets et, parfois, à dépasser les clivages politiques, même si ce n'est pas toujours facile avec la campagne électorale qui continue.
Une mesure réglementaire permet que des médecins étrangers travaillent en Guyane et dans les Antilles. Si un renfort se révélait nécessaire à Mayotte, nous pourrions adapter rapidement les textes. Pour l'instant, ce sont d'abord des renforts nationaux qui sont envoyés dans les territoires en cette période de crise.
Pour ce qui concerne les hôpitaux, l'État s'est engagé fortement dans des projets finalisés, comme le centre hospitalier universitaire (CHU) de Fort-de-France, à hauteur de 169 millions d'euros, la construction du Pôle sanitaire de l'ouest, à La Réunion, pour 131 millions d'euros, ou encore la construction du nouvel hôpital de Saint-Laurent-du-Maroni, pour 147 millions d'euros. Il s'est investi également dans la construction en cours du CHU de Pointe-à-Pitre, à hauteur de 590 millions d'euros. Nous souhaitons que la construction de cet hôpital, annoncé depuis quatre ans et enfin sorti de terre, avance le plus vite possible. L'hôpital de Guadeloupe a subi un incendie. À Mayotte, nous avons dû investir 27 millions d'euros pour l'hôpital de Pamandzi et 172 millions d'euros pour celui de Mamoudzou. Enfin, l'État a engagé 38,7 millions d'euros pour le regroupement de l'offre hospitalière en Martinique.
Pour ce qui concerne l'Union européenne, je travaille en concertation régulière avec le député européen Stéphane Bijoux. Nous défendons les intérêts des régions ultrapériphériques (RUP) et des pays et territoires d'outre-mer (PTOM), qui sont également portés par l'ensemble des membres du groupe Renaissance.
La crise a permis des avancées : je pense aux deux investissements en réaction au coronavirus dont la Commission a pris l'initiative, mais aussi aux modifications apportées au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) ou encore au plan de relance économique auquel participera l'Europe. C'est avec les RUP et les PTOM que nous travaillons sur le prochain budget européen. L'Europe doit être au rendez-vous. Je rencontre régulièrement les différents élus sur ces sujets.
On parle beaucoup de coopération régionale, mais celle-ci se concrétise assez peu. En cette période de crise, chaque territoire s'est complètement refermé sur lui-même et la coopération régionale a été largement oubliée. Elle a rarement porté suffisamment sur les sujets sanitaires. Nous devrons relancer ces sujets rapidement.
La France va présider la Commission de l'océan Indien (COI) en 2021. Sur ma proposition, M. Vêlayoudom Marimoutou prendra ses fonctions à sa tête en juillet prochain. Mon collègue ministre des affaires étrangères et européennes et moi-même lui avons confié deux missions : l'éducatif et le sanitaire.
Je sais que les chiffres que j'ai communiqués à l'Assemblée nationale sur la violence à Mayotte ont choqué, car ils peuvent paraître éloignés du ressenti quotidien des Mahorais. J'ai l'habitude d'être très transparente et très directe. Rares sont les ministres qui sont allés aussi souvent que moi dans les territoires ultramarins, qui ont été autant aux côtés de Mayotte. Si j'ai choqué les Mahorais, c'est parce que nous ne nous sommes pas compris. Oui, globalement, la violence a baissé à Mayotte. Effectivement, cela s'explique par la baisse du nombre de plaintes déposées. Les gens portent-ils moins plainte parce qu'ils estiment que cela ne change pas grand-chose ? Cette diminution est-elle due à la période de confinement ?
Nous avons malheureusement, sur ce territoire, des jeunes violents. Cette violence peut s'expliquer, par la détresse, par l'ennui... Mais rien ne l'excuse. Je veille, avec le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, à ce que les forces présentes soient toutes mobilisées. Nous n'avons jamais hésité à les renforcer en période de crise ou lorsque c'était nécessaire. C'est ce Gouvernement qui, avec l'opération Shikandra, a été à la hauteur des besoins de la lutte contre l'immigration illégale sur le territoire - c'est le premier Gouvernement à pouvoir s'en prévaloir. C'est ce Gouvernement qui poursuit résolument une politique de développement structurel de Mayotte, avec un plan d'avenir doté de 1,7 milliard d'euros - il faut en poursuivre la mise en oeuvre. C'est ce Gouvernement qui a renforcé de manière significative les moyens en matière de lutte contre la délinquance, ce qui explique peut-être certains chiffres, même si le travail est encore long.
Vous le savez, je suis régulièrement à la manoeuvre sur ces sujets. Je trouve lamentable et honteux que certains cherchent à profiter de la crise pour manipuler des populations fragiles en souffrance.
J'ai dit, dès les premiers jours, que la situation de Mayotte à l'égard du Covid-19 m'inquiétait fortement. C'est aujourd'hui le seul territoire ultramarin où le virus n'est pas encore maîtrisé. Nous renforçons régulièrement les moyens.
Ainsi, nous avons doublé le nombre de lits en réanimation, qui est passé de 16 à 38, même si nous partions de loin. Les élus ont souhaité une mobilisation des forces militaires pour augmenter le nombre de lits sur le territoire. Il ne s'agira pas d'un hôpital de campagne - la structure n'est pas là. Plus de quatre-vingts personnes arriveront dans le courant du mois pour ouvrir de nouveaux lits. Dès le début de la semaine prochaine, un premier module militaire de réanimation arrivera par avion. Il faudra deux à trois avions pour apporter l'ensemble des moyens nécessaires à Mayotte.
Je salue l'accord passé entre Mayotte et La Réunion sur les évacuations sanitaires. La solidarité est nationale, mais aussi régionale.
Mayotte est sans doute le territoire où le confinement a le moins marché. On y a vu des regroupements de 200 personnes. Je compte sur la classe politique pour rappeler que, pour que Mayotte sorte de cette période extrêmement difficile, il faudra que les gestes barrières soient appliqués, que les gens portent des masques et qu'ils acceptent davantage les tests. Nous mettrons tous les moyens pour aider Mayotte. La Guyane a aussi un cluster qui nous inquiète fortement.