Intervention de Annick Girardin

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 14 mai 2020 : 1ère réunion
Audition de Mme Annick Girardin ministre des outre-mer

Annick Girardin, ministre :

Monsieur Guillaume Arnell, il existe avant tout un problème de distribution et d'acheminement des masques à Saint-Martin. Pour être totalement transparente, il n'est pas rare que les compagnies aériennes préfèrent embarquer des marchandises plutôt que du matériel sanitaire, parce que celles-ci sont plus rentables que des produits dont le prix a été fixé par l'État. L'acheminement pose un autre problème : les marchandises transitent par différents aéroports, ce qui complique les choses. Hélas, l'État ne peut rien y faire, même si le ministère est attentif à cette question.

Je n'ai pas de réponse à vous donner concernant la tente que vous avez mentionnée. Cela étant, j'ai toujours dit que les territoires ultramarins ne seraient pas tous touchés de la même façon et qu'il était inutile d'envoyer trop de moyens à l'avance. Pour être le plus réactif et le plus efficace possible, il est préférable d'expédier ces moyens humains et matériels au fur et à mesure. C'est le cas pour Mayotte aujourd'hui. Je suis également attentive à la situation de la Guyane et au risque d'une seconde vague épidémique.

Les écoles ont bien rouvert le 11 mai à Saint-Martin. Je n'ai pas de retour particulier à ce sujet. Pour tenter de répondre à votre inquiétude sur le volet pédagogique de ce dossier, je puis vous assurer que des initiatives ont été lancées par le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse dès le 13 mars dernier, avec la distribution de kits de continuité pédagogique, et que les recteurs sont à la manoeuvre. À Saint-Martin, c'est le recteur de la Guadeloupe qui organise la reprise des cours. Je veux remercier tous ceux qui ont contribué à la réussite de cette opération.

Les entreprises de Saint-Martin sont éligibles au fonds de solidarité, puisque mille d'entre elles ont obtenu des aides pour un montant de 1,5 million d'euros. Les entreprises avec très peu de salariés ou sans aucun salarié pourront demander cette aide complémentaire, et ce à compter du 18 mai prochain.

Je rappellerai à la préfète l'importance de veiller à l'accompagnement des entreprises sur le territoire. La Chambre consulaire doit également être sensibilisée au sujet, soutenir l'ensemble des entreprises et leur rappeler leurs droits ; je pense au report des échéances sociales et fiscales, par exemple. J'ajoute que les récentes annonces de soutien au secteur du tourisme sont applicables à Saint-Martin. Enfin, l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE) peut aider toutes les petites entreprises qu'a évoquées M. Arnell à sortir de l'économie informelle.

Je sais que le Sénat a défendu jusqu'au bout un dispositif de quatorzaine qui laisserait le choix à chacun de la passer à son domicile ou dans une structure dédiée. Il faut savoir que, dans tous les territoires ultramarins, la quatorzaine était jusqu'à avant-hier laissée à l'appréciation des préfets. Pour ma part, j'ai défendu une position inverse de celle du Sénat : dans les territoires d'outre-mer, je pense que la quatorzaine doit être obligatoire et que c'est au préfet de décider si elle doit se dérouler au domicile de la personne.

Finalement, en commission mixte paritaire, il a été décidé de retenir une solution d'équilibre : la quatorzaine restera obligatoire et s'effectuera soit au domicile de la personne, soit en structure collective, selon le choix que fera chaque individu. Toutefois, le préfet et l'Agence régionale de santé (ARS) rendront un avis sur les conditions sanitaires d'une quatorzaine à domicile. Il faut désormais que les décrets d'application soient publiés rapidement, pour clarifier définitivement la situation.

Je me suis battue pour le maintien des quatorzaines ; il s'agit selon moi de la meilleure protection actuelle dans les territoires ultramarins. Des réflexions prospectives sont en cours, en lien avec le Conseil scientifique, pour adapter et assouplir intelligemment le dispositif à compter du mois de juin, selon le niveau de l'épidémie et les territoires.

Comme vous l'indiquiez Monsieur Antoine Karam, on a découvert un foyer de 30 cas positifs à Saint-Georges de l'Oyapock. Cette situation préoccupante s'explique par la proximité avec le Brésil, pays où le virus circule beaucoup et où aucune mesure de confinement n'a été mise en oeuvre. Les élus de Guyane, dont vous faites partie, plaident pour une structure hospitalière sur site, de manière à intervenir si besoin. Pour être franche, les questions d'ordre sanitaire, en dehors de la quatorzaine, ne sont pas de mon ressort, mais de celui du ministère de la santé. Même s'il m'arrive de relayer certaines demandes des ARS, je ne pourrai pas répondre à votre demande.

En tout cas, la fermeture des frontières terrestres et fluviales reste de mise en Guyane comme ailleurs, et le confinement est maintenu dans la commune de Saint-Georges de l'Oyapock. Les entrées par voie fluviale sont strictement encadrées, les postes de contrôle routiers d'Iracoubo et de Régina sont actifs.

Monsieur Robert Laufoaulu, je vous soutiens dans vos démarches. S'agissant des « naufragés » et des étudiants entrant à Wallis-et-Futuna, je souhaite vous rassurer : la quatorzaine est maintenue. Les étudiants wallisiens en métropole, qui sont au nombre de 135, attendent leur rapatriement, ce qui nécessite l'accord de la Nouvelle-Calédonie.

Plus largement, je voudrais parler des mesures mises en place pour le rapatriement des étudiants dans les territoires ultramarins.

Je remercie tout d'abord tous ceux qui ont joué le jeu en restant confinés en métropole, comme nous le leur avions demandé. Après que le Président de la République a annoncé la non-réouverture des universités et d'un certain nombre d'écoles, s'est posée la question du rapatriement. Avec plus d'une quinzaine associations, nous avons rapidement mené des actions pour accompagner les ultramarins présents dans l'hexagone : aide pour les démarches administratives, actions pour lutter contre l'isolement, soutien pour l'obtention d'aides alimentaires, soutien pour le tutorat, mise en place de la plateforme d'entraide « outremersolidaires.gouv.fr », aide spécifique de 200 euros pour les ultramarins boursiers qui ont entre 18 et 25 ans et qui sont restés en métropole pendant le confinement.

Nous avons recensé 11 300 étudiants voulant revenir dans leurs territoires respectifs. Soit ces jeunes rentreront au fur et à mesure en prenant les vols disponibles - ils seront alors accompagnés par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom) et bénéficieront dans certains cas d'un tarif étudiant, auquel nous sommes en train de réfléchir -, soit ils décideront de faire leur quatorzaine en métropole, ce qui leur permettra de profiter d'un couloir sanitaire pour rentrer directement chez eux et de rejoindre leurs familles. Pour certains d'entre eux, le coût des billets d'avion sera pris en charge.

Enfin, il ne faut pas oublier les étudiants ultramarins résidant à l'étranger, notamment au Canada. Il est nécessaire qu'ils se fassent recenser auprès des consulats et de l'ambassade. Nous examinons la possibilité d'une liaison directe entre le Canada et les Antilles, ainsi que de liaisons aériennes transitant par Paris pour les autres destinations en outre-mer. La question du rapatriement de ces étudiants est traitée conjointement par le ministère des outre-mer et par celui des affaires étrangères.

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