Comme vous la savez, pour être président d'une Chambre de commerce, il faut être chef d'entreprise et mon activité principale est dans le secteur des transports. Dès le début de la crise sanitaire, nous nous sommes réunis avec le préfet et la FRBTP. Nous avons signé un accord avec celle-ci et le BTP ne s'est jamais arrêté en Guyane, bien qu'elle ait continué en mode dégradé et avec une augmentation des coûts en raison des mesures de sécurité supplémentaires, notamment en faveur des terrassiers. Les chauffeurs sont munis de masques et de visières. Nous avons considéré qu'ils étaient seuls dans les camions et avaient donc peu de contacts sur les chantiers, les salariés sont également équipés de masques et de visières. Ils s'arrêtent toutes les heures et demie ou deux heures pour pouvoir procéder à un lavage de mains avant de retourner au travail. Dans les autres territoires ultramarins, les chantiers sont complétement arrêtés car aucun compromis n'a pu être trouvé. Ainsi, à Mayotte, les chantiers sont arrêtés, les appels d'offres suspendus. Le redémarrage sera très difficile et un accompagnement sera indispensable. Le BTP est un facteur de croissance et un pilier de l'économie.
En Guyane, le chantier d'Ariane 6 a été stoppé. Le CNES a fermé ses portes et vit en confinement total. Nous attendons le redémarrage de l'activité spatiale en Guyane pour voir son impact sur le tourisme d'affaires, avec une grande incertitude sur le maintien de la quatorzaine des arrivants. Si une personne qui arrive en Guyane doit rester confinée 14 jours avant de travailler les choses seront très difficiles.
En ce qui concerne les métiers de la pêche, la situation est très complexe. Georges-Michel Karam, président du Comité régional des pêches maritimes, pourrait vous en parler longuement. Les fonds sont disponibles pour aider cette filière mais il faut reconnaître que les pêcheurs manifestent des réticences pour s'adapter aux nouvelles normes de travail. Nous avons mis en place une formation pour avoir des capitaines locaux sur les bateaux mais très peu de Guyanais se sont inscrits. Nous avons même envisagé de fermer l'école faute de candidats ! Nous avons localement une particularité : les capitaines sont souvent d'origine étrangère or nos écoles privilégient la formation de candidats français. La consommation de poissons a fortement baissé car les gens ne peuvent plus venir en acheter comme ils le faisaient avant la crise. De nombreux pêcheurs ont proposé leurs poissons invendus aux associations d'aide aux personnes en difficulté. Il y a eu beaucoup de distributions gratuites de poissons. Les sociétés de transformation de poissons sont saturées en raison des difficultés pour exporter. En Guyane, il n'y a plus de transport de passagers mais nous sommes également pour le transport de fret passés de 7 à 2 vols hebdomadaires. C'est également le cas en Nouvelle-Calédonie : un vol en provenance de métropole et un vol en provenance d'Australie. Nous estimons que l'activité aéroportuaire à peu près normale ne reprendra pas avant le dernier trimestre 2020, le temps que le virus de Covid-19 fasse le tour de la planète. Nous sommes dans une économie mondiale et avons compris que lorsque la Chine redémarre, la France est en confinement.
Madame la sénatrice, les reprises des vols seront très progressives, avec des conditions sanitaires très strictes. Les premiers cas de Covid-19 dans nos territoires ont été essentiellement des cas importés. La population est partagée : elle souhaite un retour de l'activité et des avions mais ceux-ci sont des facteurs de risque. Air France a maintenu 2 vols hebdomadaires au lieu de 7 pour la Guyane. Je ne sais pas quand Air Caraïbes reprendra les siens. Ceci représente une baisse de 95 % des recettes des aéroports. Air France nous a indiqué que tous les passagers seraient munis de masques mais nous attendons des précisions sur les modalités.
L'activité de nombreuses entreprises est liée au tourisme, secteur clé pour nos territoires. Cependant, le déconfinement aura lieu dans les Antilles pendant la période cyclonique. Nous savons donc que le tourisme ne reprendra pas à ce moment-là. S'ajoute à cela la problématique précédemment évoquée de la quatorzaine. S'il faut être isolé 14 jours en arrivant aux Antilles et, à nouveau, 14 jours en revenant en métropole, cela fait beaucoup pour un séjour de quelques jours. La difficulté des chefs d'entreprise est de ne pas avoir de visibilité, notamment sur ce genre de problématique.