Intervention de André Reichardt

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 mai 2020 à 8h30
Proposition de loi adoptée avec modifications par l'assemblée nationale en deuxième lecture visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux — Examen en deuxième lecture du rapport et du texte de la commission

Photo de André ReichardtAndré Reichardt, rapporteur :

Nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture, après son adoption par l'Assemblée nationale le 30 janvier dernier, la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, déposée par notre collègue député Christophe Naegelen, qui en est aussi le rapporteur.

Composée initialement de six articles, la proposition de loi en comptait onze lors de sa transmission au Sénat et quatorze lors de son adoption en première lecture le 21 février 2019. À cette occasion, le Sénat avait adopté quatre articles conformes et trois articles additionnels. En deuxième lecture, l'Assemblée nationale n'a adopté que deux articles conformes. Sur les quatorze articles de la proposition de loi, neuf d'entre eux sont encore en discussion.

Nous avons eu des échanges constructifs avec mon collègue Christophe Naegelen, dans l'objectif commun de concilier protection du consommateur et développement de l'activité économique. Comme nous sommes en deuxième lecture, dans un état d'esprit constructif, je vous propose d'adopter deux articles conformes : l'article 2, qui introduit, à l'initiative du Sénat, le principe de l'open data des données essentielles de l'organisme gestionnaire de la liste d'opposition au démarchage téléphonique, que l'Assemblée a complété par l'obligation de publication d'un rapport public annuel par le gestionnaire ; et l'article 5, qui redéfinit le champ de l'exception contractuelle, laquelle permet à un professionnel de contacter un consommateur inscrit sur Bloctel, en la restreignant aux sollicitations en rapport avec l'objet d'un contrat en cours, qui peuvent porter sur des produits complémentaires. Cette nouvelle rédaction présente l'avantage d'être plus protectrice des consommateurs que le droit actuel sans être aussi rigoureuse que la rédaction initialement retenue par l'Assemblée nationale en première lecture et à laquelle le Sénat s'était opposé.

Je vous suggère également de ne pas revenir sur la suppression de deux articles : l'article 1er A sur les modalités d'inscription à Bloctel par téléphone, en réalité satisfait par les textes, et l'article 3 bis sur les règles de plafonnement des sanctions, en considérant que l'autorité administrative devra toujours exercer son pouvoir de sanction de manière proportionnée sous le contrôle du juge.

Je ne vous propose pas toutefois d'adopter l'ensemble du texte conforme. L'Assemblée nationale a en effet introduit trois dispositions contestables en deuxième lecture : l'interdiction, à l'article 1er bis, du démarchage téléphonique aux professionnels qui vendent des « équipements ou des travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d'économies d'énergie ou la production d'énergies renouvelables », que je vous propose de supprimer, car elle soulève un risque d'inconstitutionnalité important au regard des principes d'égalité devant la loi et de la liberté d'entreprendre ; à l'article 6, des dispositions nouvelles sans aucun lien avec celles qui restent en discussion, donc adoptées en méconnaissance de la règle de l'entonnoir fixée par l'article 45 de la Constitution, imposant aux opérateurs de filtrer les appels internationaux qui utilisent frauduleusement un numéro national et de mettre en oeuvre un mécanisme d'authentification des appels, que je vous proposerai également de supprimer - sur le fond, la première est en outre déjà en partie satisfaite par les recommandations de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et la seconde est impossible techniquement à mettre en oeuvre dans les deux ans selon les opérateurs ; enfin, à l'article 7, la précision selon laquelle la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) peut demander au juge judiciaire en référé ou sur requête la suspension de l'attribution de nouveaux numéros aux exploitants de numéros surtaxés pendant cinq ans maximum, une durée qui parait excessive pour des décisions rendues en urgence à titre provisoire et que je souhaite ramener à six mois. Cette durée peut néanmoins être discutée.

Enfin, il convient, à l'article 1er bis, d'une part, de clarifier le caractère réfragable de la présomption de responsabilité du professionnel qui méconnaîtrait ses obligations en matière de démarchage téléphonique et, d'autre part, de préciser le texte sur les obligations déontologiques auquel les professionnels seraient désormais soumis, l'Assemblée nationale ayant supprimé le recours à un décret.

Sous réserve de l'adoption de certains des amendements que nous allons examiner, je vous propose d'adopter cette proposition de loi ainsi modifiée. Nous pouvons espérer être près du terme du parcours de ce texte que beaucoup de consommateurs attendent.

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