Nous allons regarder et donnerons ces précisions, le cas échéant.
Concernant la question de Mme Marie Mercier, certes les médecins et les professions santé soignent, mais ce que je remarque aussi, pour travailler dans le champ du numérique depuis un certain temps, c'est qu'il y'a tout de même une forte sensibilité à la protection des données de santé et au secret médical de la part des médecins.
J'ai déjà vu, à maintes reprises, des refus de déploiement d'outils numériques pour des raisons de protection des données bien qu'ils aient eu un intérêt sanitaire. Une meilleure efficacité sanitaire pourrait passer par une surveillance toujours plus poussée : enregistrer tout et tout le temps pour mieux vous protéger - rythme cardiaque et taux d'alcool ou de sucre dans votre sang. Mais il faut un nécessaire équilibre entre la vie privée et la sécurité sanitaire et faire un choix, qui est plutôt un choix de sécurité des données personnelles plutôt qu'un choix médical. Dans le déploiement de systèmes informatiques, et par exemple d'intelligence artificielle dans les hôpitaux français, les garanties demandées par les hôpitaux et les professions médicales sont extrêmement hautes pour des raisons tenant à la sécurité des données mais aussi à l'éthique.
Cette tension entre efficacité du numérique et efficacité sanitaire existe depuis longtemps au sein des professions de santé.
Par ailleurs, j'insiste, les épidémiologistes reconnaissent une utilité au dispositif qui n'est pas marginale.
L'application n'est qu'un moyen parmi d'autres, je le dis si vous deviez choisir entre les brigades sanitaires et le dispositif « StopCovid », choisissez les brigades sanitaires, bien sûr. Mais « StopCovid » a un impact non marginal, non négligeable, supplémentaire, et qui permettrait d'avoir moins de malades et moins de morts. La récente tribune récemment cosignée par d'éminents épidémiologistes dans le journal Le Monde ne dit pas autre chose, je cite : « Cette application est un moyen parmi d'autres, mais elle est un atout incontestable pour identifier de nombreux contacts de façon instantanée. Elle permet de gagner du temps. Si nous voulons éviter une seconde crise sanitaire, nous devons nous en donner les moyens. D'un point de vue sanitaire, l'application « StopCovid », dûment encadrée, doit faire partie d'une stratégie nationale de contrôle de l'épidémie. »
C'est aussi la position de l'ordre des médecins et de l'académie de médecine, souvent plus mesurés sur les outils numériques.
Personne, Monsieur Kerrouche, n'a jamais prétendu que seule une application numérique pouvait résoudre le problème. Prenons le problème à l'envers : quel gain politique aurait le Gouvernement à déployer une telle application, si ce n'est un intérêt sanitaire ? Il faut mettre en balance d'un côté le risque pour la vie privée, pour les libertés publiques de cette application, et de l'autre côté le risque de morts, de malades et de confinement supplémentaires, qui est encore supérieur en termes de risques sanitaires, économiques et démocratiques. Il n'y a pas de solutionnisme technologique, ni de croyance invétérée dans l'utilité de l'application. Je vous le dis encore une fois, si vous devez faire un choix entre les brigades sanitaires et l'application, choisissiez les brigades sanitaires.
Concernant le seuil d'adoption de l'application dans la population, ne déformez pas mes propos : ce que j'ai tenu à clarifier, c'est que selon ces études, 60 % n'est pas un seuil minimum pour que l'application soit efficace. Je ne dis pas que je crois qu'avec 60 % de la population équipée de ce dispositif, il faudrait arrêter les gestes barrières et les téléchargements. L'OMS avait exprimé des craintes similaires en cas de déploiement généralisé des masques, face au risque de baisse de la vigilance et des gestes barrières une fois les populations équipées. Ne nous interdisons pas de déployer une application qui est utile parce que nous craignons que les citoyens se sentent plus rassurés. Ça serait prendre le problème du mauvais côté.
De toute façon, l'application ne sera pas présente à 60 % dans la population française, mais 20 % ou 30 % population des grandes villes serait déjà satisfaisant.
La population visée est d'ailleurs justement celle qui fait circuler le virus - et ce ne sont pas les personnes âgées, ce sont les urbains actifs, ceux qui vont dans des supermarchés, qui prennent les transports en commun aux heures de pointe. Ce sont malheureusement ceux qui sont les plus difficiles à tracer parce qu'ils ont des contacts anonymes, mais ce sont heureusement ceux qui ont le plus smartphones, puisque leur taux de possession de smartphone est au-delà de 97 %. C'est tout ceci mis dans la balance qui nous permet à la fin de prendre la décision de déployer cette application.