Intervention de Jean-Pierre Raffarin

Commission des affaires économiques — Réunion du 20 mai 2020 : 1ère réunion
« commerce international libre-échange mondialisation : quels enseignements tirer de la crise ? » — Table ronde

Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre :

C'est une question difficile.

Un mot sur les normes sociales et environnementales. Au fond, je pense qu'il faudrait aussi définir l'attractivité que nous souhaitons : c'est très important. J'entends bien que les investissements étrangers peuvent sembler inquiétants et menaçants, mais comment les choses se passent-elles à Valenciennes, chez Toyota, site issu d'un projet franco-japonais ?

Il est essentiel de savoir ce que nous voulons attirer et les normes font partie de la prise de décision économique. On peut choisir d'aller plutôt vers un territoire ou un autre. Je voudrais bien qu'on y voie clair sur l'importance de l'attractivité des investissements étrangers et de l'emploi pour connaître la part d'activité extérieure que nous acceptons. C'est un sujet extraordinairement important, parce qu'on peut jouer ensuite sur des paramètres comme la fiscalité ou les différentes normes et en faire un argument d'attractivité.

Aujourd'hui, ce sont les grandes entreprises étrangères qui alimentent en grande partie l'emploi dans la région Hauts-de-France France et elles sont les bienvenues. Qu'est-ce que cela veut dire pour nous ?

Pour ce qui est de l'arc méditerranéen, il ne faut pas se disperser, car nous n'avons pas la taille suffisante pour être présent partout - même si la France se doit de parler à tout le monde, dans la tradition gaullienne de sa politique étrangère. Il faut se concentrer aujourd'hui sur la coopération européenne, notamment franco-allemande, et rechercher les pistes d'amélioration.

Mon avis serait de donner la priorité à la dimension eurafricaine de notre stratégie, d'abord parce qu'il ne faut pas penser que nous pouvons être heureux tant que l'Afrique est malheureuse, notamment l'Afrique méditerranéenne, qui est aujourd'hui extraordinairement menacée. Il semble que la pandémie de Covid-19 n'y ait pas la même vitesse de propagation qu'ailleurs. On voit néanmoins se profiler le spectre de la faim et du chômage. L'Afrique, dans les trente ans qui viennent, doit intégrer un milliard de jeunes dans son économie si l'on veut éviter que ceci ne constitue une véritable bombe qui explosera un jour.

Ces dernières années, l'Allemagne a montré une préoccupation africaine nouvelle et celle-ci doit être appuyée. Notre destin est lié à ce qui se passe en Afrique, notamment dans le nord de ce continent. C'est la priorité, mais il ne faut pas perdre de vue que le monde a besoin de l'Europe pour éviter la confrontation. Dans ce contexte, les stratégies franco-allemandes sont porteuses d'avenir.

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