Intervention de Catherine Morin-Desailly

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 2 juin 2020 à 18h00
Examen du rapport

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Notre président et nos deux rapporteurs ont fait un excellent travail et je me réjouis qu'ils ne soient pas élus de ce département, ce qui a apporté un regard décalé, quand nous avons vécu ces événements dans l'émotion - et en avons parfois été aussi acteurs. Les annexes du rapport illustrent bien le contexte : un territoire industriel, des habitants attachés à cette culture industrielle, mais avec une culture du risque qui s'amenuise, en effet. Nous avons aussi été nombreux à souligner le manque de communication, bien mis en évidence dans le rapport, qui formule des préconisations utiles.

M. Dantec dit que l'événement n'a pas été si bien géré ; M. Martin souligne que l'incendie a été circonscrit sans faire de victime. Pour moi, ce n'est pas tant la capacité des hommes à agir qui est en cause que la disponibilité des moyens, en eau et en mousse notamment. Le colonel Lagalle nous a expliqué que le stockage de la mousse, onéreux, est organisé pour desservir de grandes zones.

M. Martin a raison d'insister sur la nécessité de prévenir mais aussi de prévoir : les élus du territoire n'ont jamais bénéficié de sessions de formation ou d'information sur le sujet, qui leur auraient clairement indiqué qui devait faire quoi. Résultat : les habitants ont eu l'impression de redécouvrir leur territoire dans son aspect industriel. La maire de Notre-Dame-de-Gravenchon m'a raconté que son fils, qui était sur place pour ses études, a tout de suite su ce qu'il fallait faire - colmater sa porte avec un linge mouillé -, car, dans cette commune, comme au Havre, on est entraîné. Le rapport préconise d'inscrire dans le code de l'éducation la sensibilisation au risque ; j'aurais envie d'ajouter une formation obligatoire pour les élus !

M. Bignon a souligné la décorrélation entre la préfecture et la métropole, faute de culture du risque partagée ; j'ai eu l'impression, en effet, que la métropole vivait presque passivement les événements. Et Mme Bonnefoy a pointé à juste titre le manque d'information des collectivités locales. La maire du Petit-Quevilly, à cinq cents mètres de l'incendie, n'a même pas été tenue au courant... pas davantage que les maires des quelque 112 communes se trouvant sous le panache, jusqu'aux Hauts-de-France ! Il faut que les élus soient systématiquement informés, pour pouvoir répondre aux questions de la population.

Nous aurions pu évoquer le rôle des médias : la mort de Jacques Chirac a occupé tout l'espace, et la population s'est sentie abandonnée par les médias dits traditionnels. Si l'audiovisuel public, notamment France Bleu, n'avait pas été là, la rupture aurait été totale. Même France 3 Normandie, dont les locaux se situent en face de Lubrizol, n'a pas été prévenue de l'arrivée du nuage et la direction a dû décider elle-même d'évacuer les bureaux. Il y a vraiment eu un déficit général de communication. Et les termes utilisés prêtaient à confusion : qu'est-ce que de la « toxicité non aiguë » ?

Pour le suivi sanitaire, il faut intégrer au plan tous les médecins libéraux et les soignants du territoire. Nous avons tous souhaité rapidement savoir quels produits exactement avaient brûlé. Ce rapport est très attendu, notamment pour son plan d'action, même si le Covid-19 a un peu chassé Lubrizol des esprits...

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