Intervention de Ernestine Ronai

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 20 mai 2020 : 1ère réunion
Audition de Mme Ernestine Ronai responsable de l'observatoire des violences envers les femmes de seine-saint-denis et de M. édouard duRand juge des enfants au tgi de bobigny co-présidents de la commission « violences de genre » du haut conseil à l'égalité

Ernestine Ronai, responsable de l'Observatoire des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis, co-présidente de la commission Violences de genre du Haut Conseil à l'égalité :

Le secrétariat d'État a développé des initiatives intéressantes. Les SMS au 114 ont remarquablement bien fonctionné, et nous devons maintenant bien le positionner : il s'agit d'un numéro d'urgence permettant des appels discrets quand la victime a du mal à s'isoler. Il ne faut pas qu'il agisse en doublon du 3919, qui est dédié à l'écoute des victimes. Je pense qu'il serait préférable que les deux outils perdurent dans le respect de leurs périmètres respectifs : l'écoute et l'orientation des victimes pour le 3919, l'urgence pour le 114.

Il faut relever que le 114, auparavant destiné à l'usage des personnes sourdes et malentendantes, avait vocation à signaler toutes les violences qu'elles subissaient. Si l'usage pour les femmes victimes de violences devait perdurer, je préconise que les professionnels soient spécifiquement formés à l'écoute des femmes victimes de violences conjugales afin qu'ils soient aptes à déceler l'urgence des situations et à agir en conséquence.

En ce qui concerne les chambres d'hôtel, il me semble nécessaire que ce dispositif perdure ! Nous avons en réalité un problème : on demande toujours aux hommes violents s'ils ont un lieu où aller ; ils commencent par répondre non. Lorsqu'on leur précise qu'ils sont sous le coup d'une éviction et qu'ils vont donc être obligés de quitter le logement, ils se rendent généralement (je ne parle pas de la période du confinement) chez leur mère, chez un ami ou ailleurs. Si l'on en revient à cette pratique, les chambres d'hôtel seront moins employées. Or de mon point de vue, il est très important que l'on sache où se trouvent les hommes violents, qu'ils fassent l'objet d'un contrôle judiciaire efficace et qu'ils ne puissent pas choisir l'endroit où ils ont envie d'aller. Il faut qu'ils soient assignés à résidence, que leur situation soit contraignante pour qu'ils prennent conscience des conséquences de leurs actes. Le fait de proposer une chambre d'hôtel à un homme violent qui n'a pas de solution d'hébergement permet d'éviter qu'il culpabilise sa victime ou même ses enfants en les accusant d'être responsables de sa situation.

Lorsqu'un homme violent sort de prison, le Service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP), lui demande s'il sait où aller : beaucoup de ces hommes répondent qu'ils veulent retourner chez leur victime. Proposer une chambre d'hôtel à ces hommes éviterait qu'ils exercent un chantage sur leur famille.

20 000 nuitées d'hôtel ont été financées par le secrétariat d'État à l'égalité : elles ont dans l'ensemble été utilisées et se sont révélées très utiles pendant cette période de confinement. Je souhaiterais que cet outil perdure, mais nous ne voulons pas seulement des chambres d'hôtel pour les victimes, nous voulons aussi des lieux d'hébergement, avec du personnel formé ; vous savez qu'il persiste un déficit dans ce domaine.

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