Intervention de Nicolas Bouzou

Commission des affaires économiques — Réunion du 13 mai 2020 : 1ère réunion
Table ronde sur le thème : « déglobalisation et relocalisation : quelles leçons tirer de la crise ? » autour de mm. patrick artus chef économiste de natixis nicolas bouzou directeur du cabinet de conseil asterès florent menegaux président de michelin et arnaud montebourg ancien ministre et entrepreneur en téléconférence

Nicolas Bouzou, directeur du cabinet de conseil Asterès :

La dette publique explose, certes, mais c'est la meilleure politique à mener pour l'instant : même sur le plan financier, ce serait un mauvais calcul de réduire le soutien aux entreprises et aux ménages pour limiter l'endettement public. Elle sera soutenable à deux conditions. Si les taux d'intérêt de long terme restent très bas, ce qui relève de la Banque centrale européenne (BCE), qui pour l'instant fait très bien les choses, il n'y aura pas de problème de solvabilité. Deuxième condition : la croissance. Nous dépensons 200 milliards d'euros supplémentaires et perdons 100 milliards d'euros de recettes fiscales ou sociales, c'est dire qu'aucune augmentation d'impôt ou baisse de dépense publique ne fera le poids. À ce niveau, ce n'est plus un sujet de finances publiques, mais de croissance. Au-delà des différences politiques, qui ne nous empêchent pas d'échanger amicalement ce matin, ce dont je me réjouis, nous pouvons tous en convenir.

La souveraineté numérique est aussi un sujet important. Nous l'avons largement perdue, en fait. Pourquoi OVH n'est-il pas devenu Google ? Cette question doit nous hanter. Nous avons pris beaucoup de retard sur les États-Unis et la Chine. Nous devons financer beaucoup mieux nos start-up. Aux États-Unis, elles bénéficient de la profondeur du Nasdaq. Si nous savons effectuer des levées de fonds de quelques millions d'euros, nous devons développer la capacité à en faire de plus grosses. Pour cela, nous devons faire un marché unique du numérique, au lieu de 27 réglementations différentes. Actuellement, certaines start-up ont plus de facilité à se développer en Chine ou aux États-Unis qu'en Europe !

Enfin, nous devons développer une politique de commande publique, en faisant évoluer les règles européennes et celles de l'OMC. Je vous renvoie à l'exemple de SpaceX, que je connais bien. Pour l'économie circulaire, à la fois écologique, locale et pourvoyeuse de croissance, nous pourrions faire beaucoup plus. Il faut pour cela des investissements lourds. Pour les susciter, il faut commencer par de la commande publique. Ainsi du papier, dont nous ne recyclons que la moitié. Si nous voulons utiliser du papier recyclé plutôt que de la pâte provenant du Brésil ou je ne sais d'où, il faut commencer par commander des cahiers recyclés. Cet outil, assez simple, est très efficace.

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