Intervention de Nathalie Gondard

Commission d'enquête Combattre la radicalisation islamiste — Réunion du 4 juin 2020 à 16h00
Audition de M. Jérôme Harnois directeur chargé de la maîtrise des risques de la sûreté et des relations institutionnelles de la ratp et Mme Nathalie Gondard chargée de mission à la délégation générale à l'éthique en téléconférence

Nathalie Gondard, chargée de mission à la délégation générale de l'éthique :

La délégation générale à l'éthique de la RATP a été créée en décembre 2015, quelques jours après les attentats du Bataclan, lesquels avaient donné lieu à une campagne de presse très virulente contre la RATP. Mme Élisabeth Borne, qui était alors notre présidente, a décidé de prendre le problème à bras-le-corps. Auparavant, en 2005, une clause de laïcité avait été ajoutée dans les contrats de travail et, en 2013, un guide pratique sur le fait religieux avait été distribué aux managers. Ces questions étaient donc connues, mais n'étaient peut-être pas suffisamment prises en compte. Un plan global a été diffusé dès février 2016, intitulé « Travailler ensemble ». Nous avions alors été violemment attaqués dans la presse et la RATP avait été décrite comme étant un repaire de djihadistes ; il nous fallait répondre de façon cohérente. Ce plan s'intéresse donc au recrutement comme au commissionnement, c'est-à-dire à l'année probatoire, et ajoute des items sur les valeurs et le respect de la laïcité dans les évaluations et dans les plans de formation des collaborateurs, de l'encadrement supérieur comme des managers de proximité, des apprentis, des tuteurs, bref, de tout le monde. Il s'agit de réaffirmer l'application des principes de laïcité, de neutralité et de non-discrimination envers les femmes. Nos prestataires ont également reçu une lettre à ce sujet. Il s'agissait pour nous de réaffirmer la règle de manière claire et forte, afin que l'encadrement se sente soutenu. De même, nous avons intégré les questions touchant à la laïcité dans les plans de formation, avec pédagogie, car ces sujets sont complexes. Tout le monde n'est en effet pas spécialiste de l'application de la loi de 1905 dans une entreprise exerçant une mission de service public. Enfin, ce plan contient également un volet de sanctions. Cette politique est appliquée de manière systématique depuis le début de l'année 2016.

Après quatre ans, quels résultats avons-nous obtenus ? Nous les évaluons d'abord grâce à la perception que nous pouvons avoir de la situation en nous déplaçant dans les unités, dans les centres bus et en échangeant avec les directeurs de centres et les équipes encadrantes : nous n'entendons globalement pas parler de ce problème en particulier, mais bien plus des incivilités envers les conducteurs de bus, notamment des agressions.

Ensuite, nous suivons l'évolution des sanctions, une question que développera M. Harnois, en effectuant un recensement régulier des comportements non conformes à la laïcité. Les sanctions ont été nombreuses en 2016 et en 2017, avec cinq ou six licenciements dans l'année, puis elles ont diminué : deux licenciements en 2018 et un seul en 2019. Notre analyse est la suivante : nous avons montré que nous pouvions sanctionner pour ces raisons, et cela s'est su. Maintenant, les managers appliquent la consigne de la direction générale d'intervenir très tôt, dès qu'ils décèlent un comportement ou un événement anormal. Ils rappellent immédiatement à l'agent concerné les principes de laïcité et lui demandent de changer de comportement. Nous sommes toutefois modestes, nous ne prétendons pas avoir tout réglé, mais nous avons outillé les managers pour leur donner la possibilité de désamorcer rapidement les problèmes.

Des regards extérieurs ont conforté cette analyse. Nous avons ainsi confié au sociologue Alain Mergier le soin d'étudier quatre centres bus sous le prisme de l'évolution de la diversité, et il a pu démontrer que nos mesures avaient porté leurs fruits. En outre, le premier chapitre du livre intitulé Quand la religion s'invite dans l'entreprise de Denis Maillard, paru fin 2017, est consacré à la RATP. L'auteur le conclut ainsi : « Il n'y a pas d'islamisation de la RATP », malgré les très nombreux fantasmes à ce sujet. Ces deux auteurs constatent que les managers ont désormais l'intelligence de la situation.

Si, toutefois, un phénomène de radicalisation se produit, il est identifié, remarqué et signalé. Pourtant, la RATP est citée au moindre problème dans le pays, sur la base d'anecdotes antérieures à 2015. À cette époque, un manager qui reprenait quelqu'un sur cette base était critiqué, accusé d'islamophobie, voire de racisme, mais ensuite, face aux problèmes de sécurité qui se faisaient jour, l'unité s'est faite sur un constat commun, manifestée par le soutien des organisations syndicales au plan Travailler ensemble. Les problèmes qui ont pu se produire par le passé seraient aujourd'hui immédiatement identifiés et sanctionnés.

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