Intervention de Anne-Catherine Loisier

Commission des affaires économiques — Réunion du 4 juin 2020 à 15h00
Présentation des plans de relance dans les domaines de l'énergie de l'agriculture et des télécommunications du numérique et des postes par les pilotes en charge des cellules de veille de contrôle et d'anticipation des secteurs correspondants

Photo de Anne-Catherine LoisierAnne-Catherine Loisier :

Quelques mots maintenant sur le numérique, sujet très vaste et que nous n'avons pas la prétention d'épuiser en quelques minutes ! On l'a bien vu d'ailleurs avec le débat en séance publique à l'initiative de mon groupe politique qui s'est tenu le 27 mai dernier. Les sujets étaient nombreux, les réponses étaient décevantes, en l'absence du secrétaire d'État au numérique. Nous avons pu constater l'absence de vision globale du numérique au sein du Gouvernement.

Notre orientation est claire : il faut faire du numérique une priorité de la relance. Le confinement a confirmé que le numérique est un support incontournable et essentiel à la reconstruction de notre économie.

Nous avons organisé nos réflexions en trois grands axes : réseaux, usages, produits et services numériques. Nous y avons ajouté un volet régulation, tant les manques en la matière sont aujourd'hui criants et peuvent nuire au développement de champions numériques.

Le premier axe porte sur les réseaux. Notre orientation en la matière est la suivante : aller plus loin dans la couverture du territoire. Les réseaux sont l'infrastructure de base du numérique, ce qu'Al Gore appelait dans les années 1990, les « autoroutes de l'information ». Ils sont la condition sine qua non de la numérisation de nos territoires, de notre industrie, de nos commerces, de nos mairies, de nos écoles, de nos hôpitaux, et de l'ensemble des services essentiels. La crise a montré à quel point ces infrastructures sont vitales pour la continuité du pays, sa résilience et le rebond de notre vie économique et sociale.

Il y a eu deux sujets à traiter d'urgence : s'assurer que les réseaux tiennent face à l'accroissement continu des usages et éviter un effondrement de la filière industrielle qui remettrait en cause les capacités de déploiement des infrastructures.

Afin de s'assurer que les réseaux ne risquaient pas une saturation globale, le Gouvernement a mis en place un suivi de la capacité des réseaux en lien avec l'Arcep et les opérateurs. Mais une telle entreprise s'est effectuée dans l'urgence, sans cadre préétabli. C'est pourquoi il nous semble nécessaire, pour l'avenir, d'élaborer un plan de résilience des réseaux permettant de mieux anticiper les risques et ce sur l'ensemble du territoire.

S'agissant du soutien à la filière, qui avait réalisé la performance de déployer près de cinq millions de prises l'année dernière, l'arrêt de nombreux chantiers et le renchérissement des coûts risquent de mettre à terre les éléments les plus fragiles de la filière - les sous-traitants de deuxième et troisième rang. Certains grands opérateurs ont semble-t-il été solidaires. Pas tous. Nous estimons que, là où cela est nécessaire pour éviter un effondrement de la filière, une avance des fonds du plan France très haut débit devrait être envisagée - restera à déterminer les conditions de mise en oeuvre de ces avances, afin qu'il n'y ait pas de difficulté avec comptables publics locaux.

Mais au-delà de l'urgence, lors de cette crise, les inégalités de couverture ont constitué une double peine inacceptable pour les entreprises et nos concitoyens. Avec cette crise, la fracture numérique s'est muée en véritable gouffre. Je vous rappelle que 60 % des zones rurales ne sont pas couvertes en très haut débit fixe et 80 % en fibre optique jusqu'à l'abonné. En 2018, la France était le dernier pays de l'Union européenne en couverture en très haut débit fixe. Et il reste des milliers de zones à couvrir en très haut débit mobile.

Il est donc urgent d'aller plus loin sur la couverture numérique du territoire, pour assurer l'accès de nos concitoyens au numérique sur tout le territoire, mais également pour garantir l'égalité des chances économiques. Cela pourrait passer par une loi de programmation des infrastructures numériques, qui fixerait les objectifs à atteindre à moyen terme sur le fixe et le mobile et inscrirait une trajectoire financière. Le Gouvernement n'a pas de stratégie claire sur le fixe d'ici à 2025, et n'est pas prêt à mettre les moyens : nous l'avons constaté lors du débat sur la loi de finances 2020. Les collectivités estiment les besoins pour parvenir à une société du gigabit - l'objectif européen en 2025 - à 680 millions d'euros. Nous pensons que ce défi doit être relevé, d'autant plus suite à la période de confinement que nous avons connue. Sur le mobile, cette loi de programmation permettrait d'associer davantage le Parlement aux décisions prises. Bref, il faut sortir du flou et mettre les moyens une bonne fois pour toutes. Je salue ici les travaux d'Élisabeth Lamure sur l'accès des entreprises à la fibre optique, sujet crucial pour la compétitivité de nos territoires.

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