Intervention de Jean de L'Hermite

Commission d'enquête Pollution des sols — Réunion du 19 mai 2020 : 1ère réunion
Audition de Mm. Jean de l'Hermite directeur juridique et samuel dufay directeur environnement et de Mme Céline Leroux responsable juridique de la société eramet en téléconférence

Jean de L'Hermite, directeur juridique de la société Eramet :

Je vais me charger de l'introduction, avant de laisser la parole à mes collègues, qui pourront développer les points que vous avez mentionnés.

Je présenterai rapidement le groupe Eramet. Ce groupe a été créé par l'État, qui était au départ son unique actionnaire. Il a été créé dans les années 1970 et au début des années 1980 à partir de la Société Le Nickel (SLN). L'État y a ajouté des sociétés spécialisées dans la production d'aciers spéciaux, qui opéraient en France métropolitaine et en Suède.

Dans les années 1990, le groupe Eramet a été introduit en bourse, puis il a acquis le contrôle de la société Comilog, qui est aujourd'hui sa principale filiale. La société Comilog a été fondée au Gabon au début des années 1960 par d'autres investisseurs et a été acquise par Eramet en 1995. Comilog est l'un des principaux producteurs mondiaux de minerai de manganèse.

Dans le même temps, le groupe s'est développé dans la production des alliages de manganèse en Norvège, en France métropolitaine, aux États-Unis et en Chine. Eramet a franchi une troisième étape de son histoire en 1999, par l'apport des actifs de la famille Duval, c'est-à-dire pour l'essentiel de la société française Aubert & Duval, qui est un métallurgiste sans activité minière. Cette dernière est d'abord forge et matrice de pièces en métal utilisées pour la structure des avions, la fabrication de moteurs d'avion, de turbines terrestres, ainsi que pour les industries de la défense et du nucléaire. L'entrée de la famille Duval au capital d'Eramet en 1999 a entraîné la privatisation du groupe, l'État conservant toutefois une participation directe d'environ 30 % dans le capital, cédée pour une toute petite partie aux provinces de Nouvelle-Calédonie et pour 25 % à Areva.

En 2012, dans le contexte des difficultés traversées par Areva, l'État a racheté les 25 % du capital par l'intermédiaire du fonds stratégique d'investissement (FSI), qui est devenu Bpifrance, avant que cette participation ne soit finalement transférée directement en 2016 à l'agence des participations de l'État (APE).

En conclusion, Eramet est contrôlé à ce jour par un concert d'actionnaires, liés entre eux par un pacte. Ce concert est composé de la famille Duval, qui détient toujours 37 % du capital, et de l'État, qui en détient 25 % et qui est représenté par l'APE. Le troisième actionnaire d'Eramet est la Société territoriale calédonienne de participation industrielle, société à 100 % publique appartenant aux trois provinces de Nouvelle-Calédonie. Le reste de l'actionnariat du groupe, dit « flottant », est détenu par des investisseurs boursiers. La société est cotée à Paris et fait partie du SBF 120. Les autorités publiques locales sont actionnaires minoritaires des principales filiales minières du groupe : l'État gabonais, les provinces calédoniennes pour la SLN et l'État sénégalais, dont la filiale Grande Côte Opération (GCO) extrait des sables minéralisés au nord de Dakar.

Le groupe compte aujourd'hui environ 12 000 salariés. Il a réalisé un chiffre d'affaires de 3,6 milliards d'euros en 2019. C'est d'abord un groupe métallurgique et minoritairement minier. Il compte deux divisions.

Premièrement, la division Alliages Haute Performance, située principalement en France métropolitaine et un peu en Suède, est composée d'Aubert & Duval, qui fournit majoritairement l'aéronautique en pièces métalliques. Elle réalise un chiffre d'affaires de 847 millions d'euros. Cette division n'a aucune activité minière.

Deuxièmement, la division Mines et Métaux, dont les implantations principales sont au Gabon, en Nouvelle-Calédonie, au Sénégal, en Indonésie et en Argentine. Cette division a pour principales activités l'extraction et la transformation métallurgique sous forme d'alliages, qui sont ensuite vendus à d'autres métallurgistes, qu'il s'agisse de minerais de manganèse, de nickel, de dioxyde de titane ou de zircon. Elle réalise un chiffre d'affaires de 2,8 milliards d'euros. Le groupe a également un projet d'extraction et de transformation de lithium dans le nord de l'Argentine, actuellement au stade d'usine pilote et temporairement arrêté en raison de la conjoncture mondiale peu favorable.

En termes de taille, Eramet est un petit acteur du secteur des matières premières et de la métallurgie. Ses 12 000 salariés, dont seulement une minorité sont directement employés à une activité minière, sont peu nombreux en comparaison des grands acteurs mondiaux que sont le brésilien Vale, avec ses 134 000 salariés et un peu plus de 37 milliards de dollars de chiffre d'affaires, BHP ou Rio Tinto, tous deux employant un peu moins de 50 000 personnes et réalisant un chiffre d'affaires de plus de 40 milliards de dollars chacun.

Cela me conduit à formuler quelques observations importantes à la lecture des questions que vous avez bien voulu nous adresser avant cette réunion.

J'insiste sur le fait que le groupe Eramet n'exerce aucune activité minière en France métropolitaine où ses implantations industrielles sont essentiellement des forges et des usines de matriçage de la division Alliages Haute Performance, situées en Auvergne et dans les départements de l'Ariège, de la Loire, de la Nièvre et de l'Allier. Il existe également une usine d'alliage de manganèse à Dunkerque et une usine de production de sel de nickel à Sandouville, près du Havre. Il y a enfin un centre de recherche à Trappes.

L'ensemble de ces usines métropolitaines relève de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Concernant les pollutions des sites industriels, qui sont parfois mises au jour à la cessation d'activité partielle ou totale des installations, nous mettons en place les mesures requises par la réglementation nationale.

Les usines métallurgiques du groupe situées hors de France métropolitaine qui sont nombreuses, à commencer par celle de Nouméa, relèvent de la réglementation applicable localement, qui est plus ou moins inspirée de celle que nous connaissons en métropole. S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, ce n'est pas l'État qui exerce la compétence en matière environnementale, ce sont les provinces.

Les mines du groupe Eramet se situent soit en Nouvelle-Calédonie, soit à l'étranger dans un petit nombre de pays : le Gabon, le Sénégal et l'Indonésie - sans doute demain aussi en Argentine. Certaines des mines du groupe ont plus d'un siècle d'existence, par exemple en Nouvelle-Calédonie. Elles héritent, encore aujourd'hui, des problématiques de leur exploitation passée. Dans tous les cas, aucune des mines aujourd'hui exploitées par les sociétés du groupe n'utilise de substances polluantes ou dangereuses, que ce soit pour l'activité d'extraction - qui s'opère toujours à ciel ouvert - ou pour la concentration du minerai dans des laveries. De même, les gisements que nous exploitons ne contiennent pas de substances polluantes ou dangereuses.

Un autre point de clarification préalable doit être fait entre la notion de réhabilitation minière et celle de réhabilitation des sites industriels. Car la nature et l'impact de l'activité minière sont très différents de ceux de l'activité de transformation métallurgique que nous exerçons. L'activité minière consiste pour l'essentiel à détruire la ressource extraite non reproductible, qui est définitivement sortie du gisement. L'objectif de la réhabilitation minière consiste donc à réorganiser dans toute la mesure du possible le site de production de façon à limiter l'érosion, de rétablir le paysage et la biodiversité : réaménagement paysager, revégétalisation, refonctionnalisation des sols quand c'est possible. La réhabilitation des sites industriels est un autre processus, plus classique et plus connu, qui consiste à réaliser l'ensemble des opérations, études et travaux pour éliminer ou maîtriser les sources de pollution. Chacun de ces sujets relève d'obligations réglementaires et de contrôles de natures très différentes, quel que soit le pays d'implantation.

Sur la gestion de tous nos sites, nous exerçons une surveillance étroite et quotidienne, et nous essayons d'agir avec diligence en cas de risque, en lien permanent avec les autorités publiques compétentes.

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