S'agissant du fret ferroviaire, il convient de distinguer le sujet des investissements d'une part et celui des pistes d'amélioration de la qualité du service pour le fret d'autre part.
Pour ce qui est des investissements, de lourdes opérations de régénération sont en cours sur les axes structurants du réseau. Ces investissements sont programmés sur plusieurs années et servent tant les intérêts des clients du fret que ceux du transport de voyageurs. Ces propositions, qui émergent de la demande de relance du fret ferroviaire, sont avant tout des accélérations de projets d'investissement déjà identifiés.
Le point critique réside dans le financement, comme souvent avec le ferroviaire malheureusement. Ces investissements sont suspendus à des ressources financières, aux travaux, sous réserve qu'ils ne réduisent pas la capacité commerciale revendiquée par d'autres clients. Ils nécessitent également un financement spécifique qu'on ne peut malheureusement pas assumer compte tenu de la situation de SNCF Réseau.
L'espoir reste de pouvoir inscrire une partie de cette démarche dans le cadre d'un plan de soutien ou de relance post Covid-19. Des discussions ont été lancées en ce sens avec l'État.
Plusieurs pistes d'amélioration de la qualité du service sont déjà mises en oeuvre ou explorées en matière de fret, comme la généralisation à l'ensemble des grands axes de fret d'une planification à cinq ans de la répartition de la capacité pour répondre aux besoins du fret.
Aujourd'hui, tous les interlocuteurs du fret raisonnent non seulement en termes d'investissement, mais aussi en termes de qualité du sillon.
Un autre exemple réside dans la mise en oeuvre de mesures qui visent à préserver autant que possible cette capacité jusqu'au jour de la circulation et à évoluer vers un système de réservation de la capacité qui puisse assurer une disponibilité pour des commandes de fret tardives, la gestion de l'infrastructure en Europe étant organisée selon une périodicité planifiée un an à un an et demi à l'avance.
Il faut aussi évoluer vers un système qui offre aux clients du fret la possibilité de réserver une forme de capacité pluriannuelle, simplifier la procédure d'autorisation de transport exceptionnel, voire réduire les cas de figure concernés par ces autorisations - des démarches sont en cours -, ou la fréquence de situations dans lesquelles deux branches d'un itinéraire alternatif sont indispensables pour des circulations commerciales. Je pense aussi à des investissements pour poursuivre la digitalisation des outils de gestion, de la capacité et de l'exploitation. De nouvelles applications sont en voie d'implémentation.
Concernant la question de l'articulation des contrats de performance, je dois confesser que nous avons pris un sérieux retard par rapport au calendrier initial, étant donné la crise liée à la pandémie de Covid-19. Fin février, début mars, nous étions animés par l'espoir de pouvoir signer ces contrats de performance fin avril ou début mai au plus tard. Les dix à onze dernières semaines ont été essentiellement consacrées à la gestion de la crise.
Nous devons à présent arrêter les compteurs de la nouvelle situation financière - ce qui n'est d'ailleurs pas encore fait à l'heure où je vous parle. SNCF Réseau, qui s'inscrit dans une logique de groupe et de consolidation, est un contributeur important aux finances du groupe SNCF. Nous sommes en train de finaliser la situation post Covid-19 afin d'entrer en discussion avec les différents ministères concernés à propos de cette nouvelle situation financière, et de déterminer comment parvenir à un équilibre ambitieux mais réalisable.
En matière de contrats de performance, nous sommes donc, du fait de la crise, plutôt au tout début des discussions.
Les lignes de desserte fine du territoire constituent un sujet très difficile. Plusieurs milliers de kilomètres tombent dans les catégories UIC 7 à 9, qui sont les lignes les moins parcourues du pays. Je suis très conscient que c'est un sujet que votre commission suit de près.
L'ambition de SNCF Réseau est que la totalité du réseau, soit les 33 900 kilomètres de lignes, puisse être parfaitement opérable et à un niveau de qualité acceptable pour la clientèle. Un certain nombre d'initiatives particulières ont été prises par le ministre des transports. Nous étudions pour l'instant avec le ministère comment mettre tout cela en oeuvre dans le nouveau contexte, sachant que si l'on souhaite maintenir les 33 900 kilomètres de lignes, qui représentent près de 50 000 kilomètres de voies dans le pays, il faudra immanquablement se reposer la question du financement.
Votre quatrième question concernait la lettre de la présidente Pécresse au sujet du CDG Express. Ma réponse sera légaliste : ce projet a été décidé. Nous avons une convention avec l'État à ce sujet. SNCF Réseau souhaite remplir ses engagements contractuels. Il n'y a pas lieu de modifier quoi que ce soit. Il existe une convention. Chacun sait ce qu'il a à faire et dans quel délai. SNCF Réseau souhaite exécuter intégralement la convention qui a été signée.
Monsieur Vaspart, nous sommes pleinement conscients de la question que soulève l'intermodalité. Bien sûr, assurer la mobilité dans l'hinterland par rapport aux grands ports est une question fondamentale pour le ferroviaire. Vous avez évoqué l'importance de l'acheminement des céréales au départ des capillaires. J'en suis pleinement conscient. J'ai eu l'occasion de me rendre compte à quel point ce que vous venez d'exposer est une réalité fondamentale du réseau français. Nous avons tenu des comités exécutifs tous les jours pendant la crise liée à la pandémie de Covid-19. La préoccupation de l'alimentation par les capillaires du réseau principal pour le transport de céréales est revenue très régulièrement. Nous y sommes très attentifs.
Cela ne signifie pas que nous ne rencontrerons pas de difficultés opérationnelles mais, en dix semaines, nous avons eu des retours plus qu'encourageants et même des félicitations de la part des intervenants du circuit concernant les efforts qui ont été faits sur les réseaux français pour pouvoir acheminer ces transports céréaliers.
Madame Filleul, votre question portait notamment sur l'application du suivi numérique. J'estime le numérique et la digitalisation de l'entreprise incroyablement importants. J'ai mené de très nombreux projets dans le numérique pour le gestionnaire des infrastructures ferroviaires belges. Je souhaite engager la même dynamique pour SNCF Réseau, mais cette numérisation n'a pas attendu mon arrivée. Un certain nombre de projets sont en cours, comme le Système industriel de production horaire (SIPH), notamment en matière de gestion numérique et digitalisée des sillons. Je souhaite encore intensifier la stratégie numérique : les efforts en cours vont redoubler au cours des prochaines années.
Plus globalement, je pense que les transports en commun en général - et donc le ferroviaire en particulier - ont un très grand intérêt stratégique à devenir le fer de lance des technologies numériques, car celles-ci, qu'on soit en B2C ou B2B, permettent de mieux utiliser le produit en rentabilisant le temps que le client passe à bord. Pour le fret, le fait de numériser tous nos produits offre à notre clientèle des gains de productivité et simplifie l'accès au produit ferroviaire qui, j'en conviens, n'est pas toujours des plus simples à vendre.