S'il y a autant d'institutions qui se penchent sur la question des concessions autoroutières, c'est qu'il s'agit d'un sujet global, technique, politique et économique. J'ai du mal à voir ce que l'Autorité de la concurrence aurait pu faire de plus, tout en restant dans le rôle qui est le sien. L'Autorité de la concurrence n'est pas une instance de contrôle politique, ce n'est pas le Conseil d'État ni la Cour des comptes, ce n'est pas non plus l'inspection générale des finances. Il y a des chevauchements entre tout ce que ces institutions peuvent faire, et il y a des points communs entre toutes, mais les champs de compétences sont tout de même différents. Je me souviens très bien de ce qui était pour nous une ligne rouge. Nous n'étions pas mandatés - et même si nous l'avions été nous aurions sans doute dû décliner - pour arbitrer sur le futur des concessions. Nous avions le sentiment que tout autre type de réponse que celles que nous avons faites nous aurait amené à répondre à cette question qui n'était pas légitime. Institutionnellement, une des missions essentielles de l'Autorité de la concurrence est de répondre aux questions qu'on lui soumet. Nous avons certes la possibilité de nous autosaisir : l'Autorité de la concurrence s'était autosaisie de la question des autocars et avait creusé la question. Mais prendre prétexte d'un avis pour faire autre chose est un positionnement compliqué, d'autant plus que nous aurions un doute sur notre compétence sur le sujet. Dans notre domaine contentieux, par exemple sur les abus de position dominante, nous savons ce que nous faisons. C'est la même chose pour le contrôle des concentrations : nous avons un domaine de compétence. Dans un avis, nous ne traitons pas les questions de concurrence pure : nous nous demandons donc toujours où arrêter notre analyse. Sur un marché ou sur une problématique économique, on pourrait considérer que la concurrence est partout. Mais nous n'avons pas les ressources pour élargir le sujet dès qu'on nous pose une question, vu le nombre de questions dont est saisie l'Autorité de la concurrence. Si nous le faisions, nous aurions moins de légitimité pour réclamer des moyens pour exercer notre coeur de métier. C'est une vision de l'institution qui est très personnelle. Cela confirme ce que je vous indiquais : si on veut que je réponde à une question, il faut me la poser, puis que j'explique si je suis ou non capable d'y répondre en termes de compétences, de ressources et de légitimité.