Intervention de Annie Guillemot

Commission des affaires économiques — Réunion du 17 juin 2020 à 9h35
Présentation des plans de relance dans les domaines des pme du commerce et de l'artisanat du logement de l'urbanisme et de la politique de la ville par les pilotes en charge des cellules de veille de contrôle et d'anticipation des secteurs correspondants

Photo de Annie GuillemotAnnie Guillemot :

Le troisième axe que nous vous proposons est : « sécuriser l'accès au logement ». La crise sanitaire a souligné combien le logement était, d'une certaine manière, un bien de première nécessité. Il nous faut donc travailler à sécuriser le fait d'accéder au logement et d'y demeurer. Préservons également la mobilité et le parcours résidentiel des ménages.

Pour certains, réduits aux hébergements d'urgence et aux hôtels, c'est le parcours vers le logement qu'il faut conforter. L'ensemble des associations considère comme une priorité l'accélération de la politique dite du « logement d'abord » et l'accompagnement social vers et dans le logement. Beaucoup a été fait ces dernières années, mais les quelque 180 000 personnes hébergées durant la crise disent le besoin criant de développer des solutions stables. La crise a aussi montré le besoin de solutions sanitaires pérennes, telles que les centres de desserrement mis en place pour les malades du coronavirus et d'équipes mobiles médico-sociales.

Cette politique doit s'accompagner d'une restructuration des hébergements collectifs ou en foyer pour les rendre résilients à de futures épidémies et fournir un logement plus digne. Mais cela ne doit pas se faire au détriment du nombre de places. L'effort financier est donc très important. Aujourd'hui, par exemple, 142 foyers de travailleurs migrants sont encore à rénover. Avant la crise, l'ambition était d'y parvenir en 2030... Comme le montre CDC Habitat, c'est un programme beaucoup plus ambitieux qu'il faut aujourd'hui mettre en oeuvre en termes de rénovation et d'achats d'hôtels. Le contexte actuel est peut-être une opportunité pour acquérir des infrastructures. Il convient aussi de s'appuyer sur un vrai savoir-faire financier pour mobiliser des fonds sur le long terme et équilibrer les opérations.

Il convient également de garantir le maintien dans le logement. La crise sociale fait craindre des impayés de loyer qui conduiraient à des expulsions. Cette crainte ne s'est pas pour le moment réalisée. Un moratoire des loyers a été écarté, les capacités financières des locataires ont été soutenues par l'activité partielle et des aides d'urgence. Un accompagnement au cas par cas est mis en place. Certains départements ou métropoles ont doté leur FSL de moyens supplémentaires. Dans ces conditions, on peut comprendre la réticence financière et technique du Gouvernement à venir abonder les FSL à hauteur de 200 millions d'euros comme la Fondation Abbé Pierre le demande. Mais trop tarder c'est prendre le risque de la constitution de situation d'impayés et de ne pas disposer de l'outil le moment venu. La circulaire aux préfets, que vient de signer Julien Denormandie, ne suffira pas ! La revalorisation des APL doit être mise à l'ordre du jour.

Enfin, l'accès au logement, c'est pour ceux qui en ont les moyens dans leur parcours résidentiel, l'accession à la propriété. Plusieurs de nos interlocuteurs ont souligné que c'était un axe essentiel du plan de relance de 2008. Il faut soutenir les primo-accédants. À cette fin, nous proposons la relance de l'APL-Accession en métropole et du prêt à taux zéro, le développement des Offices fonciers solidaires (OFS) et la généralisation des « chartes promoteurs » pour réguler les prix du foncier et des logements.

Enfin, nous estimons qu'il faut relancer la politique de la ville dans deux dimensions principales : l'urbanisme et l'école.

Nous l'avons dit, le confinement a fait revenir sur le devant de la scène la question de l'urbanisme dans les quartiers. En 2008, un grand programme partenarial : État/ANRU/collectivités territoriales avait été mis en place avec des possibilités de déroger à certaines règles de marché public. On nous dit que l'ANRU a été relancée mais elle n'est pas encore arrivée sur le terrain... Nous ne comprenons pas pourquoi l'ANRU reste si discrète alors que la situation est si préoccupante. Elle parle technique administrative et financière à un petit cercle de spécialistes là où elle devrait être le bras armé de la reconquête de quartiers en sécession !

Mais la politique de la ville, ce n'est pas que du béton, on l'a suffisamment reproché, à tort, à Jean-Louis Borloo. C'est une politique de société. Ne retenons ici que la question de l'école. Nous nous étions félicitées de la volonté de les rouvrir au plus vite dans les quartiers populaires. Force est de constater que les conditions dans lesquelles cette reprise s'est réalisée n'a pas tenu ses promesses. Un enfant sur dix des quartiers a été scolarisé. S'il est difficile de tirer un bilan dès maintenant, retenons que pour organiser les « vacances apprenantes », il va falloir changer de méthode et de braquet. Dès maintenant, nous demandons une vraie concertation et un vrai soutien financier aux maires pour l'accueil des enfants dans les écoles. Par ailleurs, il nous semble essentiel de mobiliser les jeunes, notamment les étudiants qui vont se retrouver sans ressources faute de job d'été, via des contrats aidés, pour être les tuteurs des décrocheurs en matière d'enseignement à distance et de remise à niveau scolaire. Ce dispositif permettra de redonner de l'espoir. De plus, si l'épidémie reprend en octobre et que les écoles ferment de nouveau, le risque est grand que le nombre de décrocheurs se multiplie.

Voilà, madame la Présidente, mes chers collègues, les idées directrices que nous tirons de nos quelque 40 auditions et les grandes orientations que nous souhaitons proposer et décliner, pour quelques-unes rapidement, mais pour l'essentiel dans la durée, le logement, répétons-le, étant un secteur de temps long.

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