Intervention de Jean-Jacques Lozach

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 17 juin 2020 : 1ère réunion
Conséquences de l'épidémie de covid-19 — Travaux du groupe de travail sur le secteur « sport » - communications

Photo de Jean-Jacques LozachJean-Jacques Lozach :

Je commencerai par le Pass Sport dont la proposition a déjà été transmise à la ministre des sports il y a plus d'un an maintenant et qui reste à ce jour sans réponse de sa part. Il reprend le modèle du Pass Culture avec une expérimentation sur un certain nombre de territoires mais reste indépendant de celui-ci. La période me semble propice à une relance de la réflexion.

Je partage l'avis de Jacques Grosperrin quant aux sports de combat, et je pense effectivement qu'il a été très déconcertant de constater à quel point les conditions sanitaires de la reprise variaient d'un pays à l'autre.

Pour objectiver les conséquences financières de la crise sanitaire sur le sport, je rappellerai que l'économie du sport dans notre pays, même si les estimations sont difficiles, représente entre 90 et 100 milliards d'euros, d'après des études réalisées en 1991 et en 1998 et prenant en compte toutes ses dimensions : sport amateur, professionnel et de haut niveau, les manifestations, le secteur commercial et toute la sphère associative. Aujourd'hui, la perte serait de l'ordre de 20 à 25 milliards d'euros, d'après la BPCE. L'impact s'avère donc très fort.

L'enjeu immédiat est la perte éventuelle de licenciés à la rentrée prochaine, avec la nécessité de maintenir en vie des milliers de clubs amateurs au bord de la disparition, et de maintenir aussi un niveau élevé de motivation de la part des bénévoles, problème souvent soulevé par les personnes auditionnées. N'oublions pas que cette crise a lieu à un moment particulier pour les petites associations qui organisent habituellement en mai ou juin des événements de nature à améliorer leurs recettes - kermesses, tournois, lotos, ...

Il est fondamental de permettre à ces clubs de proposer un accueil qui soit le plus pertinent dès septembre prochain. Cela rejoint la question des emplois sportifs qualifiés, la période de crise arrivant après une suppression très importante des emplois aidés, qui étaient souvent des emplois en phase de formation, en vue d'être qualifiés, et très souvent mutualisés.

Cette question des emplois aidés, qui renvoie au côté régalien du ministère des sports, doit absolument être privilégiée au cours des mois et années à venir. Beaucoup de nos interlocuteurs nous ont en effet dit que l'après Covid ne devait pas être simplement une reprise de l'avant Covid. Une prise de conscience de la nécessité de réorienter les priorités dans le domaine sportif s'avère indispensable et l'exemple type en est le sport santé. Celui-ci n'est pas seulement un sport sur ordonnance, suite à la loi Touraine de modernisation du système de santé. Or, seuls 10 millions d'euros y sont consacrés en France, en additionnant ministère des sports et ministère de la santé via les ARS. Cette loi, soyons clairs, n'est pas appliquée.

S'agissant les 2S2C, l'idée était de rapprocher l'école et les clubs, un fossé s'étant creusé entre le sport scolaire et le sport fédéral. Une volonté s'est concrétisée l'année dernière par le CNOSF, à travers une licence passerelle, prise en charge par le groupement sportif pour la rentrée de septembre et octobre prochains, afin de permettre à de jeunes élèves de tester leur volonté d'adhérer à différentes disciplines sportives. Or, le mouvement sportif s'est heurté à un silence complet du ministère de l'éducation nationale, qui n'a même pas accepté que l'information circule auprès des élèves et leurs parents. Le dispositif 2S2C permet de rétablir le contact et nous espérons qu'il se poursuive. Je conviens par contre que son application est très inégale d'un département à l'autre.

J'adhère également à ce sentiment de centralité qui a porté préjudice à l'efficacité des décisions publiques au début de la crise sanitaire.

En ce qui concerne les collectivités territoriales, certaines se sont engagées à maintenir leurs subventions en faveur des clubs mais cela méritera d'être vérifié lors de l'élaboration des budgets dans les semaines à venir.

Environ 40 % des personnes interrogées ont continué à pratiquer une activité physique pendant le confinement, et parmi elles 80 % souhaitent continuer et ce, plus seulement pour le dépassement de soi et la recherche de performances ; ce qui prédomine aujourd'hui ce sont le lien social, la santé, le bien-être et la convivialité. C'est pourquoi les clubs doivent se remettre en question pour répondre à ces nouvelles demandes sociales.

Pour exemple, un haut cadre technique a relativisé récemment l'importance des Jeux olympiques de 2024, et a affirmé, alors qu'il est très engagé dans leur préparation, que si l'on arrivait à développer le sport scolaire ou de santé dans notre pays, cela serait aussi important que les 30 ou 40 médailles escomptées. Ceci est révélateur d'une évolution de l'état d'esprit actuel au sortir de cette crise.

Je terminerai sur les moyens. Je suis convaincu que si l'on veut faire vivre l'héritage olympique, il va falloir augmenter d'au moins 100 millions par an le budget de l'ANS jusqu'en 2024. A défaut, on risque de passer à côté des ambitions affichées par l'État.

Le déplafonnement des taxes affectées - la « taxe Buffet », les paris sportifs en ligne et la Française des jeux - apparaît comme une des solutions car depuis 2017, la situation s'est totalement inversée. 77 % des taxes affectées étaient alors destinés au sport, aujourd'hui seuls 35 % reviennent au sport et 65 % à Bercy. Le taux de rendement de ces taxes affectées s'est donc dégradé et il apparaît nécessaire de débattre à nouveau sur ce déplafonnement.

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