Intervention de Marc Fesneau

Réunion du 23 juin 2020 à 14h30
Débat sur le bilan de l'application des lois — Débat interactif

Marc Fesneau :

Madame la sénatrice, je partage au moins deux points de votre intervention. Tout d’abord, la question de l’application de la loi n’est pas un sujet technique ; c’est une question politique ! Ensuite, nous devons effectivement être vigilants à ce que les lois ne soient pas trop bavardes – d’ailleurs, je sais que le Sénat est très attentif sur ce point.

S’agissant des délais pour prendre des mesures réglementaires, le taux d’application des lois est de 82 % selon la méthodologie gouvernementale. Il est vrai que ce taux a légèrement baissé par rapport à l’année précédente, mais je rappelle que le nombre des mesures a parallèlement augmenté de manière très importante. J’ajoute que, si les administrations ont été très sollicitées par la gestion opérationnelle de la crise, leurs efforts en matière d’application des lois ne se sont pas relâchés, puisque le taux que je viens d’évoquer a augmenté depuis le 31 mars.

Les délais nécessaires à la prise d’un décret ont plusieurs explications. Un certain nombre de consultations doit être mené, parfois à la demande du législateur, puis divers organismes doivent être saisis avant l’intervention du Conseil d’État. Ces consultations et les délais qui en découlent sont la contrepartie de la qualité et de la stabilité des textes réglementaires. Je précise également qu’il devient de plus en plus difficile d’anticiper en amont les actes réglementaires qui devront être pris ; à titre d’exemple, lors de la session 2018-2019, le nombre d’articles des textes de loi a augmenté de près de 135 % durant la navette parlementaire.

Pour autant, le taux d’application des propositions de loi n’est pas fondamentalement différent, à 2 % près, de celui des textes d’initiative gouvernementale.

Pour ce qui concerne le caractère éminemment technique des textes publiés, je ne peux que le regretter, y compris pour la lisibilité vis-à-vis des citoyens, mais je constate que le monde est devenu d’une incroyable complexité, et notre droit n’en est finalement que le reflet. Gardons-nous de penser que la simplification du droit est la solution à tout, même s’il doit rester intelligible. Nous pouvons sans doute faire plus simple, mais nous risquons alors une incompétence négative. Aurions-nous réglé toutes les situations particulières qui appellent une réponse législative ? Je n’en suis pas certain de prime abord.

Enfin, pour ce qui est de la « censure » du Parlement, je ne suis évidemment pas d’accord avec vous. L’application de la loi peut faire l’objet d’un contrôle par le juge administratif, lequel peut même engager la responsabilité de l’État pour absence de prise d’actes réglementaires d’application d’une loi. De plus, le Gouvernement est pleinement responsable devant le Parlement ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle je suis avec vous, cette année encore, pour débattre de l’application des lois.

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