Intervention de Razika Adnani

Commission d'enquête Combattre la radicalisation islamiste — Réunion du 28 mai 2020 à 11h00
Audition conjointe de mmes razika adnani experte membre du conseil d'administration de la fondation islam de france et djemila benhabib essayiste auteur de ma vie à contre-coran

Razika Adnani, experte, membre du conseil d'administration de la Fondation Islam de France :

Je pense que les élus doivent impérativement être conscients du problème, mais aussi avoir une connaissance parfaite de la doctrine islamiste, ses objectifs, et du double discours du néo-islamisme à l'égard des valeurs de la modernité, afin de pouvoir les comprendre et y faire face. Il ne s'agit pas d'une entrave à la laïcité, mais d'une façon de disposer des moyens nécessaires pour défendre la République. Il importe donc qu'une personne qui se lance dans la politique en France connaisse très bien ce sujet.

Concernant votre question sur l'islam « de France » et « en France », lorsqu'Emmanuel Macron a parlé, en 2018, de la réforme de l'islam de France, j'ai réagi dans un article publié dans Le Figaro où j'ai demandé s'il s'agissait de réformer l'islam de France ou l'islam. À mon sens, l'islam de France est celui qui existe en France sur le plan géographique. Je suis contre l'idée d'un islam républicain, en France, comme certains l'ont pensé, alors qu'il resterait intact en Algérie ou en Tunisie. C'est la raison pour laquelle j'affirme que la réforme de l'islam est nécessaire, même si certains estiment qu'elle ne pourra être conduite.

Au sujet de la langue arabe, l'islamisme et l'obscurantisme est davantage ancré dans la population arabophone qui lit et écrit en arabe. Beaucoup considèrent que cette langue est la langue de Dieu, qu'il s'agit donc de parler pour s'inscrire dans cette tradition de l'islam. La langue arabe est une belle langue, qui n'est pas exclusivement parlée par des musulmans ou des islamistes, mais ces derniers l'utilisent pour transmettre leurs idées et islamiser la société.

S'agissant des deux dimensions de l'islam, sociale et spirituelle, cette question a été posée vers le VIIIe siècle. Des philosophes souhaitaient alors que l'islam soit uniquement une spiritualité. Ils n'y sont pas parvenus. Ceux qui ont affirmé qu'il devait également être une organisation sociale et politique ont remporté cette bataille. Tout au long du XXe siècle, avec la laïcisation de la Turquie, cet islam, qui doit exister avec ces deux dimensions, a été au centre du discours répété, au point de mettre en place un nouveau concept : l'islam est une religion et un État. L'objectif est de conduire les musulmans à s'imprégner de l'idée selon laquelle l'islam ne peut exister sans sa dimension sociale et politique. Personnellement, j'estime que nous pouvons séparer la dimension sociale de la dimension spirituelle. Il est nécessaire que nous allions vers cette réforme de l'islam, quelles qu'en soient les difficultés. Nous n'avons pas d'autre choix si nous souhaitons vivre dans une société que nous partageons tous, en bonne entente et avec sérénité. Personne ne peut imposer ses lois dans l'espace public.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion