Intervention de Christophe Blanchet

Commission mixte paritaire — Réunion du 2 juillet 2020 à 9h00
Commission mixte paritaire sur le projet de loi permettant d'offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l'épidémie de covid-19

Christophe Blanchet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale :

Je suis ravi que nous nous retrouvions ce matin - c'est ma première CMP ! - autour d'un texte que j'ai porté à l'Assemblée nationale avec plusieurs collègues de la majorité.

Ce texte est né d'une idée simple : permettre aux Français qui applaudissaient les soignants pendant le confinement de donner des jours de repos. Elle est le fruit d'une initiative citoyenne, celle du groupe Pasteur Mutualité, qui a sans doute été inspirée par les dispositifs existants de dons de jours de repos entre les salariés d'une même entreprise au bénéfice d'un proche aidant ou d'un parent d'enfant malade.

Cette proposition de loi vise ainsi à lever un obstacle législatif et à permettre une nouvelle forme de solidarité. Elle est aussi le reflet d'un élan transpartisan : d'autres propositions de loi, issues des rangs des Républicains, par les voix de Maxime Minot, à l'Assemblée nationale, et d'Édouard Courtial, au Sénat, ou des rangs socialistes, par le biais de Christophe Bouillon, allaient dans le même sens, sans pour autant être identiques.

En offrant des chèques-vacances aux soignants, nous leur permettons de profiter davantage de leur temps libre et de s'offrir des loisirs supplémentaires dans l'une des 200 000 structures en France qui acceptent les chèques-vacances, qu'il s'agisse de restaurants, de lieux d'hébergement, de théâtres, de parcs d'attraction, de musées, etc.

L'examen à l'Assemblée nationale a permis de préciser le dispositif sur un certain nombre de points. Il a ainsi été décidé de limiter le périmètre des bénéficiaires des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social dont les revenus n'excèdent pas 3 SMIC ; de permettre aux entreprises d'abonder les dons de leurs employés ; de mettre en place un compte, géré par l'ANCV, pour lui permettre de récolter des dons financiers de personnes physiques et morales.

Ce texte était toutefois loin d'être parfait. Et pour cause : l'Assemblée nationale n'a eu que très peu de temps pour l'examiner. La décision du Gouvernement d'inscrire rapidement ce texte à l'ordre du jour de ses travaux se comprend néanmoins : il fallait que le dispositif entre en vigueur avant que l'élan de solidarité de Français envers les soignants ne s'estompe.

J'ai bien entendu les critiques que le Sénat a émises lors de l'examen du texte, mais vous avez décidé de jouer le jeu et de porter la proposition de loi tout en développant une approche différente. Vous avez proposé non pas des dons de jours de repos, mais des dons de journées de travail sur le modèle de la Journée de solidarité afin de permettre à tous les salariés de pouvoir faire un don en autorisant leur employeur à prélever une partie de leur salaire au profit des soignants.

Je ne reviendrai pas sur toutes les précisions qui ont été apportées par le Sénat. J'ai toutefois relevé que vous avez délimité dans le temps la période durant laquelle les personnels devront avoir travaillé pour bénéficier des chèques-vacances - entre le 12 mars et le 10 mai, c'est-à-dire la période du confinement. Vous avez également fixé une date-butoir avant laquelle les chèques-vacances devront avoir été distribués, en l'occurrence le 31 décembre 2020. Cette échéance me paraît tout à fait adaptée et permettra la distribution des chèques-vacances pour les fêtes de fin d'année.

Un certain nombre de points du texte adopté par le Sénat méritent toutefois d'être précisés ou modifiés.

Tout d'abord, je tiens à souligner que les deux approches du don au profit des soignants, que ce soit au titre d'une journée de travail ou d'un jour de repos, ne sont pas concurrentes ; elles sont au contraire complémentaires. C'est d'ailleurs tout le sens du texte que nous examinons aujourd'hui : il combine les dispositifs adoptés par l'Assemblée et le Sénat.

S'il est adopté, un salarié pourra donc soit donner une partie de son salaire, notamment s'il ne dispose pas de jours de RTT ou s'il souhaite les garder pour lui, soit donner des jours de repos, qu'il a pu accumuler sur un compte épargne-temps par exemple, en accord avec son employeur. Ces jours de repos feront l'objet d'une monétisation, dont les modalités seront précisées par voie réglementaire.

Parmi les modifications proposées aujourd'hui figure également le report du 31 août au 31 octobre 2020 de la date limite pour effectuer un don. Ce délai me semble raisonnable : il n'est ni trop court, ni trop long.

Afin de mettre rapidement en oeuvre ces mécanismes de don, il est proposé d'en renvoyer les modalités d'application à un décret simple au lieu d'un décret en Conseil d'État, dont la parution prendrait nécessairement plus de temps.

Il est également proposé de préciser que l'acquisition de chèques-vacances au titre de ce dispositif est exonérée de l'impôt sur le revenu. Le Gouvernement avait exprimé son intention de garantir une telle exonération lors de l'examen par l'Assemblée nationale en réponse à une intervention d'Agnès Firmin Le Bodo.

Enfin, je crois également utile de demander au Gouvernement un rapport, d'ici au 31 mars prochain, pour pouvoir nous assurer de l'application du dispositif et retracer la distribution des chèques-vacances.

Pour terminer, je rappellerai, une fois de plus, que ce texte n'a pas vocation à répondre aux attentes de revalorisation salariale des personnels soignants et à se substituer aux mécanismes de solidarité nationale par l'impôt. Il revient au Ségur de la santé de le faire. Les premières annonces du ministre de la santé envoient déjà un signal fort : une enveloppe de 6 milliards d'euros sera ouverte pour revaloriser les salaires des personnels soignants des hôpitaux et des établissements pour personnes âgées.

Je vous invite donc à adopter le texte que nous vous proposons avec Frédérique Puissat, que je remercie pour la qualité de nos échanges.

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