Notre deuxième axe de recommandation concerne l'architecture institutionnelle de cette politique. Il y a nécessité de sortir des formes actuelles d'organisation conjoncturelle, qui reposent sur des coordinations d'acteurs de bonne volonté pour ancrer cette politique publique dans le dur. Le pilotage institutionnel est un impensé du Grenelle, en raison probablement des groupes de travail thématiques pilotés par les ministères, qui ont empêché cette vision transversale, pourtant nécessaire.
Cette refonte de l'architecture institutionnelle, doit d'abord passer, au niveau central, par un renforcement du pilotage interministériel et du suivi de cette politique.
Les moyens et le positionnement du SDFE et de la MIPROF doivent être revus en dotant cette politique publique d'une vraie administration centrale et interministérielle. Un de ces deux services pourrait prendre le titre de délégation interministérielle à la lutte contre les violences faites aux femmes, rattachée directement au Premier ministre.
Par ailleurs, le suivi de cette politique et du Grenelle, en particulier, doit être renforcé. Le suivi du Grenelle nécessiterait la mise en place d'un comité interministériel réunissant tous les ministres concernés, doublé d'un comité réunissant toutes les parties prenantes (y compris les associations et élus locaux), en pérennisant et institutionnalisant, par exemple, les groupes de travail du Grenelle.
Le Parlement et notamment le Sénat a un rôle clé à jouer dans le suivi et l'évaluation de cette politique publique. À cet égard, à l'image de ce travail de contrôle, il nous semble que les synergies entre les commissions et délégation du Sénat doivent être encouragées.
Au niveau local, la refonte de l'architecture institutionnelle doit passer par un renforcement de la coordination des acteurs et du pilotage départemental.
Il faut que les bonnes pratiques d'un territoire dues aux initiatives d'un réseau d'acteurs deviennent pérennes et puissent se retrouver sur tout le territoire. Le guide des bonnes pratiques géré par la MIPROF doit être enrichi.
Le pilotage départemental doit ainsi être renforcé et homogénéisé sur le territoire, en veillant à la mise en oeuvre de la déclinaison locale de cette politique publique et notamment du Grenelle sur tout le territoire. Cette exécution locale peut passer par des outils déjà existants ou par la ré-instauration d'une commission départementale de lutte contre les violences et de la prostitution. Le but est d'avoir, sur chaque territoire, une structure dédiée aux violences faites aux femmes et identifiée par les acteurs, qui institutionnalise ce travail partenarial entre forces de sécurité, de justice, de santé, associations... et qui se réunisse régulièrement.
L'important est de « laisser faire ce qui se fait sur les territoires, des choses formidables s'y passent », comme a pu nous dire la secrétaire générale de la MIPROF, mais nous y ajouterions, tout en veillant à ce que l'État ne se désengage pas de cette politique publique essentielle.