L'Arcep n'est pas volontariste concernant le lancement de la 5G. Nous avons effectivement voulu faire notre mue par rapport à cette technologie. Je reconnais que ces dernières années, nous avons été partie prenante d'un « techno-enthousiasme ». Depuis le début de l'année, compte tenu des appréhensions dans la population, nous avons souhaité adopter une posture de neutralité.
Pourquoi ce calendrier ? Parce que la 5G est un projet industriel, porté par des opérateurs qui déploient des infrastructures et qui, ensuite, les commercialisent. Notre rôle en tant que régulateur de ce marché est de permettre que les opérateurs puissent porter des projets industriels dans une logique de développement économique et d'apporter à nos concitoyens les technologies que les opérateurs privés trouvent pertinentes. C'est la dynamique dans laquelle se situe l'Arcep par rapport à la 5G.
Dans le cadre d'un plan national défini en juillet 2018 avec le Gouvernement, nous avons défini un calendrier pour lancer les enchères au mois d'avril. Cela n'a pas pu être possible pour des raisons techniques. Ce décalage nous amène à organiser les enchères entre le 20 et le 30 septembre.
Toutefois, lorsque j'ai été auditionné au mois de janvier 2015, devant vous, et à l'Assemblée Nationale pour ma nomination, j'ai toujours dit que l'Arcep serait à l'écoute des priorités de la Nation. Nous sommes une autorité indépendante, nous prenons nos décisions en indépendance, mais c'est le pouvoir politique qui, de manière ultime, peut traduire les priorités nationales. J'ai donc souhaité, pour ce recalage du calendrier de la 5G, être à l'écoute du gouvernement. Si le gouvernement nous avait dit, pour des raisons de priorités nationales, qu'il fallait changer le calendrier de la 5G, nous l'aurions fait. Si le Gouvernement change d'avis, nous le ferons. Nous définissons un calendrier par rapport à des opportunités industrielles des opérateurs qui nous paraissent pertinentes. Si, pour des raisons politiques, il y a des orientations différentes qui sont prises, nous nous y plierons. Depuis le début, j'ai à coeur d'être à l'écoute de ces priorités.
Concernant les usages, un sujet récurrent revient souvent : il s'agit de l'utilité de la 5G. Pour rappel, lorsque la 4G est arrivée, nous avons entendu les mêmes discours. Il en était de même pour la 3G. En général, nous ne savons pas à quoi vont servir les technologies au moment où elles se déploient. Il en était de même à l'arrivée de l'ADSL. Nous nous rappellerons également que l'usage du téléphone était au départ le théâtrophone. En effet, le téléphone avait été imaginé pour écouter des pièces de théâtre à distance. C'est le seul usage qui avait été imaginé.
Quand on parle de technologies de communication, ce sont les usages de la société qui s'approprient ces technologies. La technologie ne fait qu'apporter des opportunités. En l'occurrence, la 5G amène des opportunités nouvelles, car elle va permettre d'augmenter les capacités, d'améliorer la rapidité des échanges, de réduire la latence, de démultiplier les échanges par rapport à des communications, non seulement entre des personnes et des ordinateurs, mais aussi demain avec des capteurs et des censeurs, avec l'Internet des objets.
À quoi la 5G servira-t-elle ? Mesdames et Messieurs, je n'en sais rien, car c'est la société qui va décider de son utilité. Quelle que soit la révolution technologique, nous sommes toujours confrontés au fait qu'à l'instant T, nous ne sommes pas forcément convaincus du besoin des nouvelles technologies. Toutefois, lorsque la technologie est installée, la société se l'approprie.
Concernant la théorie du complot, je crois que nous sommes arrivés à un moment où la technologie occupe une place très importante dans nos vies et où la question de l'appropriation de ces technologies devient un enjeu important. Sur la 5G, ce dont nous avons manqué, c'est de pouvoir l'expliquer et la partager. Les pouvoirs publics ne doivent pas toujours être dans une logique de pédagogie. Il y a un enjeu d'appropriation et de partage. Il faudrait que les citoyens puissent s'approprier ces technologies pour qu'ils comprennent qu'il ne s'agit pas d'un plan d'un État ou d'un grand opérateur privé, mais juste d'apporter une technologie qui sera utile.