Cette crise a porté un coup d'arrêt à la dynamique touristique à Mayotte. En 2019, nous avons bénéficié d'une augmentation de la fréquentation touristique de 16 %, après une baisse de 9 % en 2018. Nous pensions ainsi nous diriger vers une excellente année en 2020.
Nous sommes régulièrement confrontés à une crise sociale. Tous les deux ans, nous connaissons en effet des mouvements sociaux qui portent un coup d'arrêt à la dynamique touristique. Ceux-ci nous permettent de relativiser la situation. Nous sommes toujours en état de confinement, bien que des allègements aient été permis par la préfecture. Nous restons classés en zone orange, avec des restrictions pour l'hôtellerie et la restauration qui impliquent une exploitation très limitée de leurs structures. D'autres activités ont eu l'autorisation de redémarrer, comme les activités nautiques et de plongée, qui bénéficient de surcroît d'un soutien très important de la part de la clientèle locale. Les signaux sont donc encourageants pour nous professionnels.
Par ailleurs, les acteurs touristiques estiment que l'adoption, le 17 juin, de l'amendement relatif à la prolongation de l'état d'urgence sanitaire jusqu'en octobre à Mayotte et en Guyane, pourrait se traduire par des conséquences encore plus désastreuses que celles que nous connaissons aujourd'hui. Il s'agit de s'assurer qu'un accompagnement sera mis en place, avec des mesures spécifiques personnalisées pour faire face à cette situation.
Concernant le premier programme de mesures d'aide du Gouvernement et les aides complémentaires du département de Mayotte, nous avons conduit une enquête. Sur les mois de mars à mai, 84 % des entreprises touristiques ont sollicité le fonds de solidarité de l'État, 77 % ont fait appel à l'activité partielle, 62 % aux aides complémentaires du département et 32 % au report d'échéance des cotisations sociales.
S'agissant de la suite de la saison touristique, à l'instar des autres départements, nous travaillons sur un plan de relance qui donne la priorité au tourisme intérieur. Il s'agit en effet d'inciter la population résidente à pratiquer les activités touristiques, en soutien aux opérateurs. Mayotte est par ailleurs une destination franco-française, avec 95 % de touristes en provenance de la métropole et de La Réunion (59 % en provenance de la métropole et 30 % de La Réunion). L'absence de touristes métropolitains et une activité aérienne en reprise progressive et conditionnelle nous conduisent à penser qu'une situation très compliquée se présente devant nous, nécessitant des décisions d'accompagnement sur mesure.
En ce qui concerne les conditions sanitaires, les vols commerciaux de la ligne Paris-Mayotte reprennent et vont monter en puissance dans les prochaines semaines. Aucune quatorzaine n'est prévue, ni à Mayotte ni à l'arrivée en métropole. Cela n'est pas le cas pour les vols commerciaux Mayotte-Réunion, pour lesquels nous ne savons pas si une telle quatorzaine sera exigée de la part de La Réunion. Il s'agit également d'une question d'image. En début de semaine, avec la prolongation de l'état d'urgence, et alors que La Réunion représente plus de 30 % de notre clientèle, nous avons vu sur des chaînes de télévision des Réunionnais exprimer leurs craintes quant à leur déplacement à Mayotte. Un plan de communication doit ainsi être élaboré en vue de rassurer les touristes, compte tenu des mesures et conditions sanitaires mises en place.
S'agissant de la préparation du modèle de tourisme ultramarin de demain, cette question est d'une importance capitale pour Mayotte, très jeune destination qui doit envisager son faible développement touristique actuel comme une opportunité, en prenant les bonnes décisions pour un tourisme durable. La crise du Covid-19 arrive à point nommé, puisque nous sommes en phase de finalisation du schéma régional de développement du tourisme. Ce document doit prendre en compte le nouveau modèle de tourisme à développer. Parmi les orientations identifiées dans ce document, il s'agit de considérer la concurrence régionale et ses atouts en jouant sur le registre qualitatif et exemplaire sur le champ environnemental et en misant fortement sur l'écotourisme de bon niveau et haut de gamme. Une deuxième orientation consiste à tirer parti de notre positionnement stratégique au coeur du canal du Mozambique pour nous rapprocher des pays de l'Afrique australe et proposer des produits d'exception et de sensation entre grands espaces terrestres côté africain et évasion dans le lagon de Mayotte. Enfin, il s'agit pour Mayotte et La Réunion de conforter notre participation dans la dynamique régionale en matière de tourisme en donnant beaucoup plus d'ampleur à l'organisation collective des « îles Vanille ». Ces orientations stratégiques nécessitent néanmoins des orientations et décisions politiques.