Intervention de Nicolas Vion

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 25 juin 2020 : 1ère réunion
Étude sur l'urgence économique outre-mer à la suite de la crise du covid-19 — Table ronde sur le tourisme

Nicolas Vion, président du groupement hôtelier et touristique de la Guadeloupe :

La crise de 2009 a eu des conséquences en termes de perte d'emplois et de fermeture d'entreprises. Il a fallu attendre huit ans à certaines entreprises, c'est-à-dire attendre 2016, avant de retrouver le chiffre d'affaires de 2008. 2020 sera bien pire que 2008. Si les entreprises ferment, inéluctablement des salariés seront au chômage et la pauvreté sera plus importante.

Mme Victoire Jasmin suggère de remplacer le tourisme international par le tourisme local. Le comité du tourisme de Guadeloupe est en train de préparer un plan en vue de booster le tourisme local mais rappelons qu'il y a 380 000 Guadeloupéens. Certes, ces offres pourront aussi concerner les habitants des îles voisines, mais l'ensemble sera bien moins important que les 2 millions de touristes qui passent par l'aéroport. De plus, la clientèle locale n'a pas le même pouvoir d'achat. L'idée que nous pourrions remplacer le tourisme international par le tourisme local est une idée séduisante mais je ne sais pas si elle est très réaliste.

Le tourisme en Guadeloupe rapporte 800 millions d'euros de chiffre d'affaires direct, sans comptabiliser les effets indirects du tourisme sur l'économie.

Je salue l'effort fourni par La Réunion pour financer 15 millions d'euros de chèques-vacances. La région PACA a investi, quant à elle, 10 millions d'euros et la région Nouvelle-Aquitaine 5 millions d'euros, alors que la Guadeloupe n'a rien investi pour favoriser le tourisme local.

Beaucoup d'interventions ont porté sur les aides à apporter aux territoires mais nous ne voulons pas d'aides. Rappelons que nos établissements étaient pleins en haute saison et qu'une décision administrative a conduit à fermer nos entreprises et nous a interdit de travailler. Devant un tel cas de figure, l'assurance devrait jouer pleinement son rôle, comme un automobiliste est indemnisé lorsqu'il percute un autre automobiliste après avoir fait un écart pour éviter de blesser un enfant qui traversait la chaussée imprudemment. Le préjudice que nous subissons aujourd'hui vient de la décision de l'État, qui est peut-être justifiée. Celui qui crée le préjudice doit indemniser. Si l'État estime qu'une part de responsabilité revient aux assurances, je suis prêt à lui déléguer ma police d'assurance. Cependant, je ne crois pas qu'il faille rechercher des responsabilités tous azimuts. Il y a un responsable qui a créé un préjudice et qui doit indemniser. C'est pour cela que je reviens vers la sémantique car ce n'est pas le terme « aide » qui doit être utilisé. Nous devons aujourd'hui supporter la taxe foncière, la taxe audiovisuelle, etc. alors que nos chambres sont vides. Nous ne demandons pas à gagner de l'argent mais nous demandons la sauvegarde de nos entreprises. Or si nous pourrons supporter une année de recettes nulles, nous ne pourrons pas survivre à une année de déficits. Le 10 mai, certains hôtels attendaient d'être remboursés du chômage partiel pour payer leurs salariés, c'est-à-dire que leur trésorerie est très limitée.

Mon propos peut vous paraître brutal mais nous devons sortir de l'incantation pour évoquer des questions précises. Dans ce contexte, nous attendons beaucoup du Sénat et de l'Assemblée nationale car des mesures économiques sont à prendre pour sauver les emplois mais aussi le pouvoir d'achat de la population. Or, pour que les entreprises survivent, il faudra que les charges soient allégées et cela ne peut passer que par la loi de finances rectificative.

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