Je vous remercie sincèrement, Monsieur le Président, de vous intéresser à ces questions si importantes pour notre petite île du Pacifique. Je vous prie de m'excuser par avance car je devrai m'absenter. Je tâcherai cependant de répondre à certaines de vos questions, Monsieur le Président. Je laisserai alors mes deux collaborateurs poursuivre la formulation de ces réponses sur la base de la trame qui nous a été remise.
Vous m'interrogez donc, Monsieur le Président, sur le fait de savoir si les PTOM, en général, et la Nouvelle-Calédonie, en particulier, sont réellement et qualitativement pris en considération par les autorités françaises et européennes. Depuis ma prise de fonction, j'ai eu l'occasion à deux reprises de me déplacer à Bruxelles pour rencontrer les représentants de l'UE, la première fois en octobre 2019 et la seconde il y a une quinzaine de jours. J'ai, à cette occasion, pu constater que la connaissance de notre territoire a progressé entre ma première et ma seconde visite. J'ai notamment pu relever que les demandes qui ont été formulées par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie auprès de l'Union européenne ont été en partie prises en considération, notamment sur notre souhait de travailler davantage en synergie avec les territoires français du Pacifique et les pays ACP qui les entourent. Nous avons notamment suggéré la mise en place d'instruments financiers nous permettant d'envisager la mise en oeuvre de programmes communs dans le Pacifique.
Dans les îles du Pacifique, nous partageons tous la même préoccupation à propos des effets du changement climatique. Certains petits États du Pacifique risquent de disparaître purement et simplement. Ce changement climatique a des impacts qui se font ressentir sur notre environnement, en général, et sur la biodiversité, en particulier, qui est exceptionnelle dans le Pacifique et que nous avons le souci de préserver. La Nouvelle-Calédonie se trouve dotée d'un parc naturel, le parc naturel de la mer de Corail. Il couvre une surface maritime considérable, surface qui correspond à celle de la zone économique exclusive de la Nouvelle-Calédonie. Cette zone représente 1,3 million de kilomètres carrés. Cette zone présente des atouts majeurs : elle intègre un tiers des récifs « pristine » du monde. Sur les sept hotspots mondiaux en termes de biomasse maritime, quatre d'entre eux font partie du parc naturel de la mer de Corail. Notre responsabilité internationale pour préserver ces espaces est grande. La demande qui a été exprimée par la Nouvelle-Calédonie l'année passée, visant à envisager la mise en oeuvre de programmes communs avec les pays ACP, a été entendue par l'UE. En effet, l'instrument financier qui est envisagé aujourd'hui intègre désormais une enveloppe interrégionale qui n'existait pas auparavant. En effet, nous avions des enveloppes territoriales dans le cadre des différents FED et des enveloppes régionales qui concernaient les trois PTOM français du Pacifique et les îles Pitcairn, le seul PTOM britannique de la région. Les pays ACP relevaient de l'accord post Cotonou. Cette enveloppe nouvelle devrait permettre la mise en oeuvre de programmes communs entre la Nouvelle-Calédonie et les pays ACP. Il convient donc que cette déclinaison des programmes interrégionaux existant à l'échelon des PTOM soit étendue aux pays ACP. Nous n'avons pas, à ce stade, d'assurances à ce sujet. En outre, il faut que les PTOM puissent aussi participer aux instances de discussion des pays ACP. Notre demande à ce sujet a été, semble-t-il, entendue puisqu'il est envisagé que les PTOM soient un volet spécifique de l'accord post Cotonou. Ces éléments positifs doivent cependant être précisés dans les décisions finales de l'Union européenne.
La Représentation française permanente auprès de l'Union européenne effectue un travail très important. Nous considérons que leur démarche pourrait cependant être plus efficace et leur soutien plus fort, même si leur contribution mérite d'être saluée. Lors de mon dernier déplacement à Bruxelles, j'ai eu l'opportunité de rencontrer M. Koen Doens, le directeur général de la coopération internationale et du développement (DG DevCo) à la Commission européenne, en charge de la gestion des PTOM et des ACP. Lui-même envisage une démarche transversale entre les différentes directions générales de la Commission européenne : il constate, en tant que DevCo, que les autres directions générales de la Commission ont mis à disposition des pays internationaux des outils générant une certaine forme d'incohérence dans la politique de l'Union européenne à l'égard des PTOM. Il nous a fait part de son intention d'initier une réflexion visant à coordonner la totalité des programmes et des aides que l'Union octroie à tous les pays du monde. Il nous semble qu'une telle démarche est utile car une de nos demandes vise à rendre les PTOM éligibles au même titre que les autres pays ayant la même préoccupation à propos des effets du changement climatique. Certains petits États sont éligibles aux programmes européens, bien au-delà des programmes spécifiques actuels dont ils peuvent bénéficier de manière à la fois superficielle et ponctuelle. Il nous semble que l'information sur les programmes européens doit être mieux structurée et être plus largement diffusée auprès des PTOM. Ceci nous renvoie en particulier à l'OCTA dont la Nouvelle-Calédonie va assurer la présidence à partir de septembre 2020. Nous en assurons actuellement la vice-présidence. Il serait pertinent de faire de l'OCTA la courroie de transmission de l'information sur les programmes européens accessibles aux pays et territoires ultramarins afin qu'ils puissent en bénéficier au maximum.
Le Parlement européen, sur proposition de l'ancien député européen calédonien M. Maurice Ponga, avait envisagé de porter l'enveloppe dédiée aux PTOM à 669 millions d'euros. Malheureusement, à notre connaissance, la Commission envisage de maintenir ce montant à 500 millions d'euros, l'équivalent de ce dont nous avons bénéficié lors du précédent instrument financier. La révision à la hausse de cette enveloppe nous permettrait, si elle était mise en oeuvre, de rééquilibrer notre situation par rapport au Groenland qui a une part prépondérante par rapport aux autres PTOM. Quand le Parlement a proposé de porter l'enveloppe à 669 millions d'euros, il ambitionnait de rééquilibrer la situation à notre bénéfice. Mais il n'en sera pas ainsi.