Le sujet de l'Union européenne et des enjeux fiscaux européens est un enjeu de très grande importance pour nous. Le Président Thierry Santa a dressé un large panorama de la politique qu'il entend mettre en oeuvre dans le cadre de ses relations avec l'Union européenne. Un certain nombre de questions lui ont été posées. Concernant les politiques européennes qui sont applicables sur notre territoire, le Président Thierry Santa a notamment cité le Fonds européen de développement et le FED territorial qui se focalise actuellement sur l'emploi, l'insertion et la formation professionnelle. Ce FED territorial progresse, mais il est compliqué à mettre en oeuvre. Il s'élève à 29,8 millions d'euros. Nous venons d'obtenir, sans réelles difficultés, le décaissement de la troisième tranche. Évoquons aussi l'enveloppe régionale à hauteur de 36 millions d'euros. Cette enveloppe a été multipliée par trois, signe de l'intérêt que porte l'Union européenne à notre île. Le programme régional « Protege » relie les trois PTOM français et un PTOM britannique, actuellement dans une situation assez difficile. Le prochain comité de pilotage (COPIL) du programme « Protege » devrait se tenir à la fin du mois de mars ou mi-avril en Polynésie française. Ce projet a une forte connotation d'intégration régionale et permettrait d'illustrer notre volonté de travailler avec des pays ACP. Nous disposons aussi d'une enveloppe thématique dont le montant s'élève à 20 millions d'euros. Cette enveloppe finance en partie la subvention de l'OCTA et un programme thématique dédié à l'énergie durable et au changement climatique, y compris la réduction des risques de catastrophes naturelles. Ce dernier sujet peine à démarrer parce qu'il n'y a toujours pas eu de programmation.
L'enveloppe territoriale du FED semble bien fonctionner. Nous avons rencontré quelques difficultés, liées à sa structuration, au cours du 9ème FED et la Nouvelle-Calédonie a servi, en quelque sorte, de « cobaye ». Les outils du FED ne sont pas faciles à utiliser pour des pays et territoires géographiquement assez éloignés de l'Union européenne : la cartographie, la mise en place d'indicateurs et du cadre logique, leur respect ensuite, sont compliqués. Les difficultés sont aussi liées au fait que nous manquons localement de personnels spécialistes des programmes de l'Union européenne. Nous nous attelons à mettre en place un programme d'enrichissements de nos ressources humaines, mais cela nécessitera un peu de temps, notamment avec l'aide de l'Union européenne.
La consommation de l'enveloppe territoriale européenne avance bien. La deuxième tranche a été très compliquée : nous avons, en effet, dévissé sur un indicateur. L'Union européenne s'est toutefois montrée clémente à notre endroit. Nous partons du principe qu'un indicateur doit être SMART (simple, mesurable, atteignable, réaliste, temporellement défini). Il s'est avéré que les discussions avec l'Union européenne sur la constitution de ces indicateurs ont été rugueuses, voire rigides. Sur la deuxième tranche, nous avons donc dévissé, notamment sur l'insertion professionnelle, ce qui nous a amenés à renégocier un avenant pour cette tranche. Mais la troisième tranche s'est parfaitement bien déroulée puisque nous avons décaissé la totalité des fonds. Nous avons remercié l'Union européenne et son ambassadeur, basé à Fidji, qui a suivi étroitement le sujet.
Les trois PTOM français ont participé au financement du programme régional dans l'optique de se dédouaner de la contrainte du D+3. Nous pouvons désormais assumer ce programme sur 4 années, tout en sachant que la première année a été consacrée à la structuration de la gouvernance. Si l'on fait un historique, il faut rappeler que l'Union européenne avait financé en 2018, via le 10ème FED régional, le programme Integre avait connu quelques difficultés ce qui avait un peu échaudé nos partenaires polynésiens et wallisiens. Le budget avait été triplé et la gouvernance du projet revue mais les conclusions sont restées en demi-teinte.
Pour le programme Integre, la Nouvelle-Calédonie est ordonnateur régional. Nous avons la lourde tâche de coordonner nos actions et de trouver des solutions consensuelles sur les quatre thématiques que le président Santa a citées au début de notre entretien.
L'instrument financier qu'est le Fonds européen de développement inclut un volet local, régional pour reprendre les termes du Président Santa. Ce volet local est le programme « Protege » interrégional destiné à financer des programmes liés à l'environnement. Ce programme, est en cours sur les quatre années à venir
Sur l'enveloppe thématique qui accompagne la subvention de l'OCTA, vous avez sans nul doute compris l'état d'esprit du Président Santa : il souhaite faire bouger les lignes et veut être force de proposition. Je m'interroge donc sur la capacité à initier une enveloppe thématique liée à une meilleure connaissance des programmes de l'Union européenne à destination de l'intégralité des PTOM. À ce stade, nous ne profitons pas de l'intégralité des programmes de l'Union européenne dont nous pourrions bénéficier. Cela est regrettable : l'Union européenne se coupe d'un relais efficace de son action dans le Pacifique. Je pense qu'il manque donc une courroie de transmission que pourrait être l'OCTA, en dépit de la modestie de ses moyens. Nous souhaitons donc mettre en place une gouvernance et des moyens associés à l'action de l'OCTA : dans le cadre du budget primitif de 2020, nous avons décidé de ré-abonder notre subvention au titre de l'année 2020 et nous avons aussi volontairement doublé notre subvention à l'OCTA. C'est un signal adressé à nos partenaires, notamment dans le cadre du Brexit et de la sortie de 12 PTOM britanniques.
Sur les programmes de l'Union européenne auxquels le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a soumissionné, il y a le programme « Horizon 2020 », lié à la recherche. Sont concernés l'Agence de développement de la Nouvelle-Calédonie (ADECAL), l'institut Pasteur de la Nouvelle-Calédonie, la société Le Nickel (SLN) et l'Université de la Nouvelle-Calédonie. Nous bénéficions également du programme « Erasmus + » qui permet une ouverture sur le monde au travers des échanges bilatéraux d'étudiants. Nous avons accueilli l'an passé des étudiants en provenance des Canaries. Le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie bénéficie également du programme européen pour la compétitivité des entreprises et des petites et moyennes entreprises (COSME), via l'ADECAL qui est un membre du réseau Enterprise Europe Network, et du programme « Best 2.0 », au travers du programme régional océanien de l'environnement (PROE), du conservatoire des espaces naturels de Nouvelle-Calédonie (CEN) et de la communauté du Pacifique (CPS). Ce dernier programme a concerné notamment la commune de Houaïlou particulièrement marquée par des décès à la suite des précipitations qui ont provoqué des éboulements et un glissement de terrain. La commune a pu bénéficier d'aides pour lutter contre ce désastre. Malheureusement, lorsque nous interrogeons nos services, les acteurs économiques locaux et les entreprises sur un recensement des programmes de l'Union européenne auxquels la Nouvelle-Calédonie pourrait être éligible, il s'avère que pas un d'entre eux n'est en mesure de fournir des statistiques consolidées. Cela est bien fâcheux. Quand on demande à l'Union européenne des financements, une éligibilité, une meilleure vision des programmes auxquels nous devrions avoir accès, il faut que nous soyons en capacité de justifier des avancées et des programmes pour lesquels nous avons candidaté. C'est une faiblesse de la Nouvelle-Calédonie que nous avons notée et qui pourrait peut-être être solutionnée en lien avec l'OCTA.
En effet, L'OCTA pourrait jouer un rôle éminent en matière de diffusion de l'information auprès des PTOM. Cela sera débattu lorsque la Nouvelle-Calédonie en assurera la présidence au titre de la feuille de route 2020/2021. Chaque PTOM pourrait communiquer sur les secteurs potentiellement visés au premier chef par une stratégie de développement ; l'OCTA jouerait le rôle de courroie de transmission, à charge ensuite à chaque PTOM de se structurer et de mettre en place un organisme (un service gouvernemental, une agence, un GIP, un établissement public...) qui diffuserait localement ces informations. À cette fin, notre service de coopération régionale et des relations extérieures pourrait, dans un premier temps, jouer ce rôle de diffuseur. Diffuser l'information est bien, pouvoir candidater, et être éligible c'est encore mieux. Réaliser les programmes est encore bien mieux. Nous avons un besoin d'accompagnement auprès de nos acteurs (entreprises, structures publiques) de manière à ce que chacun d'entre eux puisse être formé correctement pour pouvoir répondre dans des conditions idéales. Si les dossiers ne sont pas examinés pour la simple raison qu'ils ne respectent pas le formalisme attendu, nous passons à côté de l'objectif.
Vous posiez tout à l'heure la question de l'organisation des autorités chargées de la gestion des fonds. Je vous ai dit que la Nouvelle-Calédonie est ordonnateur territorial et régional des fonds du FED. L'appui dont notre Gouvernement bénéficie s'entend souvent sur le plan budgétaire. Le Gouvernement s'appuie sur des équipes techniques pour la réalisation et la mise en oeuvre des instruments financiers DAO : la direction du travail et de l'emploi, la direction de la formation professionnelle, la direction du budget et des affaires financières et le service de coopération régionale et des ressources extérieures(SCRRE). Nous nous appuyons aussi sur la Communauté du Pacifique sud (CPS) et le Programme régional océanien pour l'environnement (PROE). Notre SCRRE est en pleine mutation. Il ne compte à cette date que deux chargés de mission spécialisés sur les relations avec l'Union européenne. L'un d'entre eux doit prendre ses fonctions à la mi-mars car la personne qui occupait le poste vient de réussir le concours d'administrateur territorial. L'autre est installé à Paris, à la Maison de la Nouvelle-Calédonie. Il effectue de fréquents aller-retour à Bruxelles. Ces deux antennes nous rendent compte régulièrement et nous permettent d'avancer. Cela ne nous empêche toutefois pas d'assurer notre propre travail auprès de l'Union européenne. Le Président du Gouvernement effectue à chaque déplacement métropolitain une visite à la Commission européenne. Nous avons constaté que la Nouvelle-Calédonie n'y est pas assez connue. Il nous appartient donc de faire sa promotion auprès des autorités européennes, avec des axes thématiques sur lesquels nous nous retrouvons comme le Pacte vert, à savoir la préservation de la biodiversité ou nos actions contre le changement climatique. Il nous apparaît également nécessaire de décrire les enjeux des PTOM en général auprès de l'Union européenne.