Intervention de André Gattolin

Commission des affaires européennes — Réunion du 16 juillet 2020 à 12h35
Énergie climat transports — Nord stream 2 et extraterritorialité du droit américain : communication de m. claude kern examen d'une proposition de résolution européenne et d'un avis politique

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Il est question des États-Unis. Nous nous adressons à l'administration américaine et à l'ambassadeur. En réalité, l'article 2 de la Constitution des États-Unis confère en ce domaine un pouvoir considérable au Congrès. Quand Donald Trump ne souhaite pas ratifier un texte, il risque d'être contredit par un second vote et de se le voir imposer par le Congrès. Le Hong Kong Human Rights and Democracy Act a par exemple été mis en oeuvre il y a 24 heures, alors que Donald Trump ne voulait pas le signer. Le texte lui a été imposé par les deux Chambres. Il l'a finalement ratifié pour éviter un second vote. Il serait donc intéressant pour nous de parler avec les parlementaires américains.

Je fais partie d'un groupe consacré à la défense et la surveillance, dont sont membres également des sénateurs américains. Je participe régulièrement à un webinaire avec eux. Nous évoquons ces questions. Attention à ne pas nous enfermer dans une vision franco-gallo-centrique de la politique. Nous parlons avec les ambassadeurs, au lieu de parler à nos homologues. Les sénateurs américains, républicains notamment, ont besoin de parler avec l'Europe. Ils parlent avec les Allemands, les Italiens, les Belges, pas avec les Français, qui ne leur adressent pas la parole.

Je serai clair. Je ne voterai pas le texte que le rapporteur nous propose. Sur la forme, je reconnais que la façon d'agir des Américains est scandaleuse. Sur le fond, les Américains ont en revanche totalement raison. Nous parlions précédemment du nucléaire. Il n'existe pas d'Union de l'énergie. Je me suis opposé à plusieurs reprises au projet Nord Stream 2 dans cette commission, le jugeant scandaleux. Nous avions voté une résolution lorsque la Commission européenne avait souhaité obtenir un droit de regard ex ante sur les accords énergétiques stratégiques concernant le gaz et le pétrole. Le scandale vient aujourd'hui du projet Nord Stream 2, qui évite l'approvisionnement traditionnel de l'Allemagne via la Pologne. Un ex-chancelier allemand est en effet devenu aujourd'hui un grand responsable de Gazprom. Gerhard Schröder, qui avait peut-être beaucoup de talent en tant qu'homme politique, s'est recyclé en homme d'affaires. Il avait signé un pré-accord lorsqu'il était chancelier, en faveur d'un projet dont il est devenu aujourd'hui le principal lobbyiste. Pour la chancelière allemande actuelle, il est extrêmement difficile de prendre position contre, pour des questions de bienséance.

De leur côté, les Russes ont prévu de vendre le gaz aux Allemands 40 % moins cher qu'ils ne le vendent aux Polonais. Nous pouvons critiquer nos amis polonais sur leur absence de solidarité sur certains sujets. Nous-mêmes ne faisons pourtant preuve d'aucune solidarité avec eux. L'Allemagne est la première à ne pas être solidaire avec la Pologne. Le projet Nord Stream 2 est un abus et une erreur. En termes d'indépendance énergétique, il est absurde. La France s'est tournée depuis quelques dizaines d'années vers la Norvège, qui paraît plus sure en termes d'indépendance énergétique que la Russie de Poutine, même si le coût du gaz norvégien est supérieur.

Enfin, je partage l'avis de M. Leconte quant à la nécessité de créer un dispositif d'extraterritorialité européen.

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