Intervention de François Baroin

Réunion du 8 novembre 2010 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2011 — Discussion d'un projet de loi

François Baroin, ministre :

… notamment en raison de la grande crise des années 2008 et 2009. Nous devons réduire notre déficit public en agissant sur la dépense, tout en évitant de provoquer un effet récessif, alors même que la situation économique s’améliore.

C’est une exigence absolue à court et moyen terme. Elle concerne aussi bien l’État que les concours de ce dernier aux collectivités locales et les comptes sociaux.

Il est donc impératif que nous assurions l’équilibre de notre système social à long terme.

L’enjeu est de défendre la pérennité d’un système social qui est unique par le niveau de protection qu’il assure et qui constitue un élément clé de la cohésion nationale. Nous avons d’ailleurs pu constater, pendant la crise, l’importance de son rôle d’amortisseur. Si nous voulons garantir aux générations futures un confort social similaire au nôtre – c’est notre devoir –, il nous faut relever ce défi.

La stratégie que j’ai l’honneur de vous proposer pour 2011 au nom du Gouvernement répond à cet impératif et s’inscrit dans une trajectoire globale de moyen terme.

Notre système social est un atout indiscutable de notre pays. J’évoquais à l’instant le rôle primordial d’amortisseur qu’il a joué au cours des derniers temps.

Toutefois, les comptes sociaux ont gardé les traces de la crise très importante que nous avons subie et qui a vu un effondrement des recettes de l’État – plus de 50 milliards d’euros. Je me permets de rappeler à la Haute Assemblée que nous avons perdu, uniquement sur l’impôt sur les sociétés, plus de 20 milliards d’euros en quelques mois. Cela démontre l’élasticité de notre modèle et illustre le choix fait à l’époque par le Gouvernement de ne pas augmenter les impôts. Ce choix vous est à nouveau proposé dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Pour autant, si la crise est derrière nous, il nous faut évidemment effacer les traces qu’elle a laissées.

L’objectif du Gouvernement pour les prochaines années est donc de tout mettre en œuvre pour rétablir les équilibres et préserver notre système.

Nous avons été confrontés à une crise exceptionnelle à laquelle nous avons su faire face.

Notre pari, celui de la relance et de la reprise de l’activité, est en passe d’être gagné. L’heure est maintenant au redressement de nos comptes publics.

Le déficit du régime général pour 2010 s’élève à 23, 1 milliards d’euros. C’est une amélioration encourageante, puisque la commission des comptes de la sécurité sociale annonçait, en juin dernier, près de 27 milliards d’euros de déficit.

Je tiens à vous rappeler ces chiffres car, même si le déficit est, bien sûr, très élevé, cette évolution conforte la stratégie menée par le Gouvernement face à la crise.

Confrontée à une crise sans précédent, la France a effectivement opté pour des choix financiers et budgétaires responsables qui nous ont permis de faire partie des premiers pays à être sortis de la récession : dès le deuxième trimestre de 2009, notre croissance est redevenue positive.

Les indicateurs économiques s’orientent dans le bon sens, ce qui est très encourageant. Nous avons constaté qu’en 2010, la masse salariale retrouvait sa croissance, et ce pour le plus grand bien de nos finances sociales, assises, pour l’essentiel, sur les revenus du travail.

Aujourd’hui, notre pays doit réduire son déficit public, sans que les mesures adoptées soient récessives. Le choix du Gouvernement est donc très clair : utiliser comme levier, non l’augmentation des impôts, mais la maîtrise de la dépense.

Je rappelle de nouveau, à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, notre objectif de réduction du déficit public à 6 % du produit intérieur brut – ou PIB – en 2011. Cet objectif est intangible, il forme la colonne vertébrale de toute l’action des pouvoirs publics en matière de finances publiques.

Le programme que nous nous sommes fixé est un devoir, un engagement, qui traduit un esprit de responsabilité : un déficit public de 6 % du PIB en 2011, 4, 6 % en 2012, 3 % en 2013 – le niveau de déficit constaté avant la crise –, 2 % en 2014 – objectif voté dans le cadre de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 – pour parvenir naturellement, à l’instar de nos voisins allemands, à l’équilibre budgétaire. Pour ce dernier, l’année 2016 apparaît comme un horizon raisonnable, nous permettant de mettre durablement sous tension l’ensemble des sources de dépenses – l’État, la sécurité sociale, les collectivités locales.

Parmi les défis qui nous attendent, celui de la maîtrise de nos dépenses sociales sera probablement le plus déterminant dans les années à venir.

Ce qui est en jeu, en effet, c’est bien l’avenir de notre système de sécurité sociale.

J’en suis absolument convaincu : le financement et l’adaptation de ce système seront le défi majeur des dix prochaines années !

Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, d’évoquer un premier élément de réflexion : notre pays est, à très juste titre, attaché à son système de sécurité sociale. En effet, la protection sociale est, depuis soixante ans, à la fois vecteur et concrétisation du développement économique et social des États de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE.

Dans ces États, entre 1985 et 2005, les dépenses publiques de protection sociale sont passées de 18 % à 21 % du PIB. Cette progression importante traduit plusieurs facteurs communs à l’ensemble de ces pays : la hausse continue des dépenses de santé, sous l’effet notamment de l’innovation technique et thérapeutique et du développement des maladies chroniques, la hausse des dépenses de retraite, en raison de l’impact de l’allongement de l’espérance de vie, la hausse des dépenses pour l’emploi et des prestations sous conditions de ressources, octroyées par les États providence en réponse à la montée du chômage et de la précarité.

Notre système social était, en 2005, le deuxième système le plus protecteur de l’OCDE, après la Suède, avec des dépenses sociales publiques de l’ordre de 29 % du PIB et des dépenses totales – y compris les dépenses privées – représentant environ 32 % du PIB. II est même le plus protecteur, si l’on prend uniquement en compte le niveau des dépenses publiques en matière d’assurance maladie.

C’est dire à quel point le modèle social « à la française » est présent, depuis le lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans la vie quotidienne de chacune et chacun de nos concitoyens et à quel point sa puissance repose sur la réalité de l’effort budgétaire fourni. Le budget de la sécurité sociale, je le rappelle, représente plus d’une fois et demie le budget de l’État. Il faut donc bien prendre la mesure des enjeux, ainsi que des caractéristiques propres à ce modèle social en matière de redistribution et de solidarité.

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