Il est évident que la crise a révélé certaines failles de notre système de santé, mais nous avons aussi quelque peu dévié de notre mode de fonctionnement habituel. Normalement, le médecin généraliste est le gate keeper, la porte d'entrée dans le système de santé. Or, pendant cette crise, on a « shunté » complètement la ville : tout s'est polarisé sur les centres 15 et l'hôpital, de façon anarchique.
J'ai fait partie d'un groupe de travail sur les relations ville-hôpital autour de la question des sorties d'hospitalisation. Nous ne nous sommes pas disputés sur le fond du sujet, mais cela n'a pas marché dans les faits. Il faut essayer de comprendre pourquoi, en pratique, il est difficile de faire « prendre la mayonnaise ». Je ne suis pas certain que le problème du lien ville-hôpital sera réglé dans les prochains mois, mais il faut y travailler.
Comment mieux collaborer ? Si l'on devait faire face à une seconde vague, il faudrait axer la communication sur le parcours du patient qui doit être lisible. Même pour nous, les professionnels, cela n'a pas été le cas pendant très longtemps. Il faut dire au patient suspecté d'être infecté à qui s'adresser, dans quel délai, etc. Les professionnels doivent avoir les mêmes schémas en tête.
Enfin, il faut continuer d'accompagner les territoires. Je rejoins l'avis de mon collègue : dans notre territoire, la population est de 55 000 habitants, c'est une échelle humaine qui a bien fonctionné.
Pour rebondir sur les propos de Mme Padoly, il ne faut pas oublier que nous ne sommes pas passés loin de la catastrophe. Si le confinement n'avait pas fonctionné et si nous n'avions pas constaté une diminution des cas, les équipes n'auraient plus été capables de continuer. Les personnels étaient épuisés, car tout le monde n'a pas travaillé pendant la crise, pour toute une série de raisons - des personnes étaient à risque, d'autres ont eu peur, etc. De grandes responsabilités ont reposé sur peu d'épaules. De nombreux professionnels ont vécu des situations semblables à celles qu'elle a évoquées.
L'intérêt d'associer les professionnels, c'est que cela permet de mieux les « embarquer » par la suite. Si l'on rédige des recommandations, sans se demander comment les appliquer concrètement, cela ne fonctionne pas. Associer les professionnels permet de reconnaître leur expertise. Ce simple geste permet de mieux faire accepter les décisions qui seront ensuite actées.