Sur la fracture numérique, madame Préville, nous avions proposé en septembre 2019 aux équipes pédagogiques d'équiper les lycées d'Île-de-France en tout numérique. La moitié des lycées avait répondu oui. Compte tenu de ce que nous avons constaté au printemps, nous distribuerons ces équipements à tous les lycées l'année prochaine. Ainsi, chaque collégien qui rentrera au lycée aura droit à une tablette ou à un ordinateur, sauf si ses parents le refusent - ils peuvent considérer qu'ils ont déjà des équipements ou qu'ils ne veulent pas d'ordinateur chez eux. Les équipes pédagogiques ne pourront pas refuser sous peine de mettre à mal la continuité pédagogique, ce qui n'est pas acceptable. Nous serons donc à un taux d'équipement de 100 % et cela coûtera ce qu'il faut !
Pour les étudiants qui entrent à l'université, nous avons préparé un fonds d'aide à l'équipement informatique. C'est un point particulièrement important compte tenu de l'appauvrissement des étudiants et au moment où ils n'ont plus de petits boulots pour leur apporter des ressources complémentaires.
Il a fallu attendre entre deux et trois semaines entre le moment où nous avons reçu des masques et celui où nous avons pu les distribuer, notamment aux agents de police, de transport ou de sécurité. Nous avons reçu notre première livraison le 28 mars - un million -, puis une commande importante le 2 avril - cinq millions. Les premiers masques ont d'abord été donnés aux soignants, dans les Ehpad et à l'ARS ; nous les avons donc donnés à l'État qui n'en avait pas - il n'y a donc pas eu, monsieur Lévrier, de concurrence. Nous les avons ensuite donnés aux communes qui n'en avaient pas non plus à cette époque. En fait, nous avons été livrés plus rapidement.
J'ajoute que les entreprises de transport n'en disposaient pas non plus. M. Farandou, président de la SNCF, Mme Guillouard, présidente de la RATP, et moi-même avons plaidé auprès de l'État pour que leurs agents soient également équipés. Ce n'est qu'au bout de quelques semaines, lorsque des agents ont été malades, que nous avons obtenu gain de cause.
Pour la police, l'affaire a été encore plus rocambolesque, puisque nous n'avions d'abord pas le droit de les donner et que le ministère de l'intérieur a finalement accepté que nous en donnions aux syndicats de policiers, pas aux agents directement... C'est donc ce que nous avons fait !
Monsieur Lévrier, j'ai à l'époque proposé à l'État de créer un fonds commun de masques entre l'État et la région, mais c'était évidemment à la condition que les masques de la région ne soient distribués qu'en Île-de-France. J'avais aussi proposé qu'on adopte une doctrine de déploiement prioritaire, les masques devant être distribués dans les régions les plus touchées par la maladie, mais l'État n'a pas accepté de mettre en place une telle doctrine.
Mme Jasmin m'a demandé pourquoi Patrick Karam avait démissionné. Nous avons eu un désaccord. Patrick Karam a joué un rôle extrêmement important dans l'approvisionnement de la région Île-de-France en masques, notamment parce qu'en tant que vice-président chargé de la citoyenneté il avait noué des liens étroits avec les Franco-Chinois de la région, mais il était choqué par le fait que nous n'ayons pas le droit de les distribuer librement. Il souhaitait aussi que les tests soient réalisés en masse sans délai. Il a alors attaqué en justice les directeurs généraux de l'ARS et de l'AP-HP, ce qui n'était pas la voie que j'avais choisie, et il a été débouté. Je n'étais pas favorable à ce que nous nous divisions durant cette crise ; je pensais au contraire que nous devions nous serrer les coudes, même si nous ne comprenions pas pleinement la stratégie de l'État. Patrick Karam a voulu, avec la fougue que vous lui connaissez, porter ces questions sur la place publique ; nous étions en désaccord sur ce point et sur la stratégie à adopter. Ce désaccord est désormais derrière nous, puisqu'il est récemment redevenu vice-président de la région Île-de-France.
Madame Cohen, je crois que les départements ont un grand rôle à jouer dans la gestion de notre système, mais l'Île-de-France a une particularité dont il faut tenir compte et qui rend difficile de « départementaliser » l'ARS : l'existence d'un acteur surpuissant, l'AP-HP, qui représente la moitié du système hospitalier francilien. Or cinq millions d'habitants vivent en grande couronne. C'est pourquoi la gestion de l'aménagement médical du territoire et de l'offre de soins doit se faire au niveau régional en lien avec l'AP-HP et en prenant en compte de manière forte les quartiers populaires et les territoires ruraux. Je ne vois pas comment donner à des départements d'Île-de-France comme l'Essonne ou la Seine-et-Marne le pouvoir de gérer un système hospitalier qui est aujourd'hui très déséquilibré et très centralisé autour de l'AP-HP. L'échelon régional est aussi le plus adapté pour assurer la péréquation entre les territoires.
Monsieur Lévrier, je crois que je vous ai répondu. Pour moi, il n'y a pas eu de concurrence, y compris en ce qui concerne la distribution des masques dans les transports en commun, puisque l'État n'en avait pas, au moins au départ. D'ailleurs, si l'État en avait eu, je n'aurais pas eu besoin d'en commander et de dépenser l'argent du contribuable... J'ajoute que cette politique a été décidée à l'unanimité des groupes politiques du conseil régional.
Madame Delmont-Koropoulis et monsieur Karoutchi, je vous remercie de vos gentilles paroles. Je laisserai naturellement les professionnels répondre sur la question des tests, mais je pense qu'il y a une complémentarité très utile entre les tests PCR et sérologiques - ils n'ont pas le même usage. Les tests sérologiques validés par la Haute Autorité de santé sont évidemment fiables.