Fin mars et début avril, j'ai personnellement reçu des appels et témoignages de directeurs d'Ehpad m'affirmant qu'en cas de persistance des pénuries de masques, ils n'auraient pas d'autre choix que de faire valoir leur droit de retrait. Face au silence des pouvoirs publics les concernant, mon département a été contraint de construire une chaîne de solidarité autonome avec différents acteurs économiques. Ces actions, bricolées dans l'urgence, se sont composées d'achats sporadiques ou de montages de filières de production spécifiques. On a ainsi pu s'appuyer sur des chambres consulaires et quelques entreprises, dont la production a été intégralement absorbée par les commandes des départements et des intercommunalités ; ce réseau, toujours actif, nous permet d'envisager l'avenir avec davantage de sérénité qu'au plus fort de la crise.
Dans le prolongement des échanges que nous avons eus sur l'approfondissement nécessaire de la décentralisation, je constate que ce recours contraint au tissu économique local a dépassé le strict cadre des missions que la loi attribue aux départements. Pour autant, cette initiative a été plutôt conclusive car, en plus d'assurer l'équipement de personnels dépourvus de masques, elle a permis de soutenir la commande publique au sein de nos territoires et de mobiliser, dans le cadre de dispositifs d'insertion professionnelle, de jeunes couturiers qui n'avaient jusqu'alors pas la possibilité d'exercer.
Vous avez posé la question de la coopération internationale. En tant qu'élu d'un territoire frontalier, j'ai été, au début de la crise, confronté aux blocages qu'on opposait de part et d'autre à toute collaboration des acteurs transfrontaliers. Fort heureusement, ces blocages ont été progressivement levés, et les contacts entre nos deux ministres des Affaires étrangères ont permis l'accueil de patients français dans des hôpitaux allemands. J'ajoute que la compétence que nos voisins allemands reconnaissent aux maires dans la définition de l'offre hospitalière a permis de nouer des contacts à un niveau nettement plus pertinent.
Monsieur Lévrier nous a posé la question de l'opportunité d'un confinement plus précoce. J'avais eu moi-même le Premier ministre Edouard Philippe au téléphone pour plaider pour un confinement immédiat et large du monde économique. Il me paraissait aberrant que les possibilités de « télétravail » soient ouvertes aux « cols blancs », alors que certains « cols bleus » se voyaient contraints en pleine crise de se rendre sur leur lieu de travail. J'avais également alerté la ministre du travail Muriel Pénicaud sur les risques qu'engendrait cette dichotomie en termes de communication.
Madame de la Gontrie, les départements ne détiennent pas de compétence directe en matière de crèches et d'écoles. Nous avons cependant des liens privilégiés avec les assistantes maternelles, que nous avons pu équiper en masques.