Je ne le sais pas exactement. Je vous transmettrai les chiffres.
L'étude épidémiologique a été faite conjointement entre les épidémiologistes du SSA et les épidémiologistes civils. Ces derniers se sont assez rapidement orientés vers un possible lien de Crépy-en-Valois avec la base. Or les premiers symptômes des malades de Crépy sont apparus entre le 14 janvier et le 1er février, donc avant le vol de Wuhan, ce qui plaide pour une contamination depuis Crépy vers la base.
Je n'ai pas eu beaucoup d'informations sur les matelots qui ont dormi sur la base. Cela dit, je ne doute pas que ce que vous dites est vrai... En revanche, ils n'ont pas eu de contacts directs avec les personnels initiaux du cluster du GSPdD, avec les premiers malades de la base, puisqu'ils étaient en chambre. Ils sont ensuite partis directement à Crépy. Ils n'ont fait qu'un aller-retour sur la base pour la nuit.
Pour ce qui est des consignes du ministère des armées, je suivais les consignes du SSA, qui apportait l'expertise épidémiologique. J'ai pris les devants sur le plan opérationnel, dans la mesure où, dès le samedi 29 février, voyant que le cluster était confirmé et qu'il fallait assurer les missions vitales de la base, j'ai demandé à l'état-major de l'armée de l'air de passer tout de suite en effectifs restreints et en confinement. Certaines de nos unités sont ainsi descendues à quasiment 20 % ou 30 % de leurs effectifs dix jours avant le passage des armées en effectif minimum. Dès le week-end, l'état-major me donne son accord. Ne reviennent le lundi que les personnes de la première bordée, pour réaliser les missions prioritaires. Dès la semaine précédente, j'avais demandé à mes commandants d'unité de préparer leur plan de contingence en vue d'un passage en effectifs réduits dès le lundi. Ont alors surgi toutes les questions relatives au télétravail, au statut du personnel à domicile. Cela a servi de retour d'expérience pour les autres bases.
Nous avons évidemment consenti un gros effort sur l'Estérel. Dès l'apparition du cluster, beaucoup de missions ont été annulées, mais certaines devaient absolument être effectuées, en particulier des relèves d'opérations extérieures, notamment dans les territoires d'outre-mer. Nous avons très rapidement développé, avec l'armée de l'air, une doctrine de protection des personnels de l'Estérel : port du masque en permanence, fin des services à bord - ils ne servent plus à manger, une bouteille d'eau est prépositionnée sur le siège... Les passagers qui n'ont pas été testés sont séparés de ceux qui l'ont été, pour éviter les interactions.
Tout cela, je ne l'ai pas fait uniquement localement. Je l'ai fait en coordination étroite avec les experts en santé et l'état-major de l'armée de l'air, pour que ces procédures soient appliquées in fine dans toutes les flottes de transport, au-delà des Airbus de l'Estérel - l'A400M, les ravitailleurs d'Istres, les C-130, etc.
Je vous confirme, madame Jasmin, que la chaîne de prélèvements repose sur des tests PCR laryngo-pharyngés. Cette chaîne a été mise en place grâce à l'expertise d'épidémiologistes et de deux médecins de l'Institut de recherche biomédicale des armées (Irba), qui ont une vraie habitude de la virologie, avec une capacité de 15 à 20 tests par jour, à destination des personnels présents sur la base. Les personnels confinés à domicile ont été envoyés dans un CHU ou aux urgences pour être testés dans le milieu civil.
C'est le service de santé des armées qui a monté de A à Z la chaîne de tests sur la base. Nous étions entièrement autonomes.